Depuis plusieurs jours, on en sait un peu plus sur les raisons de l’absence de Truth Social sur le Play Store. La semaine dernière, Devin Nunes, le PDG de Truth Social a déclaré lors d’une interview que la disponibilité du nouveau réseau social sur le Play Store dépendait de Google. « Nous attendons qu’ils nous approuvent. Je ne sais pas ce qui prend autant de temps. Ils peuvent l’approuver et demain il démarrera pour toutes les personnes qui ont maintenant précommandé. Et je dois dire que nous sommes disponibles en précommande sur Google Play Store. Mais ce serait bien s’ils nous approuvaient. Et comme vous le savez, nous avons construit cela à partir de zéro brique par brique afin que nous ne puissions pas être rejetés. Mais les entreprises avec lesquelles nous devons travailler sont Apple et Google. Tout le monde regarde parce qu’ils ont le monopole sur ces marchés. Google a le monopole avec son Play Store et Apple évidemment avec son iPhone. Nous avons eu beaucoup de succès avec Apple. Avec Google, on attend simplement », a déclaré Devin Nunes.
À première vue, le problème serait du côté de Google qui semble ne pas vouloir approuver l’application de Truth Social. Aussi pour clarifier les choses, Axios rapporte qu’un représentant de Google l’a contactée avec la déclaration suivante : « Le 19 août, nous avons informé Truth Social de plusieurs violations des politiques standards dans leur soumission d’application actuelle et avons réitéré que le fait d’avoir des systèmes efficaces pour modérer le contenu généré par l’utilisateur est une condition de nos conditions d’utilisation pour toute application qui veut démarrer sur Google Play ». Et d’ajouter que « la semaine dernière, Truth Social a répondu en reconnaissant nos remarques et en disant qu’ils travaillaient à résoudre ces problèmes ». À en juger par cette déclaration, le problème résiderait donc dans l’incapacité de Truth Social à modérer suffisamment et efficacement les contenus sur sa plateforme. L’entreprise serait-elle donc en train de forcer la validation de son application ? Selon certaines indiscrétions, les préoccupations de Google concernent des contenus tels que des menaces physiques et des incitations à la violence. Nous soulignons que pour ce qui concerne la modération Truth l’applique sur sa plateforme. Mais, selon certains utilisateurs et même Hunt-Majer, chercheuse en responsabilité Big Tech chez Public Citizen, cette modération reste ciblée, car après avoir a écrit « l’avortement, c’est la santé », la chercheuse a rapidement découvert que sa publication faisait l’objet d’un shadow banning (qui pourrait être traduit par bannissement furtif, ce qui signifie qu’après sa publication, elle ne pouvait le trouver nulle part sur le site Web). En outre, un article sur Blake Shelton en faveur de la possession d’armes à feu a été « banni furtivement », ont découvert les utilisateurs. Le site n’autoriserait pas non plus un lien vers un article sur Breitbart, un site d’extrême droite.
Face à la réaction de Google, TMTG (une société américaine de médias et de technologie fondée en janvier 2021 par Trump) a réagi en déclarant hier qu’elle « a continuellement travaillé de bonne foi avec Google pour s’assurer que l’application Android Truth Social est conforme aux politiques de Google sans compromettre notre promesse d’être un refuge pour la liberté d’expression. Comme nos utilisateurs le savent, Truth Social crée un environnement dynamique et familial qui travaille rapidement pour supprimer le contenu qui enfreint ses conditions d’utilisation — qui, selon des observateurs indépendants, sont parmi les plus robustes de l’industrie ». L’entreprise en a profité pour rappeler un vieux tweet datant de 4 ans d’Eric Michael Swalwell, un avocat et homme politique américain membre du Congrès de Californie depuis 2013, qui fait l’apologie de la guerre, mais n’a pas été supprimé de Twitter et n’a pas non plus entraîné l’éviction de Tweeter du Play Store. Le tweet dit ceci : « Et ce serait une courte guerre, mon ami. Le gouvernement a des armes nucléaires. Trop d’entre eux. Mais ils sont légitimes. Je suis sûr que si nous parlions, nous pourrions trouver un terrain d’entente pour protéger nos familles et nos communautés ».
