C’est fait. Le géant chinois de l’électronique Huawei a déposé sa plainte contre le gouvernement américain ce mercredi. L'intention de la société d'intenter une action en justice a été annoncée pour la première fois lundi par le New York Times. Le procès de Huawei contre le gouvernement des Etats-Unis allègue que la société avait été injustement et incorrectement interdite comme une menace pour la sécurité. C’est lors d’une conférence de presse, tenue mercredi dernier, que Huawei a annoncé que l’interdiction d’utilisation de ses produits imposée par les agences fédérales américaines violait toutes procédures légales.
En effet, les États-Unis ont fait valoir que Huawei représente un risque parce que ses équipements pourraient être utilisés par les autorités chinoises pour espionner les communications et perturber les réseaux de télécommunications. Cette position a conduit les principales entreprises de télécommunications sans fil aux États-Unis et les agences gouvernementales à éviter les produits de Huawei et de traiter avec les entreprises qui utilisent ces mêmes produits.
Huawei s’est défendu contre ces allégations en rejetant toutes ces accusations. La société affirme maintenant que la poursuite vise également à prouver qu'elle ne se livre pas à de telles pratiques. Lors de la conférence de presse du mercredi dernier, Guo Ping, président tournant de Huawei, a notamment déclaré ceci : « Pendant trois décennies, nous avons maintenu un solide bilan en matière de sécurité. Huawei n’a jamais installé de puces espionnes dans ses équipements technologiques. Le gouvernement américain a qualifié nos services de menace pour son pays.
Cependant, les États-Unis n’ont jamais fourni de preuves à l’appui de leurs accusations selon lesquelles Huawei représenterait une réelle menace pour la sécurité du pays. Le gouvernement américain tente par tous les moyens de salir notre image. Pire encore, il essaie de bloquer notre développement dans d’autres pays.
Selon le New York Times, la poursuite de Huawei obligera le gouvernement américain à rendre publiques ses accusations contre l'entreprise, mais elle pourrait aussi rendre Huawei vulnérable à un examen plus approfondi de ses pratiques commerciales et de ses relations avec le gouvernement chinois.
Dans un communiqué annonçant le dépôt de la poursuite judiciaire, Guo Ping a déclaré que « Le Congrès américain n'a, à maintes reprises, produit aucune preuve à l'appui de ses restrictions sur les produits Huawei ». « Nous sommes obligés de prendre cette action en justice en dernier recours. », a-t-il ajouté. Le procès de Huawei, intenté devant une cour de district des États-Unis à Plano, au Texas, où l’entreprise a son siège social américain, soutient qu'une section de la National Defense Authorization Act de 2019, une loi d'autorisation de dépenses de la défense, est inconstitutionnelle, car elle vise Huawei. En effet, la loi fait interdiction aux organismes gouvernementaux de passer des marchés avec Huawei ou des entreprises qui utilisent l'équipement de l'entreprise.
Depuis un certain temps, le fabricant chinois d’équipements de télécommunications a décidé de se défendre contre la pression qu’exercent les autorités américaines sur lui, et ce procès s’inscrit dans le cadre d'une offensive juridique et de relations publiques très agressive que Huawei a récemment lancée pour repousser les accusations d'espionnage des Etats-Unis. Le débat sur la sécurité des systèmes de Huawei arrive à un moment critique, les pays du monde entier se préparant à dépenser des centaines de milliards de dollars pour étendre les réseaux cellulaires à la technologie 5G de prochaine génération, et le géant chinois a un rôle déterminant à jouer dans cette transition technologique.
Après avoir écarté Huawei du marché américain, des responsables américains ont même exhorté d'autres gouvernements à interdire l'utilisation des produits de Huawei, même si certains Etats comme l'Allemagne et la Grande-Bretagne ont refusé de céder aux pressions américaines pour bannir Huawei, en citant l'absence d'élément de preuves de l'espionnage dont Huawei est accusé.
Cette année, le ministère de la Justice a déposé des accusations criminelles contre l'entreprise et son directeur financier pour n’avoir pas respecté les sanctions américaines contre l'Iran, bien que cela n’ait rien à avoir avec l’affaire d’interdiction des produits Huawei. Mme Meng, directeur financier et fille de Ren Zhengfei, le fondateur de l'entreprise, a comparu au cours de cette semaine à Vancouver, en Colombie-Britannique, dans le cadre d'une audience d'extradition. M. Ren Zhengfei était fermement opposé aux plaintes contre sa fille qu’il avait qualifiées de politiquement motivées.
Lors d'une conférence de presse diffusée sur un flux officiel de Huawei sur Twitter, M. Guo a déclaré que « Le gouvernement américain a longtemps qualifié Huawei de menace, il a piraté notre service et volé nos courriels et notre code source », se référant aux documents de l'Agence de sécurité nationale fournis par l'ancien entrepreneur Edward J. Snowden qui ont montré que l'agence s'était introduite dans les systèmes de Huawei, d’après Le New York Times.
« Pourtant, le gouvernement américain ne ménage aucun effort pour dénigrer l'entreprise et induire le public en erreur au sujet de Huawei », a-t-il ajouté. Selon le New York Time, la séance d'information diffusée en continu sur Twitter a touché plus de deux millions de personnes.
Cependant, la Chine qui est en guerre commerciale actuellement contre les Etats-Unis a un historique d'interruption du commerce avec d'autres pays lors des querelles diplomatiques dont la toute dernière a eu lieu cette semaine. Selon le New York Times, cette semaine, les représentants canadiens se sont plaints du fait que la Chine avait commencé à suspendre les importations de canola en provenance du Canada, pendant que les relations entre ces deux pays sont tendues ces derniers temps suite à l’arrestation de Mme Meng au Canada. Toutefois, Lu Kang, porte-parole du ministère des Affaires étrangères de la Chine, a déclaré jeudi que la décision chinoise était fondée sur la découverte de vermines dans le canola canadien.
La poursuite intentée par Huawei soutient qu'en ciblant l'entreprise, le Congrès a transgressé les principes constitutionnels sur la séparation des pouvoirs ainsi que la clause du projet de loi d'exécution, qui interdit une loi qui vise à punir une personne ou une entité sans procès.
« L'effet réel et voulu de ces interdictions est d'interdire à Huawei d'accéder à des segments importants du marché américain de l'équipement et des services de télécommunications, infligeant ainsi à Huawei des préjudices économiques, concurrentiels et de réputation immédiats et permanents », ont écrit les avocats de la société dans leur poursuite. Parlant d’une firme originaire de la Chine, un pays qui impose la censure aux entreprises étrangères, ces propos des avocats de Huawei sont un peu ironiques.
Le procès vise à mettre l'accent sur l’interdiction d'utilisation des l'équipement de Huawei dans les nouveaux réseaux 5G et à pousser le gouvernement des États-Unis à faire valoir ses arguments. Bien qu'il soit peu probable que Huawei puisse renverser l'opposition américaine à l'entreprise, elle peut espérer gagner la confiance des fonctionnaires d'autres pays, dont certains en Europe. Un procès similaire avait été intenté par Kaspersky Lab contre le gouvernement américain suite à l’interdiction de ses produits, il y a deux ans. Mais les poursuites avaient été rejetées par un juge américain, soulignant qu'elles découlaient d'un désir légitime de protéger les réseaux américains.
Source : The New York Times
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Le , par Stan Adkens
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