En décembre dernier, la Federal Communications Commission (FCC) a voté afin de mettre un terme à une série de règles encadrant la « neutralité du Net », ouvrant ainsi la voie à la mise en place de nouvelles politiques destinées à la régulation d’Internet. En dépit des protestations (des experts techniques, du Congrès, du peuple américain…) et des actes de soutien pour le maintien de la loi sur la neutralité du réseau, la FCC avait donné son aval pour que la réglementation de 2015 encadrant la neutralité du réseau aux USA et les protections qu’elle avait contribué à mettre en place puisse être supprimée.
Dans sa formulation la plus élémentaire, la loi sur la neutralité du réseau adoptée sous l’ère Obama empêchait les entreprises de câblodistribution et de télécommunication d’appliquer des politiques à caractère discriminatoire ou anticoncurrentiel qui auraient pu porter atteinte à l’intérêt supérieur des consommateurs. Elle assurait notamment aux consommateurs un accès libre au contenu Web et empêchait les fournisseurs de services à haut débit de privilégier leur propre contenu.
Suite à ce revirement des États-Unis, Sébastien Soriano, le patron de l’Arcep (l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes), chargé de l’application de la neutralité du Net en France, avait déclaré que la décision des autorités américaines de mettre fin à la neutralité du Net « n’aura pas d’impact direct en Europe ». Le secrétaire d’État auprès du Premier ministre chargé du Numérique, Mounir Mahjoubi, avait, pour sa part, ajouté : « La France continuera à promouvoir le principe de neutralité du Net, en Europe et dans le monde. »
Le 35e Sommet franco-britannique qui s’est récemment tenu à l'Académie militaire royale de Sandhurst (près de Londres) en Angleterre a été l’occasion pour le président français Emmanuel Macron et la Première ministre britannique Theresa May d’échanger sur des sujets d’actualités concernant directement les deux pays. Ils ont notamment abordé les questions qui portent sur l’industrie du numérique et se sont tout particulièrement attardés sur le dossier de la neutralité du réseau qui est garantie par le droit européen depuis le printemps 2016.
Alors que l’administration Trump s’évertue à rompre avec la neutralité du réseau, Paris et Londres ont marqué leur position commune en signifiant leur attachement à ce principe fondamental au regard du « rôle que les technologies numériques joueront dans l’économie de demain ».
« Nous voulons réaffirmer notre engagement et notre soutien en faveur du principe de neutralité du Net qui encourage la gratuité et l’ouverture de l’Internet », pouvait-on lire dans un communiqué conjoint publié par les deux pays. En France, les parlementaires seraient même favorables à une inscription de la neutralité du Net dans la Constitution.
Au niveau européen, la décision d’enterrer la neutralité du réseau qui a été prise par la FCC n’a pas laissé les élus du vieux continent de marbre. Récemment, un collectif regroupant 148 d’entre eux a adressé une lettre aux membres du Congrès américain leur demandant de prendre des mesures visant à contrer l’abrogation de la loi sur la neutralité du Net initiée aux États-Unis. Ce collectif était mené par la Néerlandaise Marietje Schaake.
« Nous vous prions instamment de garder le cap et vous demandons de renverser les règles adoptées par la FCC en décembre, qui visent à mettre fin à la neutralité du réseau », ont écrit les représentants de l’UE. Ces derniers témoignent ainsi leur soutien à une initiative législative menée au sénat et à la chambre des représentants des États-Unis par un groupe de démocrates qui contestent le résultat du vote des commissaires de la FCC de décembre dernier.
Les élus européens ont insisté sur le fait que « les normes et les règles établies aux États-Unis ont un impact mondial, surtout quand il s’agit d’Internet » ; la gravité de la situation justifierait un certain interventionnisme européen dans cette affaire qui irait bien au-delà des seuls intérêts américains.
D’une manière générale, on note une augmentation des actions tous azimuts visant à invalider ou contrer l’abrogation de la loi sur la neutralité du réseau initiée aux États-Unis par la FCC. On peut rappeler à ce propos la décision du gouverneur américain de l’État du Montana qui a récemment signé un décret exigeant que les fournisseurs de services Internet ayant des contrats avec son État respectent les principes de neutralité du Net ou encore l’action en justice lancée par les procureurs généraux de 22 États contre la décision de la FCC.
Source : Fortune, Communiqué conjoint (PDF), Lettre adressée au Congrès US, The Hill
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Le , par Christian Olivier
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