Truth social n’est pas le seul média social à avoir buté sur les règles strictes de Google en matière de modération. L’année dernière, Google a retiré le réseau social Parler de son magasin d’applications à cause de l’absence de modération face aux messages incitant à la violence et autres messages de même genre. Le réseau social Gab a également été supprimé du Play Store en 2017 pour les mêmes raisons. Nous précisons que Truth Social a des bannières de « contenu sensible » qui sont affichées avant certains messages indiquant « Ce contenu peut ne pas convenir à tous les publics », mais le contenu susceptible de heurter la sensibilité des utilisateurs n’est pas retiré. Étant donné que Truth Social n’est pas disponible sur les systèmes d’exploitation Android, environ 44 % des utilisateurs américains de smartphones ne peuvent pas le télécharger. Et même sur iOS, la liste d’attente est encore longue pour pouvoir s’inscrire, car l’entreprise fait face à de sérieux problèmes techniques. Actuellement, Trump compte plus de 3 millions de fans sur Truth Social qui ressemble fortement à Twitter. Quand on sait que l’ancien président enregistrait 88 millions de followers sur Twitter, on peut se représenter de manière approximative le nombre important de followers qui n’ont toujours pas la possibilité de suivre leur leader. Une solution pour remédier à ce problème d’indisponibilité de l’application sur Android serait de concevoir une version Web de l’application, mais le réseau social semble ne pas être intéressé par cette solution pour l’instant.
En plus d’être indisponible sur le Play Store, Truth Social doit faire face à d’autres problèmes
En plus de ce problème avec Google, Truth Social est également empêtré dans des difficultés judiciaires et financières. En effet, le réseau social serait à court d’argent et doit plus de 1,6 million de dollars à l’un de ses fournisseurs de technologie. Et plus tôt cette semaine, il a été rapporté que le réseau social avait cessé de payer RightForge, une société d’infrastructure Internet. En principe, la fusion du réseau social avec Digital World Acquisition Corp. (DWAC), une société d’acquisition à vocation spéciale (SPAC est une société cotée en bourse créée dans le but d’acquérir ou de fusionner avec une société existante) devait permettre à Truth Social de souffler financièrement, avec la capitalisation boursière de DWAC évaluée à 3 milliards de dollars. Mais ce projet est encore au point mort, car deux régulateurs financiers ont ouvert des enquêtes sur cette fusion qui devait permettre d’échanger publiquement des actions de la nouvelle société sans la diligence d’une introduction en bourse.
En décembre, DWAC et TMTG ont annoncé des accords pour lever 1 milliard de dollars auprès d’un groupe d’investisseurs. Mais ces fonds ne seront pas disponibles avant la clôture de la fusion. Les documents déposés auprès de la Securities and Exchange Commission (SEC) montrent déjà que DWAC enregistrait une perte nette de 6,2 millions à la date du 30 juin de cette année. Dans le même document, on peut lire que la société demande à avoir plus de fonds pour pouvoir continuer à fonctionner et boucler la fusion au plus tard le 8 septembre de cette année constituant la date limite de la fusion ou jusqu’au 8 mars 2023 si une prolongation de temps lui est accordée. Le cours de l’action de DWAC a perdu près de 75 % de sa valeur depuis son pic de mars.
Source : Axios, TMTG
Et vous ?
Comment jugez-vous les arguments de Google face à la demande d’approbation de Truth ? Est-ce un acharnement ciblé de Google contre Truth Social ? Ou une volonté de Google à emmener Truth Social à se conformer à ses règles sur son Play Store ?
Dans quelques années, comment entrevoyez-vous Truth Social ? Un grand réseau social aussi fort que Facebook et Twitter ? Ou un projet qui ne décollera pas ?
Selon vous Truth Social pourrait-il favoriser la liberté d’expression sur la toile ? Ou plutôt l’anarchie ?