Il y a quelques jours, les ministres des Finances de l’Union européenne (UE) se sont concertés au sujet d’une modification des règles qui devrait permettre de réajuster le montant des taxes que les entreprises technologiques de l’Internet comme Facebook, Google ou Amazon devront payer dans les États membres de l’UE où elles opèrent. Ce projet de loi a été initié par l’Estonie qui occupe actuellement la présidence tournante de l’organisation européenne. C’est à Tallinn, une ville située en Estonie, que les ministres des Finances des 28 pays membres de l’UE se sont rencontrés du 15 au 16 septembre dernier.
Au sortir de cette réunion, il semble que l’idée d’imposer de nouvelles méthodes de taxation ciblant spécifiquement les multinationales du numérique comme Google, Apple, Facebook ou Amazon rencontre des résistances au sein de l’Union européenne. Les différentes propositions initiées par l’Estonie ou la France ne parviennent pas encore à faire l’unanimité au sein des 28 États membres de l’UE à cause, notamment, des réticences exprimées par les pays de petite taille.
« ;Il faut être très prudent ;», a déclaré le ministre des Finances du Danemark, Kristian Jensen. Ce dernier estime que l’adoption de pareilles mesures de taxation pourrait faire fuir d’Europe les sociétés innovantes. De son côté, le ministre des Finances du Luxembourg, Pierre Gramegna, a insisté sur la nécessité d’obtenir un accord global au niveau européen. La République tchèque et Malte ont, pour leur part, estimé que la taxation du chiffre d’affaires telle qu’elle est envisagée par la partie française était plutôt difficile à mettre en œuvre au regard de certains aspects techniques.
Il faut rappeler que dix États européens ont d’ores et déjà signé une déclaration afin de marquer leur soutien à la proposition française, malgré ses lacunes, et que d’autres pays comme la Belgique et les Pays-Bas ont déjà exprimé leur soutien à l’initiative. La France, par la voix de son ministre des Finances Bruno Le Maire, estime qu’il faut que les entreprises concernées (des GAFA et autres géants de l’Internet) soient désormais imposées sur la base de leurs revenus et non plus en fonction des bénéfices qu’elles réalisent dans les pays où ces chiffres d’affaires ont été réalisés. Ces sociétés technologiques ont la fâcheuse tendance de ne déclarer leurs impôts que dans des pays de l’espace européen à faible taux d’imposition comme l’Irlande ou le Luxembourg que beaucoup assimilent à des paradis fiscaux.
Malgré le soutien de poids de pays comme l’Allemagne, l’Autriche, l’Espagne, la France, l’Italie, la Bulgarie, la Grèce, la Roumanie, la Slovénie et Portugal, les propositions françaises ne semblent pas suffisamment matures pour convaincre les plus petits États de l’organisation ou du moins susciter leur intérêt. Dans leur grande majorité, les États de l’UE semblent s’accorder sur le principe qu’il faudrait taxer davantage les géants de l’Internet. Cependant, les voies et moyens pour y parvenir ne font pas encore l’unanimité au sein des 28, chose qui est indispensable pour finaliser et adopter tout accord éventuel sur le sujet au sein des instances compétentes de l’UE.
Chacun des 28 États membres de l’UE dispose d’un pouvoir de veto sur les questions fiscales et certains en ont déjà fait usage par le passé afin de bloquer des réformes semblables à celle-ci. C’est dans cette optique que la présidence estonienne a suggéré des discussions en interne à l’échelle européenne d’abord afin de parvenir à une position commune d’ici décembre suivie par des propositions législatives au printemps prochain. Comme cela avait été rapporté auparavant, l’une des missions les plus difficiles pour les défenseurs d’une nouvelle taxe pour les GAFA sera probablement de réussir à convaincre les États plus petits ou plus vulnérables économiquement de l’organisation européenne, qui profitent déjà des impôts ou des retombées des activités de lobbying versés par ces grandes sociétés technologiques.
Il semble, néanmoins, que l’absence d’unanimité au sein de l’UE ne puisse pas constituer une opposition suffisamment forte pour empêcher l’adoption de réformes sur la taxation des GAFA. En effet, le vice-président de la Commission européenne, Valdis Dombrovskis, n’a pas manqué de souligner le fait que même si des divisions persistent, la nouvelle réglementation pourra malgré tout être mise en œuvre au niveau européen via le système dit de la « ;coopération renforcée ;». Cette disposition permet aux États qui le souhaitent de mettre en application une mesure que d’autres pays n'envisageraient pas d'adopter sur leur territoire. La Commission européenne devrait présenter dans quelques jours un document qui listerait les autres possibilités juridiques de taxation de l’économie numérique, a déclaré Dombrovskis.
Source : Reuters
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Le , par Christian Olivier
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