Alphabet a indiqué que ses revenus avaient progressé de 20% pour se chiffrer à 40,5 milliards de dollars au troisième trimestre. Le bémol ? Le bénéfice a chuté à 7,07 milliards de dollars ( contre près de 9,2 milliards de dollars un an plus tôt). Bien qu'ayant dépassé les prévisions de Wall Street, le bénéfice a été affecté par la hausse des coûts de recherche et développement et de marketing, a annoncé la société.
Une amende payée en France dans le cadre de poursuites en France a amputé le bénéfice net de 549 millions de dollars, a expliqué la directrice financière, Ruth Porat, à la chaîne CNBC, mais sans dire précisément de quelle affaire il s'agissait. Le 12 septembre, Google avait accepté de verser au total 1 milliard d'euros pour solder l'ensemble de ses contentieux avec le fisc français. Dans le cadre de cet accord, la multinationale a accepté d'une part de payer 500 millions d'euros d'amende pour mettre un terme à une enquête du parquet national financier (PNF), et d'autre part de verser 465 millions d'euros de rattrapage fiscal pour clore les procédures de redressement engagées à son encontre.
Porat a expliqué que le résultat net avait été également affecté par la baisse de valeur de certains investissements, mais là encore sans préciser lesquels. En plus de la hausse des dépenses, Alphabet a déclaré avoir subi une perte de 1,5 milliard de dollars après avoir déprécié ses investissements dans les sociétés Uber et Lyft.
Des performances qui viennent souligner les difficultés rencontrées pour maintenir la croissance de l'entreprise et qui montrent que Google doit investir pour maintenir cette croissance. Bien que la publicité, enracinée dans le moteur de recherche Internet de Google, ait galvanisé les résultats d’Alphabet au cours des dernières années, cette activité ne progresse pas aussi vite qu’elle le faisait auparavant.
Outre la concurrence accrue d'acteurs comme Amazon, Alphabet fait face à d'autres défis :
- Google est dans la ligne de mire des régulateurs et des politiciens qui veulent supprimer son monopole. Parmi eux, figure la sénatrice Elizabeth Warren qui, lors d’un événement de campagne dans le Queens début mars 2019, a fait la promesse de démanteler des grandes enseignes numériques comme Amazon, Google et Facebook si elle était élue présidente des États-Unis afin de promouvoir la concurrence dans le secteur technologique.
- Ses employés ont été mécontents de la direction. Fin 2018, nous avons appris que depuis 2016, l’entreprise avait licencié des dizaines d’employés parmi lesquels des hauts cadres, ceci pour des motifs de harcèlement sexuel. Certains de ces hauts cadres avaient reçu de grosses sommes après leur licenciement, ce qui a provoqué une réaction de milliers d’employés qui avaient décidé de quitter leurs postes de travail pour manifester contre ce genre de traitement. Parmi les demandes des manifestants figurait l’arrêt immédiat de la pratique de l’arbitrage forcé qui imposait aux employés de régler en privé plutôt que devant les tribunaux, les affaires portant sur le harcèlement, les voies de fait et la discrimination. Sundar Pichai a répondu quelques jours plus tard avec une lettre dans laquelle l'entreprise annonçait qu’elle modifiait sa politique sur l’arbitrage, mais uniquement dans les cas de harcèlement et d'agression. Ce mouvement des employés de Google a inspiré d’autres entreprises comme Airbnb et eBay qui ont elles aussi changé leur politique en matière de harcèlement sexuel.
- Des politiciens américains ont accusé la société de partialité. Parmi eux nous pouvons citer le président des États-Unis, Donald Trump qui a accusé Google de truquer les résultats des recherches afin de donner priorité aux fake news concernant le président Trump. Quelques jours plus tard, le président a accusé le moteur de recherche de ne pas avoir fait la promotion de son discours annuel comme il avait fait la promotion de ceux d’Obama.
