Fondé en 2011 et lancé le 16 février 2013 en version bêta, puis lancé en version définitive le 4 juillet 2013, le moteur de recherche Qwant, dont l'ambition est d'assurer la confidentialité et la sécurité des données de ses utilisateurs, a connu une rapide ascension dans l'Hexagone. Adoubé par des membres du gouvernement français, Qwant fut soutenue en 2018 par le ministre des Armées à cette date. Florence Parly avait déclaré que Qwant sera le moteur de recherche par défaut sur tous les ordinateurs du département dont elle a la charge. « Parce qu’il faut montrer l’exemple. Parce que nous partageons des valeurs communes. Parce qu’il ne partage pas nos données. Parce que c’est une entreprise française, Qwant sera le moteur de recherche par défaut sur tous les ordinateurs du ministère des armées », avait-elle déclaré sur son compte Twitter.
Également qualifié de « nouveau Google français en marche » par Emmanuel Macron en 2015, alors ministre de l'Économie, il fut également soutenu par l'actuel ministre de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire. En 2018, ce dernier voyait en Qwant « une réponse à tous ceux qui pensent que la France, l'Europe, ne sont pas en mesure de développer des entreprises digitales du même niveau de ce qui se fait aux États-Unis ou en Chine ». Or, les finances de Qwant ralentissent la croissance du moteur de recherche tricolore, et la solution pourrait bien venir d'une firme de l'Empire du Milieu : Huawei. En passant par sa branche capital-risque dénommée Hubble, celle-ci pourrait prêter la somme de 8 millions d'euros à Qwant, sous la forme d'obligations convertibles en actions.
Avec comme objectif ultime de concurrencer le géant de la recherche Google, depuis son lancement, Qwant a toujours promis qu'il ne trace pas ses utilisateurs et ne vend pas leurs données personnelles pour garantir leur vie privée. Il se veut neutre dans l'affichage des résultats. « Il faut s’attaquer à Google sur son côté le plus sombre, celui de la collecte et de la commercialisation des données personnelles des utilisateurs ». La confidentialité et la vie privée étant devenues les denrées les plus rares sur Internet aujourd’hui, l’on pouvait espérer que cela marche pour que Qwant prenne son envol quelques années après son lancement.
À sa création en 2013, l’entreprise n’a pas cessé de répéter qu’elle utilisait son propre algorithme de tri, mais ses premiers utilisateurs ont vite fait de remarquer qu’il ne s’agissait pas du tout d’une nouveauté. En effet, ces derniers ont souligné le fait qu’il existait une similitude remarquable par rapport à l’affichage et le tri des résultats de recherches entre le moteur de recherche français et le moteur de recherche de Microsoft Bing.
Rappelons que le moteur de recherche Bing créé par Microsoft permet à n’importe qui de créer un « métamoteur », c’est-à-dire un moteur de recherche qui s’appuie sur sa technologie moyennant un coût d’utilisation à chaque requête. C’est ainsi que fonctionne DuckDuckGo, un autre métamoteur qui rajoute comme Qwant une surcouche logicielle pour protéger la vie privée des internautes, mais se fonde en fait sur les résultats de Yahoo, Yandex, Yelp et Bing.
En 2019, les pertes ont commencé à se multiplier pour l’entreprise qui n’arrivait pas à atteindre ses objectifs. Selon les chiffres rapportés par ces derniers, l’entreprise n’affichait plus qu’un maigre chiffre d’affaires. En 2018 par exemple, son activité n’aura généré que 5 millions d’euros, ce qui n'est pas mieux qu’un an auparavant (3 millions). Début 2018, Qwant affirmait au Figaro vouloir atteindre un chiffre d’affaires de 15 millions d’euros. Ce nombre a rapidement été revu à 10 millions pour finalement atterrir à 5 millions. Il apparaît qu’actuellement, l’entreprise s’enfonce dans le rouge, avec 11,2 millions d’euros de pertes en 2018 après 10 millions en 2017 et 4,7 millions en 2016.
Même si chacun s’accorde sur la nécessité de disposer d’un outil de souveraineté numérique français ou plus largement à l’échelle européenne, il faut signaler que depuis qu’elle existe (9 ans), la startup française peine à réaliser un chiffre d’affaires au-delà des 5 millions d’euros. Les pertes se multiplient pour l’entreprise qui jamais n’a réussi à atteindre les objectifs fixés. Trois années ont suffi à l’entreprise pour jeter un peu plus de 25 millions d’euros.
Fin 2019, Qwant se retouve dans la tourmente. Alors que l’entreprise est à court de liquidité et voudrait prendre un nouveau départ, les actionnaires du groupe, à qui il incombe désormais de trouver les solutions adéquates qui permettront de résoudre ce problème de trésorerie négative et d’éviter un dépôt de bilan, exigeraient une nouvelle équipe managériale pour conduire la transformation du modèle économique de l’entreprise.
