Par la voix de Ciaran Martin, directeur du National Cyber Security Centre (NCSC), la Grande-Bretagne affirme qu’aucun élément de preuve susceptible de confirmer une quelconque activité malveillante de la part de l’entreprise technologique Huawei n’existe et qu’elle est en mesure de gérer les risques de sécurité liés à l’utilisation des équipements de télécommunications fournis par ladite entreprise.
Signalons au passage que le NCSC fait partie de l’agence de renseignement britannique du GCHQ et que Huawei est considéré à l’heure actuelle comme le plus grand fabricant mondial d’équipements de télécommunications. Mais le géant chinois traverserait une période trouble en Grande-Bretagne depuis qu’un rapport du gouvernement de juillet 2018 a constaté que des problèmes techniques affectant la chaîne d’approvisionnement de ses équipements avaient exposé les réseaux de télécoms nationaux à de nouveaux risques de sécurité.
Lors d’une conférence sur la cybersécurité qui s’est récemment tenue à Bruxelles, Ciaran a assuré que la Grande-Bretagne n’avait pas encore décidé de sa politique de sécurité pour les réseaux nationaux 5G, mais que les équipements Huawei étaient soumis à une surveillance détaillée et à des contrôles gouvernementaux stricts sur leur utilisation. « Notre régime est sans doute le régime de surveillance le plus dur et le plus rigoureux au monde pour Huawei », a-t-il confié.
Lorsque, plus tard, on lui a demandé si l’administration Trump avait présenté à son pays des preuves attestant ces allégations, Martin a répondu aux journalistes : « Je serais obligé de signaler s’il y avait des preuves de malveillance... par Huawei. Et nous n’avons pas encore à le faire. Alors j’espère que c’est tout ». Il a par ailleurs ajouté que son organisation a publié un document détaillé dans lequel il expose la façon dont la Grande-Bretagne gère les risques de cyberespionnage lié à cette affaire.
Commentant le rapport de juillet 2018 précédemment évoqué Martin a tenu à clarifier les choses en disant : « Comme nous l’avons dit à l’époque, et comme nous le répétons aujourd’hui, ces problèmes concernent les normes relatives à la cybersécurité, ce ne sont pas des indicateurs d’activités hostiles de la Chine ». De plus, il faut savoir que Huawei a accepté les conclusions du rapport et a prévu une enveloppe de 2 milliards USD sur cinq ans pour la cybersécurité pour s’attaquer à ces problèmes afin de rassurer ses clients occidentaux. D’après Martin, la Grande-Bretagne surveille le géant chinois et ne fera aucun compromis vis-à-vis des améliorations qu’elle attend de lui : « nous ne déclarerons pas que les problèmes sont en voie d’être résolus tant qu’il n’y aura pas de preuve claire que c’est le cas », a-t-il précisé.
Ces déclarations interviennent dans un contexte de tension entre la Chine et les États-Unis marqué par des allégations d’espionnage proférées à l’encontre de Pékin et de certaines multinationales chinoises par l’administration Trump qui demande à ses alliés de ne pas utiliser les technologies (notamment pour le déploiement de la 5G) et les produits du groupe. Huawei fait l’objet d’un examen minutieux en Occident au sujet de ses connexions supposées avec le gouvernement chinois et des allégations d’espionnage d’État formulées par les États-Unis.
Vraisemblablement surpris par cette prise de position, Washington a réagi par la voix du Sénateur démocrate Mark Warner en rappelant que « les États-Unis et leurs alliés doivent maintenir un front commun contre le risque de chaîne d’approvisionnement d’équipements provenant de pays qui ne respectent pas la primauté du droit et qui imposent régulièrement des exigences de surveillance extrajudiciaire aux entreprises nationales ». Warner a également précisé vouloir mieux « cerner dans leur intégralité les raisons qui ont motivé la décision britannique ».
À titre de rappel, aucun élément de preuve n’a été produit publiquement par Washington et Huawei a nié à plusieurs reprises ces allégations. Malgré tout, celles-ci ont conduit plusieurs pays occidentaux à restreindre l’accès de cette entreprise à leurs marchés. Vodafone, second opérateur de téléphonie mobile au monde, a déclaré en janvier dernier qu’il arrêtait le déploiement des équipements Huawei dans les réseaux centraux jusqu’à ce que les gouvernements occidentaux accordent une autorisation de sécurité complète. D’autres opérateurs en Europe, dont BT en Grande-Bretagne et Orange en France, ont déjà retiré les équipements de la marque Huawei ou pris des mesures pour limiter son utilisation future.
La Grande-Bretagne semble représenter un champ de bataille hautement stratégique pour le géant Huawei dans son bras de fer contre les États-Unis en Europe. Toute décision de Londres d’autoriser la société chinoise à participer à la construction de réseaux 5G de nouvelle génération serait surveillée de près par d’autres pays en raison de l’appartenance de la Grande-Bretagne à l’organisation des Five Eyes dont les États-Unis sont membres et d’une certaine aussi à l’UE.
Source : Reuters
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Le , par Christian Olivier
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