Le président s’est insurgé en juin dernier contre le fait que Google, Facebook et Amazon auraient été de mèche avec les démocrates pour œuvrer à l’empêcher de gagner en 2016. Dans une série de tweets publiés en août dernier, le président explique s’être basé sur les déclarations de Kevin Cernekee, ex-employé de Google, et du journaliste Peter Schweizer quant aux hypothétiques mauvaises intentions de l’entreprise de la Silicon Valley envers le président américain. En effet, Kevin Cernekee déclarait dans une interview accordée à Fox News le 05 août dernier que les dirigeants de Google comptent exploiter « toutes les ressources dont ils disposent pour contrôler les informations diffusées au grand public et s’assurer que Trump perde en 2020 ». Peter Schweizer, quant à lui, déclarait dans un livre qu’au cours de la campagne présidentielle de 2016, Google aurait « supprimé des articles négatifs sur Hillary Clinton et valorisé des articles négatifs sur Donald Trump ». - YouTube a été la cible des critiques pour avoir diffusé des informations erronées. Parmi les raisons de ces critiques, nous pouvons citer le fait qu'en avril, alors que Notre-Dame de Paris était ravagée par un grave incendie, plusieurs internautes américains souhaitant suivre l’évènement en direct sur YouTube ont remarqué l’apparition d’une fenêtre les invitant à consulter un article de l’Encyclopedia Britannica sur les attentats du 11-septembre. En fait, YouTube a indiqué que les flux de données de l'incident étaient des sources possibles de désinformation, puis il a commencé à montrer des articles à la population sur les attentats du 11 septembre.
Plusieurs organes de presse ont rapidement commencé à diffuser l'incendie sur YouTube. Cependant, sous plusieurs d'entre eux se trouvait un petit panneau gris intitulé "Attaques du 11 septembre", qui contenait un extrait d'un article de l'Encyclopedia Britannica concernant le 11 septembre.
Google veut réduire sa dépendance à la publicité en multipliant les investissements
Au cours des dernières années, Google s'est efforcé de réduire sa dépendance vis-à-vis de la publicité. L'entreprise a fait des investissements pour séduire les entreprises clientes de ses services cloud, s'est diversifiée en s'aventurant de plus en plus dans le marché du hardware notamment avec la sortie de nouveaux smartphones, des haut-parleurs connectés et des ordinateurs, et a continué à investir de l'argent dans des secteurs tels que des voitures autonomes et la connectivité cellulaire à partir de montgolfières.
Pour développer ces nouvelles entreprises, Google investit énormément dans l'embauche de personnel, les centres de données et le financement de la commercialisation de nouveaux produits, tels que ses smartphones Pixel.
Ces investissements n'ont pas encore porté leurs fruits. Google Cloud connaît une croissance rapide, mais reste derrière Amazon et Microsoft et on ignore si son activité est rentable. Les gains financiers les plus remarquables tirés des investissements moonshot d’Alphabet (qu’il appelle «autres paris») sont qu’ils ne nécessitent plus autant de dépenses qu'avant.
Un nombre d’embauches « inhabituellement élevé » au cours du trimestre
Ruth Porat a déclaré que la société investissait pour embaucher, mais aussi pour ajouter des infrastructures dans des domaines tels que le développement de l’intelligence artificielle et le cloud computing « afin de soutenir notre croissance ».
Alphabet cherche également à étendre son pôle publicitaire en diffusant davantage de publicité dans d'autres sites en ligne tels que YouTube et Google Maps. Un tiers de toutes les dépenses publicitaires numériques mondiales passe par l'entreprise, selon le cabinet d'études eMarketer.
Michael Pachter, analyste chez Wedbush Securities, a déclaré que les résultats d’Alphabet étaient « toujours mauvais », car les bénéfices ont chuté même sans tenir compte des pertes d’investissement. Au total, les dépenses d’Alphabet ont augmenté de 25%, dépassant ainsi la croissance des revenus.
Porat a déclaré que le nombre d’embauches d’Alphabet avait été « inhabituellement élevé » au cours du trimestre, en raison du nombre élevé de diplômés récents. Alphabet a déclaré avoir ajouté environ 6 500 employés au cours du trimestre, pour un effectif total d'environ 114 000 personnes.
La société a également déclaré que son taux d'imposition avait doublé, passant de 9% il y a un an à 18%.
Sundar Pichai, le directeur général de la société, a déclaré lors d’une conférence téléphonique qu’il envisageait des possibilités de rechercher de nouveaux domaines d’activité ou de réaliser des acquisitions. « Il y a beaucoup de nouveaux domaines d'opportunités disponibles pour nous. Dans bon nombre de ces nouveaux domaines, nous sommes le nouveau venu et nous créons de la concurrence », a-t-il déclaré, sans donner de précision.
Source : Alphabet
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