
Le samedi 11, c’est-à-dire, le jour suivant celui de l’annonce du dépôt du bilan de SVB, plus de 5 000 PDG et fondateurs de startups ont signé une pétition en faveur d’une intervention des autorités américaines pour soi-disant « sauver l’innovation dans l’économie américaine… et éviter un risque réel de contagion systémique ». Il faut souligner qu’à ce moment, la peur de perdre leurs avoirs était réelle au niveau des dirigeants de ces entreprises technologiques. En effet, nombreux sont ceux qui ne savaient pas vraiment comment ils pourraient payer leurs employés si leur argent était bloqué dans la banque insolvable. Nous précisons lorsqu’une banque fait faillite, chaque déposant est assuré de récupérer un maximum de 250 000 $ en dépôts auprès du fonds d’assurance de la FDIC. Pour contourner cette limite, plusieurs individus effectuent des dépôts d’un maximum de 250 000 dollars auprès de différentes banques. Mais dans le cas des clients de la SVB, qui majoritairement étaient des startups technologiques et des entreprises liées au monde du capital-risque, ces derniers avaient des dépôts dont plus de 90 % dépassaient ce plafond. La peur de se retrouver du jour au lendemain sans argent pour faire tourner leurs entreprises a fait changer d’opinion ces dirigeants de la Silicon Valley qui majoritairement sont opposés à une intervention et une régulation de l’état dans leurs activités.
David Sacks, fondateur associé de Craft Ventures, cofondateur de PayPal et éminent capital-risqueur de la Bay Area, écrivait sur sa page Twitter le vendredi 10 mars, c’est-à-dire quelques heures après l’annonce de la faillite de SVB : « Où est Powell ? Où est Yellen ? Arrêtez cette crise maintenant. Annoncez que tous les déposants seront en sécurité. Placez SVB avec une banque du Top 4. Faites-le avant l’ouverture de lundi ou il y aura contagion et la crise se propagera ».
Where is Powell? Where is Yellen? Stop this crisis NOW. Announce that all depositors will be safe. Place SVB with a Top 4 bank. Do this before Monday open or there will be contagion and the crisis will spread.
— David Sacks (@DavidSacks) March 10, 2023
Le dimanche 12 mars, alors que l’on ne savait pas encore si les autorités américaines interviendraient pour sauver les clients de la SVB, Unherd TV a interviewé David Sacks pour faire la lumière sur la situation qui prévalait. Lorsque l’interview a eu lieu, il n’était pas clair de savoir s’il y aurait un sauvetage par le gouvernement. Mais l’opinion de Sacks à ce sujet était claire : le gouvernement devait protéger les déposants et devait le faire rapidement s'il ne voulait pas que la confiance dans les banques régionales s’effondre à l’échelle nationale. « Nous ne parlons pas de renflouer les actionnaires ou les détenteurs d’obligations », a déclaré Sacks. « Nous parlons de protéger les dépôts dans le système bancaire régional »."
L’investisseur technologique a poursuivi en affirmant qu’un manque de sympathie pour les propriétaires de petites entreprises de l’industrie technologique provoquait une confusion concernant la gravité de la situation pour les gens normaux. De nombreux utilisateurs étaient des propriétaires de petites entreprises qui avaient ouvert un compte courant standard. En effet, si les déposants de la SVB étaient des agriculteurs, il n’y aurait pas eu de débat, a-t-il soutenu : « La seule raison pour laquelle les gens s’obstinent sur ce point est que Silicon Valley Bank porte le nom de Silicon Valley. S’il s’agissait d’une banque d’agriculteurs et que c’était 40 000 fermes, de petites fermes commerciales qui en paient le prix, tout le monde comprendrait. Les arguments invoqués seraient les suivants : nous ne pouvons pas laisser 40 000 fermes fermer leurs portes. Ils n’ont rien fait de mal. Lorsqu’ils déposaient leur argent dans une banque, ils croyaient simplement qu’ils étaient en sécurité. »
Il ne manqua pas non plus de partager ses préoccupations sur cette situation qui selon lui nuirait à la confiance envers les petites banques et conduirait à une plus grande centralisation des opérations bancaires aux États-Unis si rien n’était fait. « Il existe deux niveaux de banques aux États-Unis. Il y a ceux qui sont d’importance systémique, ils sont trop gros pour échouer. Si vous mettez votre argent dans cette banque, c’est un vrai dépôt, vous ne le perdrez pas en cas de faillite bancaire. Le deuxième niveau est tout le monde. Et si vous êtes dans ce niveau, vous n’avez pas de vrai dépôt, ce n’est pas garanti. Vous savez ce que vous faites ? Vous faites un prêt non garanti à cette banque. Maintenant, je vous demande, qui mettrait maintenant son argent dans un niveau deux ? Qui veut faire un prêt ? », a fait remarquer Sacks.
