Le gouvernement américain et le géant chinois de télécommunication Huawei ne sont pas en bon terme depuis quelques années déjà. Pendant longtemps, les responsables américains ont déclaré que Pékin pouvait utiliser l'équipement de télécommunication de Huawei pour espionner et perturber les réseaux de communication. L'entreprise a nié ces allégations, mais des manœuvres menées par Washington pour saper l'entreprise, que les responsables américains considèrent comme une menace pour la sécurité nationale, ne se sont pas arrêtées depuis lors.
Cependant, Huawei ne se contente plus de nier les accusations américaines portées contre lui. L’entreprise a décidé de se défendre désormais dans le conflit qui bat son plein entre elle et le gouvernement américain. Le géant chinois de l'électronique s'apprêterait à poursuivre le gouvernement des États-Unis pour avoir interdit aux agences fédérales d'utiliser les produits de l'entreprise, selon deux personnes au courant de l’affaire qui se sont confiées au New York Times.
Selon le New York Times, le procès prévu pour être annoncé au cours de cette semaine par la société sera intenté dans le district est du Texas, où se trouve le siège social américain de Huawei. Cette poursuite fait partie des efforts conduits par le géant chinois qui s’est lancé dans des campagnes marketing afin de redorer le blason de l’entreprise auprès des consommateurs contre une vaste campagne de dénigrement des Etats-Unis.
En effet, au cours de l’année écoulée, le gouvernement américain a intensifié ses pressions sur l'entreprise. Le Congrès a accusé Huawei d’être lié au pouvoir chinois et d’utiliser ses smartphones à des fins d’espionnage. Le gouvernement avait fait pression sur l’opérateur AT&T pour annuler un contrat avec la firme asiatique. L'année dernière la National Defense Authorization Act (NDAA) – une loi d'autorisation de dépenses de la défense des États-Unis – avait, par ailleurs, été autorisée afin d’isoler davantage Huawei du marché américain. Des responsables américains ont même exhorté d'autres gouvernements à interdire l'utilisation des produits de Huawei, même si certains Etats comme l'Allemagne et la Grande-Bretagne ont refusé de céder aux pressions américaines pour bannir Huawei, en citant l'absence d'élément de preuves de l'espionnage dont Huawei est accusé.
Cette année, le ministère de la Justice a déposé des accusations criminelles contre l'entreprise et son directeur financier pour n’avoir pas respecté les sanctions américaines contre l'Iran. Cette semaine aura lieu au Canada l’audience qui déterminera si le directeur financier de Huawei et fille du fondateur de l'entreprise, Meng Wanzhou, sera extradé vers les États-Unis pour faire répondre à ces accusations.
Dans une interview accordée à BBC en février, Ren Zhengfei, fondateur de Huawei, s’est insurgé contre le gouvernement américain. M. Zhengfei s’est opposé aux accusations américaines contre le directeur financier et a qualifié l'arrestation de Meng Wanzhou d’être politiquement motivée. Les avocats de Mme Meng ont poursuivi le gouvernement canadien et la police, soutenant que les circonstances de son arrestation et de sa détention en décembre avaient violé ses droits.
Lors de l’interview, M. Zhengfei a marqué une confiance absolue en son entreprise qui s'apprête à jouer un rôle majeur dans la construction de réseaux sans fil de nouvelle génération à travers le monde. « Il n'y a aucun moyen pour que les Etats-Unis puissent nous écraser », a-t-il dit. « Le monde ne peut pas nous quitter parce que nous sommes plus avancés. Même s'ils persuadent d'autres pays de ne pas nous utiliser temporairement, on peut toujours réduire un peu les choses. », a-t-il ajouté. En effet, certains partenaires comme l'Australie et la Nouvelle-Zélande se sont déjà joints aux États-Unis pour interdire ou empêcher Huawei de fournir de l'équipement pour leurs futurs réseaux mobiles à large bande 5G.
Huawei n’a pas répondu à une demande de commentaire, mais une poursuite intentée par Huawei contre les États-Unis devrait être pour contester une section d'une loi d'autorisation de dépenses de la défense qui a été approuvée l'an dernier, d’après le New York Times. Cette disposition empêche les agences gouvernementales d'utiliser les équipements de télécommunications fabriqués par Huawei et ZTE, une autre société chinoise. L’entreprise serait en train de prévoir de soutenir que l'interdiction américaine sur son équipement est un acte législatif nommé « bill of attainder », qui vise à le punir sans procès. La Constitution des Etats-Unis interdit au Congrès d'adopter de telles lois.
Une précédente poursuite du gouvernement américain pour les mêmes motifs
L'affaire Huawei semble avoir eu un précédent. La société russe de cybersécurité Kaspersky Lab, une autre entreprise qui a suscité des inquiétudes en matière de sécurité aux États-Unis avait intenté deux poursuites contre le gouvernement américain après l’interdiction de ses produits. En effet, les responsables américains ont commencé à s'inquiéter du fait que Moscou pourrait utiliser le logiciel de l'entreprise pour recueillir des renseignements. En juin 2017, les sénateurs américains ont demandé d'interdire les produits de l’éditeur russe, utilisés par les militaires, en raison de la crainte que l'entreprise soit vulnérable à l'influence du gouvernement russe, le lendemain du jour où le FBI avait interrogé plusieurs de ses employés américains dans le cadre d'un sondage dans ses opérations.
Kaspersky Lab avait rejeté les allégations, mais en septembre 2017, le Département de la sécurité intérieure a demandé aux organismes fédéraux de commencer à retirer les produits de l'entreprise des systèmes gouvernementaux. Et pour faciliter l’opération de retrait, le Congrès a codifié l'interdiction dans une loi d’autorisation de dépenses. Un juge du District de Columbia a ensuite rejeté les poursuites de Kaspersky Lab, jugeant que le Congrès était motivé par le désir légitime de protéger les réseaux informatiques du gouvernement contre l'intrusion russe. Le juge a également déclaré que les ventes de Kaspersky au gouvernement américain ne représentaient qu'une si petite fraction des affaires de la société que l'interdiction n'était pas particulièrement sévère.
La décision de rejet des poursuites de Kaspersky a été confirmée plus tard par une cour d'appel. Et le juge d'appel, David S. Tatel, a écrit que « Compte tenu de la probabilité non négligeable que les produits de Kaspersky aient pu compromettre les systèmes fédéraux et de l'ampleur des dommages qu'une telle intrusion aurait pu causer, la décision du Congrès de retirer Kaspersky des réseaux fédéraux représente une réponse raisonnable et équilibrée ».
Selon le News York Times, l'affaire pénale contre le directeur financier de Huawei aux États-Unis pourrait être compliquée vu les commentaires du président Trump alors que la Maison-Blanche a entamé des négociations commerciales avec la Chine. En effet, bien que les affaires criminelles aient traditionnellement été des affaires indépendantes, M. Trump aurait indiqué que le sort de Huawei pourrait être un objet de marchandage.
« Nous prendrons cette décision », c’est ainsi qu’aurait répondu le président Trump, lors d’une réunion avec une délégation de responsables chinois le mois dernier, lorsqu'on lui a demandé s'il abandonnerait les accusations criminelles contre Huawei dans le cadre de l’accord commercial qui se prépare entre les Etats-Unis et la Chine. « Nous allons parler au procureur général. », a-t-il ajouté.
Source : The New York Times
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Pour avoir interdit aux agences fédérales d'utiliser ses produits
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Le , par Stan Adkens
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