Une analyse des données sur la masse salariale chez Oracle, une multinationale américaine basée à Redwood Shores et spécialisée dans les technologies informatiques, aurait révélé des disparités avec un « ;degré extrêmement élevé de signification statistique ;». Il semblerait en effet que des milliers de femmes ont été systématiquement sous-payées au sein de cette société. Cette découverte a conduit au dépôt d’une requête motivée par des allégations de discrimination salariale généralisée devant la justice californienne incriminant Oracle.
« ;Je ne pouvais tout simplement pas y croire. J’étais en colère ;», a déclaré au Guardian Marilyn Clark, l’une des plaignantes aujourd’hui à la retraite dans ce dossier. Cette dernière aurait découvert l’écart salarial, lorsqu’elle avait vu un talon de chèque qu’un collègue avait laissé dans un espace commun. « ;Je me sentais comme si j’avais été frappé dans le ventre ;», a-t-elle lâché, précisant que c’était particulièrement douloureux, car elle avait elle-même assuré la formation de l’employé qui gagnait environ 20 ;000 USD par an de plus qu’elle.
Les avocats représentant l’ensemble des victimes présumées (plus de 4200 femmes) allèguent que les employées recevaient en moyenne 13 ;000 USD par an de moins que les hommes effectuant un travail similaire. L’analyse des données sur la masse salariale chez Oracle aurait révélé que le salaire de base des femmes était en moyenne inférieur de 3,8 % à celui de leurs homologues masculins dans les mêmes catégories d’emplois, idem au niveau des primes (- 13,2 %) et des valeurs des actions (- 33,1 %). La plupart des employées concernées ont travaillé dans la technologie de l’information, les fonctions de soutien et le développement de produits depuis 2013.
À ce propos, Jim Finberg, avocat des plaignantes, déplore le fait que les femmes restent moins bien payées, alors que, comme précisé dans la plainte, ces écarts de rémunération ne sont justifiés par aucune « ;raison valable liée à l’emploi ;». Les avocats des demandeurs ont par ailleurs noté que ces disparités existent même entre les femmes et les hommes ayant la même expérience et les mêmes notes de performance dans les mêmes catégories d’emplois. D’après Finberg, il pourrait s’agir des statistiques les plus solides qu’il lui ait été donné de voir, « ;des chiffres incroyablement puissants ;», selon ses propres termes. « ;Ce qui explique la disparité, c’est d’être une femme. Ce n’est pas correct et ce n’est pas légal, et le moment est venu pour Oracle de changer ;», a déclaré Finberg, qui a déjà engagé une action en justice similaire contre Google.
Cette nouvelle action en justice à l’encontre de l’une des plus grandes entreprises de la Silicon Valley pour atteinte aux droits civils intervient dans un contexte marqué par une recrudescence des litiges en rapport avec les différentes formes de discrimination (raciale, inconduite sexuelle, iniquité salariale…) au travail et une surveillance accrue des industries technologiques afin de dénoncer ces pratiques. Cette nouvelle affaire basée sur des allégations répétées de discrimination salariale systématique est similaire à un précédent scandale qui a frappé Google l’année dernière.
Il ne s'agit pas d'un cas isolé
Comme Google, ce n’est pas la première fois qu’Oracle fait face à des accusations de discrimination salariale. Ces deux entreprises avaient déjà été poursuivies par le Département américain du Travail (DoL), qui est chargé de faire respecter les lois en matière d’égalité de rémunération des entreprises ayant passé des contrats avec le gouvernement fédéral, pour les mêmes motifs. Le DoL a engagé une action en justice contre Oracle en 2017, alléguant que la firme avait l’habitude de payer les hommes de race blanche davantage que leurs homologues de couleur, ce qui entraînait une discrimination salariale à l’égard des femmes et des employés noirs et asiatiques. À l’époque, Oracle avait affirmé que les allégations de la DoL étaient « ;sans fondement ;» et que ses décisions en matière de rémunération étaient « ;non discriminatoires et fondées sur des facteurs commerciaux légitimes, y compris l’expérience et le mérite ;».
L’une des raisons pouvant expliquer ces disparités est liée au fait qu’Oracle s’est basé sur les salaires antérieurs de ces nouveaux employés afin de déterminer leur rémunération au sein de la société, ce qui a perpétué les inégalités de rémunération, indiquait la plainte, alors que la Californie interdit aux employeurs de poser des questions aux candidats sur les salaires antérieurs dans le but de réduire la discrimination salariale.
Dans la plainte actuelle, outre le laisser-aller observé dans sa politique en matière d’équité salariale, il est également reproché à Oracle de n’avoir rien entrepris (aucun audit interne complet et régulier, par exemple) afin de résoudre ce problème, alors que le gouvernement américain avait déjà fait état de l’existence de certains problèmes spécifiques au sein de groupe.
La plainte en recours collectif nomme six plaignantes. Certaines avaient fait le choix de se taire, mais ont décidé par la suite de faire bouger les choses en se rendant compte qu’il s’agissait d’un problème répandu : « ;Je le fais pour ma fille. Je ne veux pas qu’elle soit discriminée à l’avenir ;» et « ;j’aimerais que les femmes avec qui j’ai travaillé puissent obtenir une sorte de compensation pour ce que nous avons manqué ;», a confié Clark qui espère que ce cas inspirerait des réformes chez Oracle et dans d’autres sociétés.
Source : The Guardian
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Le , par Christian Olivier
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