Vingt ans déjà que la question de l’anonymat en ligne revient de temps à autre sur la table du débat public en France ; elle n’est donc pas nouvelle et vient de prendre un coup de neuf avec une interview de Jean Castex accordée au quotidien Le Parisien. Sans détour, le nouveau Premier ministre qualifie les réseaux sociaux (et l’anonymat qui les caractérise) de régime de Vichy, c’est-à-dire de sphère illégitime. Il fait d’ores et déjà savoir que c’est un sujet dont le gouvernement va devoir s’emparer. Nouvelle annonce de la levée de l’anonymat après celles du président Emmanuel Macron ?
« Sur la question des réseaux sociaux, il y a quelque chose de choquant, c’est l’anonymat. On peut vous traiter de tous les noms, de tous les vices, en se cachant derrière des pseudonymes. Dans ces conditions, les réseaux sociaux c'est le régime de Vichy : personne ne sait qui c'est ! Je suis pour la liberté d'expression, mais si on se cache, les conditions du débat sont faussées. C'est un sujet dont il va falloir que l'on s'empare », a-t-il déclaré.
La sorite du nouveau Premier ministre fait suite à celle du président français qui, au mois de février de l’année précédente, déclarait : « Moi je ne veux plus de l'anonymat sur les plateformes internet. » Il confirmait ainsi son positionnement après avoir plaidé pour une « levée progressive de tout anonymat » devant les maires réunis pour le deuxième acte du grand débat national au Palais des congrès de Souillac (Lot). Le Président français avait alors déclaré que pour améliorer la qualité de la démocratie participative, l'on « doit aller vers une levée progressive de toute forme d'anonymat » en faisant mention de « processus où on sait distinguer le vrai du faux et où on doit savoir d’où les gens parlent et pourquoi ils disent les choses ». Macron pensait déjà que cela est nécessaire étant donné qu'aujourd'hui, « on a beaucoup d’informations, tout le temps, mais on ne sait pas d’où elles viennent. »
Dans une sortie destinée à apporter réponse aux critiques des internautes et des défenseurs de la vie privée, Mounir Mahjoubi, le Secrétaire d'État chargé du Numérique d’alors, était venu clarifier le propos d’Emmanuel Macron en précisant que ce dernier visait l’anonymat en lien avec la démocratie participative.
« Sur un site de rencontres, je veux bien que tout le monde s’appelle Robert234 ou Angeline2828. Chacun doit pouvoir choisir son pseudo et sa vie virtuelle. Mais quand on est sur un site de démocratie participative, notamment les dispositifs numériques pour que les citoyens puissent s’exprimer régulièrement, faire des pétitions légales, je ne veux plus que ce soit anonyme », avait-il illustré.
Le propos d’Emmanuel Macron de février 2019 sur la question est néanmoins clair : il s’agit d’aller au-delà des plateformes de démocratie participative. « On va continuer à travailler avec les plateformes Internet, pour sanctionner ce qui est fait sur ces plateformes », avait-il déclaré. Dans le cadre de la mise en œuvre de telles mesures, le gouvernement français devrait alors procéder à des formules comme celle qui consiste à imposer une pièce d'identité à la création de comptes sur les réseaux sociaux.
« Nous proposons que soit envisagée l’hypothèse de créer une obligation légale de recueil des pièces d’identité à l’occasion de la création de comptes sur les réseaux sociaux, à l'image de ce qui existe sur d'autres plateformes telles que AirBnb », avaient suggéré les députés Laurence Vanceunebrock-Mialon, Raphael Gérard et Gabriel Serville, en rebondissant sur les agressions qu'a connues le chanteur LGBT Bilal Hassani sur Twitter.
En sus, il y a que le gouvernement français s’est engagé à lancer une Carte Nationale d’Identité électronique dès 2021. On voit bien le dispositif servir aux besoins d’identification sur les plateformes de démocratie participative de France. C’est la faisabilité de son ouverture vers la totalité des plateformes auxquels les Français accèdent qui est à examiner ; c’est néanmoins une possibilité à prendre en compte.
Si la question est de pouvoir identifier les tiers sur les réseaux sociaux, il semble que la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) ait déjà tranché. En effet, les fournisseurs d’accès Internet connaissent bien leurs clients qui, en dehors de leur fournir des informations personnelles (identité réelle, adresse postale, coordonnées bancaires, numéro de téléphone, etc.) laissent diverses traces numériques parmi lesquelles l’adresse IP. Il vient donc que de la même façon que des tiers usent de moyens de masquer leur identité en ligne, il en existe pour leur mettre la main dessus. La loi offre tous les moyens adéquats pour remonter jusqu’à l’identité des internautes, si nécessaire. C’est peut-être la célérité dans les actions de la justice qui fait problème.
Le nouveau Premier ministre reste néanmoins d’avis qu’il « faudrait réglementer un peu tout cela. » Le calendrier de mise en œuvre reste cependant vierge, car comme l’a reconnu Jean Castex, « ce n’est pas certain que je le ferai maintenant. Ma priorité absolue, c'est de lutter contre le chômage pour la reconquête économique. »
Source : Le Parisien
Et vous ?
Faut-il vraiment mettre un terme au pseudonymat sur les réseaux sociaux en France ? Quelles seraient les conséquences d’une telle décision ?
L’utilisation de l’identité réelle est-elle de façon systématique gage de civilité ?
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« L'anonymat sur les réseaux sociaux c'est le régime de Vichy », « quelque chose de choquant » dont le gouvernement français va devoir s'emparer,
D'après le nouveau Premier ministre Jean Castex
« L'anonymat sur les réseaux sociaux c'est le régime de Vichy », « quelque chose de choquant » dont le gouvernement français va devoir s'emparer,
D'après le nouveau Premier ministre Jean Castex
Le , par Patrick Ruiz
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