Le 18 octobre dernier, Bruno Le Maire a dénoncé les tergiversations de certains partenaires européens, sur l’instauration de cette taxe, notamment les plus petits pays tels que le Luxembourg et l'Irlande, prévenant que l’absence de décision pourrait être sanctionnée dans les urnes lors des européennes de mai 2019. Selon Le Maire, ses pays qui s'opposent aux propositions appliquent souvent des tarifs plus avantageux, ce qui fait que des entreprises de la taille de Google, Amazon, Facebook ou Apple installent précisément leur siège européen dans ces pays. Ils craignent donc de perdre certains avantage avec l'instauration de la taxe à l'échelle du bloc.
Toutefois, Paris, qui est l’origine de nombreuses initiatives dans le projet de taxation des GAFA, a déclaré ne pas être hostile à l’idée d’offrir une compensation financière à l’Irlande pour pallier les pertes de revenus fiscaux que pourrait entraîner l’instauration de cette taxe.
Un autre groupe de pays s'est aussi opposé à la taxe en début juin. Les ministres des Finances de ces trois pays nordiques de l’Union européenne à savoir la ministre suédoise des Finances Magdalena Andersson et ses collègues du Danemark et de la Finlande, Kristian Jensen et Petteri Orpo ont, dans un communiqué relayé le 1er juin dernier par Reuters, fait part de leur opposition au projet de taxation des géants du numérique, soutenant que ce dernier pourrait avoir un impact négatif et nuire à l'économie européenne. « Une taxe sur les services numériques s’écarterait des principes fondamentaux de l’impôt en ne s’appliquant qu’au chiffre d’affaires, sans prendre en compte le fait de savoir si le contribuable réalise un bénéfice ou non », avaient-ils déclaré.
Bruno Le Maire et Giovanni Tria à Bruxelles le 5 novembre
Cette fois-ci, Paris se tourne vers son partenaire principal et exige de lui son soutien en décembre à l’occasion de la prochaine réunion des ministres européens des Finances. « On ne peut pas imaginer une seconde que l’Allemagne ne tienne pas ses engagements et ne décide pas l’adoption de la directive en décembre, ça serait une rupture de confiance entre la France et l’Allemagne », a-t-il déclaré Le Maire.
En effet, ce projet est né d’une proposition franco-allemande avant de voir l’adhésion des autres partenaires européens. Mais, depuis un moment déjà, les hésitations et oppositions se multiplient au sein de l’union, y compris l’Allemagne qui s’est désolidarisé en début du mois de septembre, selon le journal allemand Bild, qui a pu consulter un document confidentiel. Le document du ministère des Finances mentionnait que la « diabolisation » des grandes entreprises numériques « n'est pas productive ». Le ministère allemand des Finances renoncerait donc à faire payer plus d’impôt aux géants de l’Internet, notamment les GAFA.
Le 21 octobre dernier, l'Allemagne a, néanmoins, annoncé son soutien à un taux d'imposition minimum mondial pour les poids lourd du numérique et a encouragé à la lutte commune contre l'évitement fiscal. Cependant, la semaine dernière, la France et l’Allemagne n’avaient toujours pas trouvé un terrain d’entente. Mais, Bruno Le Maire, fervent partisan d’une taxe européenne sur les GAFA, s’est montré optimiste en espérant avoir un accord avant la fin de l’année 2018. Aussi, il a exigé de Berlin le respect de son engagement à adopter la directive le 4 décembre prochain, selon Reuters.
Des mots enfin compris ?
Le ministre allemand des Finances, Olaf Scholz, a déclaré lundi au Spiegel que l’Allemagne soutenait le modèle français de taxe sur le numérique et que Berlin souhaitait la conclusion au niveau européen d’une décision contraignante lors de la prochaine réunion des ministres européens, le mois prochain, pour parer un éventuel échec des discussions au niveau de l’OCDE.
« Si la recherche d’un accord international (au niveau de l’OCDE) échoue, je pense que nous devrions aller de l’avant au niveau européen et introduire des taux d’imposition minimaux et une imposition effective des entreprises du numérique à partir de janvier 2021 », explique-t-il.
« Nous sommes foncièrement en accord avec la France sur cette approche de la taxation des grandes entreprises », ajoute-t-il.
Invité sur France Inter, son homologue français Bruno Le Maire a déclaré lundi matin qu’un accord franco-allemand sur une taxation européenne des géants du numérique comme Google et Facebook était « à portée de main ».
Source : Reuters
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