Les éléments manquants du puzzle dans l’affaire scandale de données personnelles impliquant Facebook se mettent progressivement en place à grande vitesse. L’heure n’est plus pour le géant des réseaux sociaux à défendre ses politiques théoriques de confidentialité en guise de réponse à la moindre question : « ;Facebook n’a jamais vendu les données de qui que ce soit ;». « ;Nos API ont toujours été gratuites et nous n’avons jamais demandé aux développeurs de payer pour les utiliser, que ce soit directement ou en achetant de la publicité ;». Maintenant il est grand temps de commencer à déplorer les grandes décisions qui ont fait de Facebook une plateforme incontournable sur Internet mais qui ont aussi rendu les réseaux sociaux et toutes les autres plateformes liées des endroits hostiles.
C’est le 24 novembre dernier que la gestion du scandale de données de Cambridge Analytica qui a affecté les informations personnelles de plus de 87 millions de personnes a pris une autre tournure. A cette date, le Parlement britannique qui a vu ses invitations à témoigner rejetées par Facebook par plus de 2 fois a profité d’un voyage d’affaire à Londres du patron de Six4Three, une startup américaine de développement de logiciel, pour saisir une impressionnante mémoire cache détenue par l’homme d’affaire. Lui-même l’ayant acquise légitimement dans une affaire qui opposait son entreprise au géant de la Silicon Valley suite à la fermeture de son application qui était basée sur les données Facebook.
Depuis lors, les documents de cette mémoire cache qui n’étaient pas censés être divulgués par les députés britannique ni par personne d’autre car « …soumis à une ordonnance de protection de la Cour supérieure de San Mateo limitant leur divulgation. » ne cessent de révéler la face cachée de la gestion des données clients par Facebook.
Nous savons maintenant que Facebook utiliserait les données personnelles des utilisateurs comme monnaie d'échange pour accorder des privilèges spéciaux à certaines sociétés tout en en excluant de nombreuses autres. Ce qui est en contradiction avec ses promesses de ne pas vendre de données personnelles de ses utilisateurs que la société ne cesse de répéter, et est aussi en violation d’un accord avec la Federal Trade Commission datant de 2011, qui stipulait que le réseau social ne pouvait pas donner aux développeurs tiers l'accès à des données utilisateur.
Nous savons également que Facebook aurait été informé de l'extraction de données par des « entités » russes en 2014, mais qu’il aurait ignoré la gravité de l’affaire et serait resté sans réaction. Les documents ont également révélé que le réseau social aurait envisagé de facturer l'accès aux données des utilisateurs et d’en fermer l’accès en cas de non-paiement. Nous savons bien d’autres choses sur l’affaire qui n’a pas encore fini de vider son sac.
Les courriers électroniques datant de 2012 du PDG de Facebook, Mark Zuckerberg, contenus dans les documents saisis par les députés britanniques enquêtant sur l’affaire Facebook, apportent de nouveaux éclaircissements sur les décisions prises par le géants des réseaux sociaux qui ont conduit à la violation massive des données clients tout en déterminant son niveau d’implication, selon les courriers publiés le mercredi et que Reuters a relayé le jeudi. Depuis la saisie de la mémoire cache, des réponses aux différentes questions des enquêteurs se dessinent chaque jour.
Les documents révèlent que Zuckerberg aurait douté de la proposition commerciale qui consistait à donner un large accès aux données clients à des millions de développeurs de logiciels tiers, mais a fini par adopté la pratique en 2012.
C’est en faveur de cette décision que les développeurs d’une application quiz ont pu collecter les données des 87 millions de personnes qui ont servi dans le cadre de l’activité de profilage électoral du cabinet Cambridge Analytica en faveur de la campagne présidentielle de Donald Trumps.
Choix d'accès payant aux données clients
Facebook était ouvert en ce moment-là aux applications tierces et cherchait à stimuler sa croissance en comptant sur les applications tierces telles que des jeux. Mais Zuckerberg voudrait bien comprendre si la présence de ces applications sur sa plateforme ainsi que les données qui seront envoyées à Facebook conduiraient à une augmentation suffisante de la fréquentation de la plateforme et des revenus.
« En théorie, nous voulons des informations, mais les messages que les développeurs nous donnent sont-ils vraiment utiles ? », Écrit Zuckerberg en réponse à un long courrier électronique envoyé par un lieutenant. « Ils ne semblent pas être pour le ciblage (contenu) et je doute qu'ils entraînent une augmentation significative de l'engagement. »
Une alternative à la première proposition consistait à charger les applications directement dans Facebook, avec l’inconvénient de limiter le nombre d’applications fonctionnant sur la plateforme. Facebook a opté finalement pour la proposition alternative en fin d’année 2012 qui marquait donc un accès payant aux données avec les applications tierces intégrées à la plateforme Facebook.
« Le but de la plateforme est de relier l'univers de toutes les applications sociales afin que nous puissions permettre davantage de partage tout en restant le pivot central », a-t-il déclaré dans un courrier électronique adressé à plusieurs dirigeants. « Cela trouve le bon équilibre entre l'ubiquité, la réciprocité et le profit. »
L’accès large aux données dont bénéficiaient les développeurs externes a été limité en 2014 lorsque Facebook a mis fin à la promotion gratuite.
Conséquences du choix de partage de données
Selon Reuters, les informations qui ont filtrées des courriers font état qu’un échange a eu lieu entre les cadres de Facebook sur les intérêts et non sur la vie privée des utilisateurs. Selon un courrier électronique, Facebook avait opté pour l’intégration des applications à sa plateforme et son PDG a proposé l’idée de facturer 10 centimes pour chaque demande de données d’utilisateur, ce qui pouvait faire environ 3 millions de dollars par an pour les applications telles que Spotify et Pinterest.
Facebook avait « maximisé les profits » dans l’arrangement, cependant, intégrer les applications à Facebook avait poussé les meilleurs jeux à abandonner les services de Facebook, a déclaré Sam Lessin, directeur de la gestion des produits. Lessin n’était « pas fier » de ceux qui restaient. Finalement, Facebook est revenu sur sa décision et a adopté, selon les emails, son objectif initial : inciter les gens à partager davantage d'éléments sur Facebook.
Selon les emails, Zuckerberg a écrit des mois plus tard, « Si Facebook permettait plus facilement à plus d'applications d'intégrer des fonctionnalités sociales, nous devrions être en mesure de débloquer plus de partage dans le monde et sur Facebook ».
Source : Reuters
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Le , par Stan Adkens
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