« Je ne lâcherai rien », avait promis il y a moins de deux semaines le ministre français des Finances à propos de la taxation des GAFA. « L’argent, il est chez les géants du numérique, qui font des profits considérables grâce aux consommateurs français, grâce au marché français, et qui payent 14 points d’imposition en moins que les autres entreprises, que les PME, que les TPE, que l'industrie française », a lancé Bruno Le Maire. Le ministre a ensuite ajouté qu'il se donne jusqu'au mois de mars 2019 pour qu'on obtienne une taxation européenne des géants du numérique. Sinon, si les États européens ne prennent pas leurs responsabilités, la France ferait cavalier seul dès 2019.
Lundi 17 décembre, Bruno Le Maire a donné un coup d'accélérateur au projet de taxation des GAFA, du moins au niveau national. Dans une conférence de presse à Paris, il a annoncé que les GAFA seront taxés en France dès le 1er janvier 2019. Et contrairement aux discussions européennes en cours, il cible une assiette fiscale plus large : elle ne limitera pas au chiffre d'affaires, mais sera étendue aux « revenus publicitaires, aux plateformes et à la revente de données personnelles ».
« La taxe s'appliquera en tout état de cause au 1er janvier 2019 et elle portera donc sur l'ensemble de l'année 2019 pour un montant que nous évaluons à 500 millions d'euros », a affirmé le ministre, lors de la conférence de presse. Il a précisé que cette mesure « pourrait être introduite dans la loi Pacte », approuvée en première lecture à l'Assemblée nationale et qui devrait être soumise au Sénat en début d'année prochaine.
La décision de Bruno Le Maire d'y aller seul fait suite à un énième échec dans le projet d'imposition des géants de la tech. Cela fait en effet plusieurs mois que les pays européens discutent, sans parvenir à un accord, sur la proposition de taxation faite par la Commission européenne. Les pays de l'UE n'ont pu ni valider la proposition de la Commission ni aboutir à un accord qui satisfait tout le monde. L'adoption du projet nécessite l’unanimité des 28 pays de l’Union ; or le projet suscite depuis le début l’opposition de plusieurs pays qui craignent de perdre des recettes fiscales, comme l’Irlande, ou qui redoutent des représailles des États-Unis, comme l’Allemagne et les pays scandinaves.
Réunis à Bruxelles le 4 décembre pour discuter de la taxation des grandes entreprises du numérique, les ministres européens des Finances, encore une fois, n'ont pas été en mesure de s'accorder sur un texte définitif, malgré une proposition franco-allemande de dernière minute pour sauver le projet. La nouvelle proposition, même si elle imposait toujours une taxe de 3 %, limitait pourtant la portée du projet aux revenus publicitaires des grandes entreprises du numérique. Mais au moins quatre ministres ont émis des réserves ou exprimé une franche opposition à celle-ci, lors de la réunion à Bruxelles.
Bruno Le Maire dit être déterminé à obtenir avant le mois de mars 2019 une décision européenne à l'unanimité. Il affirme d'ailleurs s'être entretenu récemment au téléphone avec le ministre allemand des Finances Olaf Scholz et qu'ils vont ensemble engager des démarches pour convaincre les quelques États qui restent opposés à cette taxation du numérique au niveau européen. Mais après avoir été patiente face aux nombreuses réticences, la France, fervent partisan de la taxation des GAFA, ne compte pas non plus mettre en péril ses intérêts alors que d'autres pays essaient depuis le début de protéger les leurs.
Elle estime à 500 millions d'euros les recettes qu'elle pourrait percevoir grâce à cette taxation, un montant qui est déjà intégré dans les calculs de la France. Le Premier ministre Édouard Philippe avait en effet précédemment indiqué dans une interview au quotidien Les Échos que son gouvernement comptait sur ces 500 millions d’euros pour financer les mesures sociales annoncées par le président Emmanuel Macron, dont le coût est estimé à environ 10 milliards d’euros.
La recette attendue d'un montant de 500 millions est certes largement supérieure à ce qu'ont payé les GAFA dans l'Hexagone en 2017, mais que vaut-elle dans le budget de l'État. N'est-elle pas très faible par rapport au déficit du budget ? N'est-ce pas là encore une mesurette symbolique ?
Sources : Sud Ouest, BFM TV
Et vous ?
Que pensez-vous de la décision de la France de taxer les GAFA dès le 1er janvier 2019 ?
Le montant annoncé n'est-il pas très faible par rapport au déficit du budget ? N'est-ce pas là encore une mesurette symbolique ?
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Encore une mesurette symbolique ?
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Encore une mesurette symbolique ?
Le , par Michael Guilloux
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