Bien entendu, de vives réactions se sont fait sentir suite à l’appel de Sacks de sauver les startups par une intervention de l’État. Elliot, un internaute déclarait ceci en réponse à l’interview de Sacks : « C’est pourquoi vous avez besoin que la Fed soutienne la banque, pour garder la confiance. En d’autres termes, s’ils sont stupides, paresseux, corrompus, incompétents, gèrent la diversité, courent des risques… Pas de problème, la FED vous soutient ». Juste pour dire qu’un soutien de la SVB par le gouvernement pourrait envoyer un mauvais message à toute l’industrie, ce qui signifierait que les dirigeants de ces banques peuvent tout se permettre, dans tous les cas l’État sera toujours là pour amortir leurs pertes en cas de faillite. Wright, un autre intervenant fait remarquer l’hypocrisie dans les déclarations de Sacks en résumant les affirmations de Sacks : « Un investisseur technologique dit que la banque d’investissement technologique est renflouée avec l’argent du contribuable est une bonne chose ».
Pour éviter un risque de contagion des autres banques régionales et soutenir les clients de SVB qui ont encore leurs avoirs auprès de la SVB, l’administration Biden a annoncé dimanche 13 mars que les clients de la Silicon Valley Bank auront un accès complet à leurs dépôts. Les régulateurs fédéraux ont déclaré qu’ils prenaient ces mesures d’urgence pour empêcher la contagion dans d’autres petites banques régionales à la suite de l’implosion soudaine de la Silicon Valley Bank. Selon les déclarations de ces responsables, le plan de sauvetage américain ne ferait pas intervenir l’argent du contribuable, mais consiste à puiser dans la réserve du fonds d’assurance de la FDIC financée par les banques. Bien que vrai d’un point de vue technique, ce fonds est reconstitué par les frais des banques de tout le pays, qui à leur tour proviennent des frais que les Américains paient à leurs banques tout le temps. De manière indirecte, ce sont tous les Américains qui contribuent à renflouer les caisses de la Silicon Valley Bank.
Vu la vague d’hostilité à laquelle Sacks en particulier et les dirigeants de Silicon Valley en général ont eu à faire face après avoir proposé une intervention de l’État pour renflouer les caisses de la SVB, Sacks a écrit ceci sur son compte Twitter : « Nous avons atteint un point de division politique où il est bon d’encourager les membres d’une autre tribu à perdre leurs dépôts bancaires, même si vous protégiez les membres de votre propre tribu dans la même situation. Faites attention à ce que vous souhaitez, car la chaussure pourrait bientôt être sur l’autre pied ».
We’ve reached a point of political division where it’s fine to root for members of another tribe losing their bank deposits—even though you would protect members of your own tribe in the same situation. Be careful what you wish for because the shoe may soon be on the other foot.
— David Sacks (@DavidSacks) March 12, 2023
À travers ses propos, il est clair pour Sacks que ni lui ni les entreprises de la Silicon Valley ne bénéficient de la sympathie du public dans cette affaire. Toutefois, parler de « division politique » dans cette affaire n’est pas vraiment correct. Ce à quoi l’on assiste est plutôt un consensus remarquable sur l’opposition à un plan de sauvetage financé par les contribuables à la fois de la droite qui impute ce problème à la Tech en général, et de la gauche, qui est naturellement antipathique aux riches investisseurs de la Silicon Valley.
De nombreuses personnes ont également une opinion de plus en plus négative de la Silicon Valley et de la Big Tech en général après avoir vécu avec les conséquences de leurs décisions au cours de la dernière décennie. L’on peut citer par exemple une étude qui déclare que [URL="https://intelligence-artificielle.developpez.com/actu/33...