Alors que le bitcoin a franchi la barre des 60 000 dollars en mars, la crise climatique actuelle propulsée entre autres par l'extraction des cryptomonnaies ne fait que s'accélérer. Comme l'a révélé une analyse de l'université de Cambridge en début d'année, le bitcoin consomme plus d'énergie électrique par an que l'Argentine tout entière, dont la majeure partie est générée par des combustibles fossiles, et la demande ne fait que croître. L’impact semble se généraliser, car cela pourrait être aussi la raison pour laquelle il est difficile d’acheter une carte graphique en ce moment. Toutefois, du fait de la rentabilité de l'activité du bitcoin, les mineurs de bitcoins prévoient d’acheter des centrales électriques pour leurs activités.
En février, une vidéo d'une plateforme minière de bitcoin, rangée dans un conteneur dans un puits de pétrole texan et alimentée par un excès de gaz naturel est devenue virale sur le web, alors que des milliers de personnes ont interpellé la société minière Bitcoin Giga Energy pour ce qu'elles considéraient comme une destruction environnementale gratuite. Aujourd'hui, les choses vont encore plus loin, puisqu'une centrale électrique de l'ouest de l'État de New York, puisant de l'énergie dans un générateur de 106 mégawatts de la centrale désormais alimenté au gaz naturel a été remise en service l'année dernière dans le seul but de fournir de l'énergie pour l'extraction de bitcoins.
L'activité minière est exceptionnellement rentable, au début de l’année 2017, le bitcoin était coté à 1000 dollars. Quelques mois plus tard et plus précisément en mai 2017, la valeur de cette monnaie est passée à 2000 dollars. Durant le mois d'août 2017, le cap des 4000 dollars fut franchi et en octobre 2017, la cryptomonnaie a atteint les 5000 puis 6000 dollars. Bien que l’indice de croissance du bitcoin par rapport à sa valeur d’origine fût déjà élevé, l’on était loin de se douter que les mois à venir allaient être encore plus intéressants pour cette monnaie.
En novembre 2017, la valeur de la monnaie cryptographique a encore grimpé pour passer à 8000 dollars l’unité puis à 10 000 dollars. À la mi-décembre 2017, le cours du bitcoin a battu tous les records en atteignant la valeur de 20 000 dollars. Le bitcoin valait moins de 10 000 dollars il y a un an. Il a franchi les 20 000 dollars mi-décembre, les 30 000 début janvier et les 40.000 puis les 50.000 en février.
Cette croissance exceptionnelle a eu comme conséquence un attrait sur de nombreuses personnes qui ont parfois investi des ressources financières considérables dans l’optique de tirer également profit des gains que pourrait procurer cette monnaie. Il faut souligner que de nombreux projets ont fleuri dans cette même période avec comme arguments la possibilité d’investir dans ces projets basés sur la technologie Bitcoin pour récolter plus tard des bénéfices lorsque ces projets porteront leurs fruits.
Dans une déclaration de soutien aux actifs numériques, Roman Regelman, responsable des services numériques chez la banque of New York Mellon (BNY Mellon) avait révélé que la BNY Mellon avait l'intention de fournir un service intégré pour les actifs numériques. « BNY Mellon est fière d’être la première grande banque mondiale à annoncer son intention de fournir un service intégré pour les actifs numériques », avait déclaré Roman Regelman. « La demande croissante des clients pour les actifs numériques, la maturité des solutions avancées et la clarification de la réglementation nous offrent une formidable opportunité d’étendre nos offres de services actuelles à ce domaine émergent », avait-il ajouté.
Le patron d’Uber avait aussi souligné qu’il pourrait à terme accepter les devises virtuelles comme moyen de paiement. « De la même façon que nous acceptons toutes formes de monnaies locales, nous allons examiner si les cryptomonnaies pourraient être utilisées pour faire des transactions », avait déclaré Dara Khosrowshahi.
C’est au vu de cette croissance exceptionnelle que les nouveaux propriétaires de la centrale prévoient de quadrupler la puissance utilisée pour traiter les transactions en bitcoins d'ici la fin de l'année prochaine. Il y a dix ans, le propriétaire en faillite de la centrale électrique de Greenidge, à Dresden, dans l'État de New York, a vendu à la casse cette relique non compétitive alimentée au charbon et a renoncé à son permis d'exploitation. Pendant les sept années qui ont suivi, la centrale est restée inactive sur la rive ouest du lac Seneca, un monument à l'impasse apparente dans laquelle se trouve l'infrastructure des combustibles fossiles de l'État.