Mai 2020, Qwant, l’espoir de la French Tech, le moteur de recherche « souverain », mais dépendant à plus de 60 % de Bing, Est au cœur d'un scandale d'État. Une enquête publiée le 18 mai par Le Média révèle que Qwant ne mériterait pas la couverture médiatique qui le présente comme un modèle de success-story. Mais ce serait plutôt les relations de ses actionnaires et dirigeants avec des personnalités au plus haut de l'État qui lui ont permis d'avoir son statut actuel. Rappelons que l’entreprise a bénéficié d'une subvention de plus de 20 millions d'euros de la Caisse des Dépôts pour lui permettre de concurrencer Google, et est aujourd'hui le moteur de recherche par défaut dans les administrations publiques.
Il y’a un an, Qwant a annoncé à ses salariés un vaste plan de réorganisation pour se recentrer sur son cœur de métier. D'après les informations obtenues par nos confrères chez France Info, cette restructuration avait menacé de fermeture le bureau d'Ajaccio (Corse-du-Sud), dont les douze salariés s'occupent du service Qwant Music, ainsi que celui d'Épinal (Vosges), racheté en 2017 à l'entreprise Xilopix qui a vu son nombre de salariés être réduit progressivement malgré les promesses de recrutements. L'investissement pourrait apporter une véritable bouffée d'oxygène au Google français. Plus top cette année, Qwant a partagé quelques statistiques, notamment sur son bilan 2020 avec des pertes divisées par près de deux en seulement un an.
Voici, ci-dessous, le bilan 2020 de Qwant
- +34 % du nombre de requêtes : Qwant indique avoir connu une croissance significative du volume de requêtes qui viennent de passer le cap symbolique des 2,5 milliards pour atteindre 2,7 milliards de requêtes sur l’année 2020 contre 1,9 milliard sur l’année 2019 soit une croissance de 34 % ;
- une augmentation significative du CA dans un marché du search atone : Qwant annonce une croissance de son chiffre d’affaires brut de près de 34 % passant de 6,3 M€ en 2019 à 8,5 M€ en 2020, soit un chiffre d’affaires comptable de 7,5 M€ net en 2020 (audit en avril 2021). Le moteur de recherche rappelle que, selon le SRI et l’UDECAM, le marché de la publicité numérique a crû d’un petit 3 % en 2020 en France, dont le Search à +3 % et le Display à -2 %. La crise économique a heurté fortement le marché de la publicité numérique qui enregistrait en moyenne une croissance de plus de 13 % sur la période de 2013 à 2019 ;
- des pertes divisées par près de 2 en seulement un an : en 2019, 23,5 M€ de pertes ont été déclarées. En 2020, l’augmentation du CA en 2020 associé à un plan de restructuration complet et à un recentrage stratégique sur son cœur de métier, la recherche, auraient porté leurs fruits : les pertes pour 2020 sont divisées par près de 2 et s’établissent désormais à environ 13 M€ (selon les estimations de Qwant). Sur cette même période, 30 % d’économies ont été réalisées sur les frais fixes du groupe et les activités non stratégiques discontinuées ;
- deux mois records en novembre et décembre 2020 : avec respectivement 38 % et 34 % de croissance en novembre et décembre 2020, Qwant connait ces deux mois de records de CA depuis sa création, fixant à plus de 1 M€ le CA par mois (CA Brut), et se rapprochant très fortement ainsi de son point d’équilibre mensuel.
Pour rassurer les sceptiques sur la potentielle entrée de la firme chinoise au capital de Qwant, un porte-parole de la Caisse des Dépôts, précise : « c'est un investissement via une obligation. Ce n'est pas une entrée dans le capital de Qwant. C'est un moyen pour financer notre expansion, et, surtout, avec un acteur mondial essentiel, qui reconnaît la solidité de notre technologie et la réalité de notre projet ».
D'un autre côté, Huawei, qui propose Qwant en tant que moteur de recherche par défaut en France, en Allemagne et en Italie sur sa gamme de smartphones P40, trouve là un bon moyen de s’éloigner des technologies américaines.
Et vous ?
Que pensez-vous de ce rapprochement entre Qwant et l'entreprise chinoise Huawei ?
Qwant utiliserait Bing de Microsoft. Pourquoi selon vous, Qwant utilise les technologies américaines pour ensuite essayer de rivaliser avec elles ?
Qwant, peut-elle véritablement rivaliser avec Google ? Dans quelles mesures ?
Voir ausi :
Qwant, le faux espoir de la French Tech ? Le moteur de recherche « souverain », mais dépendant à plus de 60 % de Bing, est au coeur d'un scandale d'État
Le français Qwant qui rêve de détrôner le moteur de recherche de Google est dans la tourmente, les actionnaires du groupe exigeraient une nouvelle équipe managériale pour conduire sa transformation
Le Français Qwant se prépare à licencier un quart de son effectif, pour réduire ses coûts et se concentrer sur son principal service qu'est son moteur de recherche
Qwant : enquête sur les déboires du « Google français » : hauts salaires, déficit, subventions, Utilisation de Bing et Bing Ads