Comme le rapporte le quotidien Bloomberg, depuis son entrée en fonction, Emmanuel Macron essaie de mettre en place une équipe pour permettre à la France de regagner sa souveraineté technologique, mais les décennies de confiance aux États-Unis se révèlent difficiles à renverser. Si l’utilisation de technologies américaines au sein de l’État français n’est pas un secret, l'indépendance technologique de l'Hexagone est devenue une priorité absolue, surtout maintenant que Donald Trump qualifie l'Union européenne d'ennemi.
L'un des chantiers sur lesquels la France travaille en ce moment est d'abandonner l'utilisation de technologies US dans les domaines stratégiques tels que le renseignement et l'armée, entre autres. En effet, quelques semaines après la prise de fonctions d’Emmanuel Macron l’an dernier, son équipe a passé en revue les activités les plus sensibles de l’État, et le constat a créé une urgence d'avancer sur la question de la souveraineté technologique du pays. L'équipe a en effet découvert que, pour ses activités, le service de renseignement intérieur utilise des logiciels provenant de Palantir Technologies Inc., une entreprise qui travaille pour la communauté du renseignement des États-Unis, notamment pour la NSA, la CIA et le FBI, ainsi que pour différents acteurs du système de défense américain, comme les US Marines, l'US Air force et les Opérations spéciales. C'est en 2016 que Palantir a obtenu en France son contrat avec la Direction générale de la Sécurité intérieure.
La raison est qu'« aucune entreprise française n’a été en mesure de faire le travail » qui était exigé, a déclaré Laurent Nunez, nouveau directeur général de la Sécurité intérieure, en juillet, en marge d’une conférence visant à présenter un nouveau système antiterroriste. Toutefois, « nous travaillons maintenant à promouvoir une offre française ou européenne. Nous avons pour objectif de lancer un outil pour toutes les agences de renseignement. Et de nombreuses entreprises sont intervenues », a-t-il assuré.
« Nous avons l’intention de réduire notre exposition aux composants américains », a également déclaré la ministre française de la Défense Florence Parly, lors d’une conférence de presse à Paris jeudi. Le lendemain, elle devait dévoiler dans un discours à l’Agence spatiale nationale sa stratégie visant à assurer la souveraineté de la France dans l’espace.
Pour atteindre son objectif de souveraineté technologique de manière générale, la France a annoncé d'importants investissements et initiatives dans des domaines technologiques tels que l'intelligence artificielle, les nanotechnologies, entre autres. Elle a aussi lancé des initiatives pour soutenir les startups locales.
Des années pour promouvoir des champions locaux semblent commencer à porter leurs fruits, avec des entreprises comme OVH et Qwant qui se révèlent être des concurrents locaux aux géants américains du cloud et de la recherche en ligne. Dans le même objectif, l'Etat français est en train de se doter de sa propre messagerie publique chiffrée, après des préoccupations concernant des services tels que WhatsApp et Telegram. Mais les vieilles habitudes sont difficiles à abandonner surtout quand les alternatives locales ne semblent être à la hauteur qu'aux yeux de ceux qui en font la promotion.
Par exemple, pour sa transformation numérique, la SNCF a ignoré OVH et s'est tournée vers trois fournisseurs de cloud américains, à savoir Amazon, Microsoft et IBM. Cela a suscité des critiques locales étant donné que l'entreprise ferroviaire est considérée par les pouvoirs publics comme un opérateur d’importance vitale, dont la continuité de service et la sécurité d’information sont essentielles à la marche de l’ensemble de l’économie nationale. La réalité est que pour de nombreux appels d'offres relatives à des services ou solutions technologiques, les candidats les plus sérieux sont les géants américains. Tant qu'il n'y a pas des champions locaux, il sera donc utopique de parler de souveraineté technologique surtout que les habitudes jouent en faveur des entreprises américaines.
Pour Mounir Mahjoubi, la solution la plus simple serait donc de demander aux entreprises d'acheter des solutions françaises et de cesser d’utiliser celles des fournisseurs étrangers, mais cela irait à l’encontre de la mondialisation. Car les sociétés françaises vendent également à l’étranger. Imposer la préférence nationale n’est donc pas une option. L’administration de Macron doit trouver un équilibre délicat.
Source : Bloomberg
Et vous ?
Étant donné que les géants du cloud, du logiciel, entre autres technologies sont pour la plupart américains, une souveraineté technologique de la France et de l'Europe est-elle possible dans les 10 prochaines années ?
Que proposez-vous pour y arriver ? Et dans quels domaines faut-il mettre l'accent ?
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Le , par Michael Guilloux
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