L'enquête se concentrerait sur deux principales pistes. L'un de ces objectifs cible les applications que vous trouverez dans les centres d'infodivertissement automobile. Google Automotive Services offre aux constructeurs automobiles un ensemble de marques contenant Maps, le Play Store, l'assistant et d'autres applications pertinentes à utiliser dans les véhicules. Le problème est que les fabricants ne sont pas autorisés à mélanger Maps avec un autre type d'assistant vocal, ce qui, selon Google, est simplement dû au fait que l'intégration complète de ses produits permet une expérience optimale. L'autre direction de l'enquête consiste à examiner la façon dont Google n'autorise pas les développeurs qui utilisent la technologie Google dans leurs applications à utiliser également la technologie créée par des sociétés concurrentes.
Lancé en février 2005, Google Maps, le service de cartographie de Google, a su peu à peu s’imposer pour devenir presque incontournable dans le domaine. Le service s’est adapté à l’air du temps, ne manquant pas certains virages importants comme celui de la réalité augmentée. Pour mémoire, Google n’a pas inventé la cartographie en ligne, MapQuest ou Michelin (ViaMichelin) étaient déjà présents et le projet OpenStreetMap avait démarré peu de temps avant, mais Google s’est naturellement imposé par ce choix de la gratuité et la possibilité d’intégrer (gratuitement) leurs cartes interactives personnalisables sur n’importe quel site.
Google Maps compte plus d’un milliard d’utilisateurs actifs par mois. Les API de Google Maps sont utilisés par bon nombre de sites Web pour ajouter des informations sur des cartes ou par des internautes pour divers services (place de stationnement, proposition de lieux à visiter, heures d’ouverture et de fermeture des magasins, numéro pour contacter une entreprise, etc.).
L'outil est omniprésent parce que ses cartes et ses itinéraires sont précis, conviviaux et fournissent généralement toutes les informations dont vous avez besoin pour vous rendre d'un point A à un point B. Il faut préciser que si Google Maps est gratuit pour les utilisateurs finaux, l’offre ne l’est pas pour les entreprises et les professionnels.
Une affaire antitrust en préparation
Il y a eu des allégations selon lesquelles Google n'est pas loyal avec ses concurrents lorsqu'il s'agit d'utiliser Maps et d'autres applications. Malheureusement pour la grande enseigne de la recherche, le ministère américain de la Justice examine de près ces arguments.
Selon un nouveau rapport de Reuters, le DOJ poursuit toujours une enquête qui a débuté en 2020 pour déterminer si l'intégration de Maps par Google avec d'autres logiciels Google supprime illégalement la concurrence, enfreignant ainsi les lois antitrust.
Premier point visé par l'enquête
L'enquête du DOJ porte sur deux stratégies de Google Maps. La première concerne étonnamment Android Automotive - notez qu'il ne s'agit pas d'Android Auto, l'application pour téléphone. Android Automotive est un système d'exploitation complet que les fabricants peuvent déployer sur leurs voitures. Comme pour les téléphones avec Android, Google regroupe ses applications sur Android Automotive. Google Maps est une application phare dans une voiture, mais si les fabricants veulent intégrer Google Maps, Google leur demande de prendre le Play Store, Google Assistant, YouTube Music et toutes les autres applications de voiture fabriquées par l'entreprise. Le ministère de la Justice craint que cette exigence n'étouffe la concurrence.
Ce qui est surprenant dans cette décision du DOJ, c'est que les États-Unis n'ont jamais obligé Google à faire quoi que ce soit concernant le regroupement d'applications sur les téléphones, qui est un marché beaucoup plus vaste. Android Automotive est un tout nouveau système d'exploitation très limité, disponible sur une dizaine de véhicules seulement, comme la Polestar 2, d'autres véhicules Volvo comme le XC40 Recharge, le GMC Hummer EV et bientôt les véhicules Ford 2023. Android, quant à lui, est présent sur environ 2,5 milliards de téléphones dans le monde. Les États-Unis ont poursuivi Google pour avoir limité la concurrence des magasins d'applications sur Android, payé pour être le moteur de recherche par défaut sur la plupart des plateformes, promu ses propres services de recherche et pour son comportement anticoncurrentiel sur le marché de la publicité. Mais Google est toujours libre de regrouper ses applications sur les téléphones.
Android Automotive sur le Polestar 2
L'UE, en revanche, a forcé Google à dissocier Chrome et Search d'Android et a empêché Google de punir les fabricants d'Android qui utilisent le code source d'Android pour créer des forks Android. Le développement d'Android est traditionnellement financé par la publicité via les applications Google fournies, mais les fabricants européens ont désormais la possibilité de payer pour Android s'ils ne souhaitent pas regrouper tous les services Google. Si l'enquête du DOJ se termine par obliger Google à dissocier ses applications des voitures, ce type de plan de paiement est probablement ce qu'il adopterait.
En guise de rappel, l'enquête de la Commission européenne a fait suite à une plainte déposée en mars 2013 par FairSearch, un lobby soutenu par des entreprises qui estimaient être désavantagées par la domination de Google sur le marché des moteurs de recherche. En avril 2015, Bruxelles a donc ouvert une procédure d'examen formelle contre la grande enseigne de la recherche en ligne. Pendant son enquête, Bruxelles a constaté que les fabricants qui souhaitent préinstaller Google Play Store sur leurs appareils sont forcés par Google à préinstaller également Google Search et d'en faire leur moteur de recherche par défaut sur ces appareils. Par ailleurs, ceux qui souhaitent préinstaller Google Play Store ou Google Search doivent aussi préinstaller le navigateur Chrome de Google. Bruxelles estime que, de cette manière, Google a fait en sorte que son moteur de recherche et son navigateur soient préinstallés sur la grande majorité des appareils vendus dans l’espace économique européen.
