Pour rappel, ces deux propositions de loi, l'une ordinaire et l'autre organique, visent à permettre à un candidat ou parti de saisir le juge des référés pour faire cesser la diffusion de « fausses informations » sous 48h durant les trois mois précédant un scrutin national. Elles touchent également à l'organisation des pouvoirs publics et donnent un pouvoir accru au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). En vertu de cette loi, le gendarme de l'audiovisuel pourra par exemple se permettre de suspendre la diffusion d'une chaîne étrangère en période électorale ou résilier sa convention, sous certaines conditions. En plus du pouvoir accru du CSA, les deux propositions de loi imposent aux plateformes numériques (Facebook, Twitter, etc) des obligations de transparence lorsqu'elles diffusent des contenus sponsorisés. Ces obligations incluent le fait de décliner l'identité des annonceurs et le montant de la contrepartie financière.
« Tous les garde-fous ont été instaurés » et ce projet « ne restreint en rien la liberté d'expression, a assuré la ministre de la culture Françoise Nyssen. L'intervention du juge « sera encadrée. Pour qu'elle soit justifiée, l'information devra être manifestement fausse et diffusée de manière délibérée, massive et artificielle », visant « les nouvelles viralités de l'information » sur Internet et les réseaux sociaux.
« Avoir une information fiable, de qualité, une information de confiance, c’est la garantie d’être libre de se forger sa propre opinion » a assuré en hémicycle la ministre. Et de souligner que « Face la multiplication des tentatives de manipulation, il est urgent d'agir ».
Mais, « le premier rempart contre la désinformation et la manipulation de l'information restent les médias et les journalistes », a souligné la ministre en annonçant le lancement d'une mission en vue de la création d'un « conseil de déontologie de la presse », confiée à l'ex-PDG de l'AFP Emmanuel Hoog.
Les députés de gauche, l'UDI-Agi et Les Républicains ont dénoncé un texte inutile, « les fausses informations étant déjà réprimées par la loi sur la presse de 1881 ». Ils ont également pointé une définition non-aboutie d'une fausse information, la difficulté pour un juge de trancher dans l'urgence sur des situations complexes et dénoncé le pouvoir de censure exorbitant accordé au CSA.
Comment la proposition de loi définit-elle une une fausse information ?
Ce sont des allégations ou des imputations inexactes ou trompeuses. Pour être sanctionné, il faudra que les faits déformés soient « de nature à altérer la sincérité du scrutin à venir » et qu’ils soient « diffusés de manière délibérée, artificielle ou automatisée et massive par le biais d’un service de communication au public en ligne », et donc sur un site Internet.
Il y a donc quelques conditions qui doivent être remplies :
- une altération de la réalité,
- de nature à fausser un scrutin d’ampleur (législative, européennes, présidentielle),
- diffusé sur un site accessible à tous,
- en période électorale.
Une fois que ces conditions sont vérifiées, un juge sera alors en mesure d’ordonner en référé à un hébergeur comme Facebook de prendre « toutes mesures proportionnées et nécessaires pour faire cesser cette diffusion ». Cela pourra être une fermeture de compte, une suppression de messages ou n’importe quelles mesures plus ambitieuses selon l’ampleur. Il aura 48 heures pour se prononcer.
« Nous doutons que la procédure de référé soit suffisante pour qualifier l'infraction. Cela fait peser sur le juge un enjeu assez lourd avec des risques de pression et d'instrumentalisation », a fait valoir Constance Le Grip (LR).
« Les bonnes intentions ne font pas forcement des bonnes lois », a abondé Marietta Karamanli (PS) pour qui la meilleure des solutions reste la mobilisation de la presse indépendante.
Comme le rappelle Reuters, c’est à l’Assemblée nationale que revient le dernier mot sur ces textes, à propos desquels les deux chambres n’ont pas trouvé d’accord le mois dernier en commission mixte paritaire après un rejet du Sénat en première lecture. Le texte sera prêt pour être diffusé au Journal officiel, sauf si le Conseil constitutionnel est saisi pour contrôler sa conformité.
Source : Reuters, Assemblée nationale
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