Mais aujourd'hui, Greenidge veut être de nouveau opérationnel en tant qu'exploitation minière de bitcoins. L'installation bourdonne d'ordinateurs énergivores qui confirment et enregistrent les transactions en bitcoins, puisant de l'énergie dans le générateur de 106 mégawatts de la centrale, désormais alimenté au gaz naturel. En effet, le minage de la cryptomonnaie exige des utilisateurs qu'ils "travaillent" pour obtenir des récompenses. Ce qui se traduit par des calculs cryptographiques qui doivent être effectués afin de confirmer une transaction sur le réseau.
Ces calculs cryptographiques nécessitent une grande puissance de calcul pour être résolus efficacement. Et il y a des centaines de milliers de mineurs qui sont tous en concurrence, seuls ou en groupe, pour résoudre un bloc de transaction. Une fois qu'un mineur particulier a résolu le bon problème et donc le bloc de transaction, tous les autres mineurs (nœuds) en sont également informés. Cela leur permet non seulement de passer au bloc suivant, mais aussi de s'assurer qu'il n'y a pas de problème de double dépense dans le réseau.
Les défenseurs de l'environnement considèrent les ambitions comme celles de Greenidge, comme un cauchemar en matière d'émissions atmosphériques. Et ils craignent que des dizaines d'autres centrales électriques à combustible fossile, qui ont été mises hors service ou qui sont en voie de l'être, ne suivent l'exemple de Greenidge et ne retrouvent une nouvelle vie en devenant des mineurs de bitcoins ou d'autres types de centres de données à forte consommation d'énergie.
Une analyse publiée par le chercheur néerlandais Alex de Vries, fondateur de Digiconomist, quantifie la manière dont la flambée du prix du bitcoin entraîne une augmentation de la consommation d'énergie. Il indique que la consommation d'énergie du bitcoin pourrait être proche de la consommation collective de tous les centres de données du monde réunis, et pourrait avoir des implications importantes pour l'environnement et la politique mondiale. Le minage des cryptomonnaies exacerbe la pénurie mondiale de puces et menace même la sécurité internationale. C'est la conclusion du commentaire d’Alex de Vries dans son article intitulé "Bitcoin Boom : What Rising Prices Mean for the Network's Energy Consumption" qui a été publié dans la revue Joule.
En debut d'année, le constructeur Asus a prévenu : « les cartes graphiques sont sur le point de devenir beaucoup plus chères » et l'une des causes serait la forte demande observée dans le secteur de la cryptomonnaie. Avant 2009, la cryptomonnaie n'existait presque pas. Au fur et à mesure que la technologie progressait, pour répondre à sa demande croissante, l'extraction de cryptomonnaie est devenue une réalité pour beaucoup sur leur ordinateur personnel. Au fil des ans, le processus d'extraction et son efficacité se sont améliorés grâce à l'utilisation d'un meilleur matériel. Les unités de traitement graphique (GPU) sont utilisées dans le processus d'extraction depuis des années, simplement parce qu'elles sont plus efficaces.
Dans le groupe Facebook d’Asus DIY PC, le responsable du marketing technique d’Asus, Juan Jose Guerrero III, a averti en début d'année que les prix des composants de la société augmenteraient au cours de la nouvelle année. « Nous avons une annonce concernant les changements de prix MSRP (Manufacturer's Suggested Retail Price ou prix de détail suggéré par le fabricant) pour notre série de cartes graphiques et de cartes mères », ceci entrera en vigueur en début d’année 2021, tout en prévenant que d’autres modèles pourraient également faire l’objet d’augmentations de prix.
« Notre nouveau MSRP reflète l'augmentation du coût des composants, les frais de fonctionnement, les activités logistiques et le maintien des tarifs d'importation. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec nos partenaires d'approvisionnement et de logistique pour minimiser les augmentations de prix. Nous apprécions grandement votre collaboration et votre soutien sans cesse renouvelés à la compagnie durant cette période de changement sans précédent du marché ».
Les demandes en cours de Greenidge pour le renouvellement de ses permis d'émissions atmosphériques promettent d'amener la question de la consommation d'énergie au cœur du débat. « Greenidge est un test pour l'administration Cuomo quant à son sérieux ou non dans la réalisation des objectifs de réduction des gaz à effet de serre », a déclaré Judith Enck, ancienne administratrice régionale de l'Agence américaine de protection de l'environnement. Enck estime que la position de l'État sur ces permis reflétera l'engagement de l'administration du gouverneur Andrew Cuomo à l'égard de la loi sur le leadership climatique et la protection des communautés, une loi historique de 2019 exigeant que l'État réduise considérablement la pollution atmosphérique.
