Aussi, fin mars, Bruxelles a proposé de nouvelles règles visant à garantir que les activités des entreprises numériques soient imposées dans l'UE d'une manière équitable et propice à la croissance.
Pour la Commission européenne, l'enjeu consiste à tirer le meilleur parti de cette évolution tout en veillant à ce que les entreprises numériques paient aussi leur juste part de l'impôt. Dans le cas contraire, le risque est réel pour les recettes publiques des États membres: les entreprises numériques sont actuellement soumises à un taux d'imposition effectif moyen deux fois moins élevé que celui applicable à l'économie traditionnelle dans l'UE.
Deux propositions législatives distinctes ont été alors présentées par la Commission pour mieux répondre à cette problématique :
- La première initiative vise à réformer les règles relatives à l'imposition des sociétés de telle sorte que les bénéfices soient enregistrés et taxés là où les entreprises ont une interaction importante avec les utilisateurs par l'intermédiaire de canaux numériques. Cette option constitue la solution à long terme privilégiée par la Commission.
- La seconde proposition répond à la demande de plusieurs États membres en faveur d'une taxe provisoire, portant sur les principales activités numériques qui échappent actuellement à toute forme d'imposition dans l'UE.
Mais l’Europe a du mal à se mettre d’accord. D'ailleurs, en septembre, un document confidentiel du ministère des Finances consulté par le journal allemand Bild a mentionné que la « diabolisation » des grandes entreprises numériques « n'est pas productive ». Des déclarations qui soulignent quelques mésententes au sein de l'union sur la question.
La réaction de la France
Soutenu par la France, le projet est en revanche combattu par d’autres Etats membres, dont l’Irlande, la Finlande, la Suède et la République tchèque. Les réformes touchant à la fiscalité dans l’UE doivent être approuvées à l’unanimité des Etats membres.
Aussi, dans un premier temps, en septembre, la France a avancé plusieurs idées auprès de ses partenaires européens pour parvenir à un accord. Paris a déclaré ne pas être hostile à l’idée d’offrir une compensation financière à l’Irlande pour pallier les pertes de revenus fiscaux que pourrait entraîner l’instauration de cette taxe. Le ministre français des Finances, Bruno Le Maire, l’un des plus fervents partisans de cette taxation, a tenté de trouver un compromis en proposant d’ajouter une « clause de caducité » à ce nouvel impôt. La proposition prévoit de supprimer la taxation dès qu’un accord est trouvé au niveau mondial avec les poids lourds de l’internet. Cette proposition a été accueillie comme une avancée par les partenaires européens.
Malheureusement, cela n'a pas permis de faire avancer les choses d'une manière significative. Aussi, jeudi, Bruno Le Maire a dénoncé les tergiversations de certains pays européens sur l’instauration de cette taxe, prévenant que l’absence de décision pourrait être sanctionnée dans les urnes lors des européennes de mai 2019.
« Les discussions, ça suffit, les palabres ça suffit, les prétextes ça suffit (...) Je veux un accord et surtout je veux une décision », a déclaré le ministre français de l’Economie et des Finances sur Public Sénat. « Des millions de citoyens aujourd’hui ne comprennent plus l’absence de décision » et demanderont des comptes à leurs dirigeants sur les décisions prises pour les protéger et les défendre, et notamment en matière d’équité fiscale, lors de la campagne en vue des élections européennes du 26 mai 2019, a-t-il prévenu.
Pour Bruno Le Maire, « ce qui coince (...) c’est comme toujours en Europe, c’est le manque de volonté politique (car) tous les problèmes techniques ont été réglés ».
Selon Le Maire, ce sont principalement les plus petits pays tels le Luxembourg et l'Irlande, qui s'opposent aux propositions. Ils appliquent en effet souvent des tarifs plus avantageux, ce qui fait que des géants comme Google, Amazon, Facebook ou Apple installent précisément leur siège européen dans ces pays. Le ministre français fait enfin observer qu'une PME en France ou en Allemagne paie en moyenne quatorze pour cent d'impôts en plus que les géants technologiques américains.
Source : Reuters
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