Le 22 décembre, la loi contre la manipulation de l'information en période électorale, dite loi « Fake news », a été publiée au Journal officiel. Après plusieurs mois de désaccord entre les deux chambres du Parlement, le Conseil constitutionnel a été saisi dans un ultime recours des opposants. Mais les Sages, s'ils ont émis quelques réserves visant à encadrer les dispositions les plus controversées, ont quand même validé les lois relatives à la lutte contre la manipulation de l'information en période électorale.
Pour information, ces lois - l'une ordinaire et l'autre organique - visent à permettre à un candidat ou parti de saisir le juge des référés pour faire cesser la diffusion de « fausses informations » sous 48h durant les trois mois précédant un scrutin national. Elles touchent également à l'organisation des pouvoirs publics et donnent un pouvoir accru au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). En vertu de ces lois, le gendarme de l'audiovisuel pourra par exemple se permettre de suspendre la diffusion d'une chaîne étrangère en période électorale ou résilier sa convention, sous certaines conditions. En plus du pouvoir accru du CSA, les lois contre les fake news imposent aux plateformes numériques des obligations de transparence lorsqu'elles diffusent des contenus sponsorisés. Ces obligations incluent le fait de décliner l'identité des annonceurs et le montant de la contrepartie financière. Mais quelles sont les plateformes sujettes à ces obligations de transparence ? C'est ce qui a été précisé dans un récent décret dont a été notifiée la Commission européenne le 7 janvier.
Le décret, pris par le Premier ministre, a en effet pour objet la « définition d'obligations visant à garantir une information éclairée des citoyens en période électorale et la sincérité du scrutin subséquent. » Il détermine pour l’application de la loi fake news, le nombre de connexions sur le territoire français qui déclenche les obligations de transparence d’un opérateur de plateforme en ligne. Il fixe également les modalités de présentation des informations à porter à la connaissance des utilisateurs, mais aussi le seuil de rémunération à partir duquel s’impose l’obligation de préciser les rémunérations perçues en contrepartie de la promotion de contenus d’information.
Selon le décret, la loi fake news cible tout opérateur de plateforme en ligne qui assure la promotion de contenus d’information « se rattachant à un débat d’intérêt général », dès lors que l'activité de la plateforme dépasse le seuil de cinq millions de visiteurs uniques par mois sur le territoire français. Il est également précisé que ce seuil est calculé sur la base de la dernière année civile. Le montant de rémunération à partir duquel ces opérateurs sont soumis aux obligations de transparence est quant à lui fixé à 100 euros hors taxe, pour chaque contenu d’information se rattachant à un débat d’intérêt général.
Les informations à porter à la connaissance des utilisateurs (identité de l'annonceur et montant de la contrepartie financière, entre autres) doivent être précisées à proximité de chaque contenu d’information se rattachant à un débat d’intérêt général. Elles peuvent également, selon le décret du Premier ministre, être précisées dans une rubrique directement et aisément accessible à partir de chaque contenu d’information concerné. Dans ce cas, le registre d’informations doit être « directement et aisément accessible à partir de toutes les pages du site » qui comportent des contenus d’information se rattachant à un débat d’intérêt général ou qui donnent accès à de tels contenus.
Ledit décret entre en vigueur le 15 avril 2019. Rappelons encore que les dispositions relatives à la loi contre la manipulation de l'information en période électorale s’appliquent pendant les trois mois précédant le premier jour du mois d’élections générales et jusqu’à la date du tour de scrutin. Rappelons aussi que toute infraction à ces dispositions est passible d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 75 000 euros.
Source : Notification disponible en téléchargement sur le site de la Commission européenne
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Le , par Michael Guilloux
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