Dans une lettre envoyée au gouverneur Cuomo la semaine dernière, le groupe de droit environnemental EarthJustice et la section atlantique du Sierra Club ont averti que près de 30 autres centrales électriques du nord de l'État de New York pourraient être converties pour fonctionner à plein temps comme des centres de données, avec des conséquences catastrophiques pour le climat.
Michael McKeon, un porte-parole de Greenidge, a rejeté ces préoccupations. « Ce groupe a essayé de trouver n'importe quoi pour s'opposer à notre exploitation respectueuse de l'environnement pendant des années ; rien n'a fonctionné parce que leurs affirmations n'ont aucune base juridique ou factuelle », a déclaré McKeon en référence aux précédents efforts infructueux du Sierra Club pour annuler les permis de Greenidge devant les tribunaux.
En mars de cette année, Greenidge a fusionné avec la société informatique Support.com pour devenir le premier mineur de bitcoins coté en bourse à générer sa propre électricité, bien que l'usine ait commencé à extraire environ 5,5 pièces par jour de manière indépendante à partir de mars 2020. Cela s'est produit après qu'Atlas Holdings ait exploré la possibilité d'héberger des serveurs et des mineurs de bitcoins sur place en 2019 et a reconnu que le mouvement était financièrement réalisable. Une fois que la fusion entre Greenidge Generation Holdings Inc. et Support.com sera achevée au troisième trimestre de cette année, Greenidge Generation pourra être cotée au Nasdaq.
Les inquiétudes ne sont pas infondées. Greenidge n'utilise actuellement que 19 mégawatts de capacité et prévoit d'atteindre sa pleine capacité d'ici à la fin de 2022, ce qui produirait environ 1 million de tonnes de dioxyde de carbone par an, soit 65 % de plus que l'autorisation actuelle de l'usine. Selon Coindesk, la centrale prévoit d'atteindre une capacité de 500 mégawatts d'ici 2025, soit une multiplication par près de 25 de sa consommation actuelle.
Cependant, Greenidge a obtenu de bons résultats jusqu'à présent et n'a aucune raison de s'arrêter : l'usine aurait extrait 1 186 bitcoins depuis un an qu'elle fonctionne, au prix de 2 869 dollars chacun. En supposant que Greenidge les ait tous vendus aux niveaux actuels du boom, cela représente une marge bénéficiaire d'un peu moins de 70 millions de dollars. Un tel rendement serait attrayant pour toute centrale électrique anciennement en faillite qui cherche à rouvrir.
Même la Chine, qui représente 65 à 80 % de l'énergie minière mondiale en raison de ses faibles coûts d'électricité, commence à sévir contre l'extraction de cryptomonnaies pour atteindre ses objectifs en matière de pollution atmosphérique. L'Inde également voudrait interdire les cryptomonnaies et pénaliser les mineurs et les négociants, un haut responsable du gouvernement de l’Inde a déclaré que le pays prévoit de proposer une loi qui en plus d’interdire les cryptomonnaies, imposerait des amendes à toute personne effectuant des transactions dans le pays ou détenant de tels actifs numériques.
Le projet de loi qui est en passe d’être l'une des lois les plus strictes au monde à l'encontre de l’économie qui sous-tend l’écosystème des cryptomonnaies, criminaliserait la possession, l'émission, le minage, le commerce et le transfert des cryptoactifs. Pendant ce temps, alors que Greenidge cherche à ajouter quatre nouveaux serveurs pour aider à augmenter la production de bitcoins, le Département de la conservation de l'environnement de l'État aurait reporté les décisions de planification.
Si l'expansion est autorisée, ce chiffre pourrait augmenter de façon spectaculaire. « Il est clair que, dans le cadre du minage de cryptomonnaie, la centrale à combustible fossile de Greenidge fonctionnera à un facteur de capacité nettement plus élevé, ce qui entraînera une augmentation marquée des émissions de gaz à effet de serre », a écrit Irene Weiser, coordinatrice de Fossil Free Tompkins, à la PSC en juin dernier.
Weiser a averti que Greenidge pourrait être la première d'une série de nouvelles menaces d'émissions atmosphériques, étant donné que « de multiples projets de centres de données sont proposés sur d'anciens sites de centrales électriques dans le nord de l'État de New York, chacun avec des projections de charge importantes ».
Source : NEW YORK FOCUS
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Le , par Bruno
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