Le 19 mars 2019, Google a fait la déclaration suivante :
« Après la décision de la Commission européenne en juillet 2018, nous avons modifié le modèle de licence pour les applications Google que nous créons pour les téléphones Android, créant de nouvelles licences distinctes pour Google Play, le navigateur Google Chrome et Google Search. Ce faisant, nous avons maintenu la liberté pour les fabricants de téléphones d'installer n'importe quelle autre application à côté d'une appli Google ».
« Désormais, nous allons également faire plus pour nous assurer que les propriétaires de téléphones Android ont la maîtrise du large éventail de choix de navigateurs et de moteurs de recherche disponibles en téléchargement sur leurs téléphones. Il s'agira de demander aux utilisateurs d'appareils Android existants et nouveaux en Europe quel navigateur et quelles applications de recherche ils souhaiteraient utiliser ».
En Russie, Google est, depuis avril 2017, rendu à l’ouverture d’Android aux autres moteurs de recherche et applications préinstallées proposées par des concurrents. La manœuvre fait suite à l’ouverture, en février 2015, d’une enquête antitrust suite au dépôt d’une plainte par Yandex – le plus important et le plus utilisé des moteurs de recherches sur le réseau Web russophone.
Deuxième point visé par l'enquête
Le deuxième problème du DOJ concerne la manière dont Google limite l'utilisation des données Maps pour les développeurs d'applications et de sites Web. Lisez rapidement les conditions d'utilisation de Google Maps Platform et vous rencontrerez une énorme liste de choses que vous n'êtes pas autorisé à faire avec les données de Google Maps. La section 3.2.3, « Restrictions contre l'utilisation abusive des services », contient des clauses génériques telles que « Pas de recréation de produits ou de fonctionnalités Google ». Fondamentalement, vous n'êtes pas autorisé à utiliser les données de Google Maps pour concurrencer Google de quelque manière que ce soit. Vous ne pouvez pas utiliser les données Maps avec un service de synthèse vocale, car Google le fait déjà. Vous ne pouvez pas utiliser les données de Maps pour créer un service de navigation, car cela concurrencerait Google Maps. Vous n'êtes pas du tout autorisé à utiliser l'API Google Maps dans une voiture, car cela concurrencerait Android, Android Automotive et un tas d'autres produits.
La clause suivante, « Aucune utilisation avec des cartes autres que Google », indique que vous n'êtes pas autorisé à combiner les données de Google Maps avec un autre service de cartographie. Vous ne pouvez pas afficher d'autres données cartographiques sur le même écran que les données Google Maps, et vous ne pouvez pas lier le contenu de Google Maps à du contenu autre que Google Maps.
Les développeurs utilisant la plateforme Google Maps doivent payer Google pour chaque demande d'utilisateur de données Maps. Il existe des dizaines d'API pour des choses comme les directions, la saisie semi-automatique, les détails de lieu, les photos de lieu, les photos de vue de rue, les cartes statiques, les cartes dynamiques et les recherches de fuseau horaire, qui augmentent continuellement votre facture. En tant que développeur, vous pouvez théoriquement rechercher le meilleur prix pour chaque appel d'API de différents fournisseurs, en comparant Google à des services tels que Microsoft Azure Maps, Here, TomTom, OpenStreetMap et de nombreux autres fournisseurs. En réalité, les termes de Google Maps exigent que si vous utilisez une API Google Maps, vous donniez à Google Maps un monopole sur votre service.
Pour l'instant, cette enquête n'en est qu'au stade préliminaire, et les enquêteurs n'ont pas encore recommandé de porter plainte. Mais un procès serait la prochaine étape.
Google fait l'objet de deux enquêtes antitrust en Allemagne
Données de recherche, Google Maps, YouTube, etc., et Gmail sont autant de sources qui permettent à Google d'emmagasiner une grande quantité de données sur ses utilisateurs chaque jour. Cette collecte de données facilite l'activité publicitaire de l'entreprise et lui permet de gagner des milliards de dollars chaque année. Mais le pouvoir de marché de Google et le contrôle qu'il exerce sur les données de ses utilisateurs font désormais l'objet d'un examen approfondi en Allemagne. Le gendarme antitrust du pays a ajouté l'entreprise à la liste des géants américains de la technologie visés par de nouvelles règles élargies.
Google fait face à deux procédures de la part des régulateurs allemands. La FCO a indiqué que les enquêtes viseraient à déterminer si le géant de la technologie offre aux utilisateurs un choix suffisant quant à l'utilisation de leurs données dans le large éventail de services numériques qu'il fournit. « En raison du grand nombre de services numériques proposés par Google, tels que le moteur de recherche Google, YouTube, Google Maps, le système d'exploitation Android ou le navigateur Chrome, on peut considérer qu'il revêt une importance capitale pour la concurrence sur les marchés », a déclaré Andreas Mundt, président de la FCO.
« Il est souvent très difficile pour les autres entreprises de contester cette position de force », a-t-il ajouté. En effet, il faut noter que le dixième amendement de la législation allemande relative aux restrictions de la concurrence permet maintenant aux autorités de régulation de surveiller Amazon, Facebook et d'autres « grandes entreprises numériques », ce qui reflète la politique de l'UE visant à limiter et à taxer les géants de l'Internet. Avec les nouvelles règles antitrust, les régulateurs peuvent dorénavant cibler les grandes entreprises technologiques susceptibles de dominer plusieurs marchés à la fois.
Sources : Reuters, Google Maps Platform
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