Rappelons que cette taxe vise trois types d’activités numériques « qui sont celles qui génèrent le plus de valeur » :
- la publicité ciblée en ligne : « ce sont des prestations qui permettent à des annonceurs de placer un message publicitaire ou un lien commercial sur une page internet en fonction des données individuelles de chacun des consommateurs. Elle permet donc à la publicité d’avoir la plus grande efficacité en visant spécifiquement les modes de consommation d’un individu » ,
- la vente des données à des fins publicitaires : « l’objectif de cette taxation est d’éviter le contournement de la première activité »
- la mise en relation des internautes par une plateforme : « car elle résulte des données qui sont apportées par les utilisateurs ; plus il y a d’utilisateurs, plus la valeur marchande de la plateforme est importante ».
Paris a précisé qu’une entreprise qui met en vente sur son site Internet ses propres marchandises n’aura pas à s’en acquitter. Par exemple, Darty vend ses téléviseurs ou ses lave-linge sur son site Internet, il ne s’agit pas de mise en relation entre deux internautes, cette activité ne sera pas taxée. En revanche, quand Amazon est rémunéré comme intermédiaire numérique entre un producteur et un client, cette activité sera taxé.
Près d’une trentaine d’entreprises sont concernées par cette mesure, dont quatre françaises. Ces entreprises ciblées réalisent, au minimum, un chiffre d’affaires sur leurs activités numériques de 750 millions € au niveau mondial et de plus de 25 millions € sur le sol français. Bruno Le Maire, Ministre de l’économie, avait prévenu que « Si ces deux critères ne sont pas réunis, les entreprises ne seront pas imposées ».
Le texte final n’a pas encore été rendu public, mais le Sénat explique que plusieurs amendements adoptés par ses soins ont été maintenus. « Des rédactions de compromis ont été adoptées, en particulier pour préciser les critères de localisation des terminaux en France, dans le respect des règles applicables en matière de protection des données personnelles. »
Avec cette taxe, Paris espère ponctionner les plus grandes entreprises du numérique, à commencer par les GAFA, à hauteur de 3 % de leur chiffre d’affaires français et récolter 500 millions d’euros en 2019.
À ce propos, Bruno Le Maire a expliqué « Pour bâtir la fiscalité du XXIe siècle, celle qui repose sur la valeur qui existe aujourd’hui : les données. Il est impératif de taxer les données pour avoir un système fiscal efficace et financer nos services publics, nos écoles, nos crèches et nos hôpitaux. Mais c’est, aussi, une question de justice fiscale. Les géants du numérique payent 14 points d’impôts de moins que les PME européennes. Que ces entreprises paient moins d’impôts en France qu’une très grosse boulangerie ou qu’un producteur de fromages du Quercy, cela me pose un problème. Le produit de cette taxe de 3 % sur le chiffre d’affaires numérique réalisé en France à partir du 1erjanvier 2019 devra atteindre rapidement les 500 millions d’euros ».
L’administration Trump estime que la taxe numérique française est extrêmement discriminatoire
Le gouvernement américain n’a pas hésité à manifester son mécontentement face au projet de loi qui permettrait d’instaurer une « taxe souveraine » de 3 % sur le chiffre d’affaires numérique réalisé dans l’Hexagone. L’administration juge cette mesure « extrêmement discriminatoire à l’égard des multinationales basées aux États-Unis ». D’après l’administration Trump, quelle que soit la manière dont elles sont présentées, la base théorique des taxes européennes sur les services numériques que certains pays membres de l’UE, notamment la France, veulent imposer aux grandes entreprises de l’Internet communément désignées par le sigle GAFA est mal conçue.
L’administration Trump n’a pas caché qu’elle envisage même de saisir l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en représailles afin de protéger les intérêts des entreprises technologiques américaines qui sont visées par l’instauration d’une éventuelle taxe, notamment Google, Amazon, Facebook et Apple. À ce propos, Chip Harter, responsable du Trésor et délégué US pour les discussions fiscales internationales a déclaré : « au sein de notre gouvernement, certains étudient si cet impact discriminatoire nous donnerait le droit [de contester] en vertu des accords commerciaux et traités OMC ».
Si dans le fond, les États-Unis semblent d’accord avec le principe de taxer plus lourdement diverses multinationales, ils estiment néanmoins que « cela devrait être fait sur une base plus large que la sélection d’un secteur particulier », comme l’a précisé Harter. Dans tous les cas, la Maison-Blanche ne soutient pas la version française de la taxe GAFA.
Toutefois, Bruno Le Maire l’a confirmé à maintes reprises : cette loi est temporaire. Elle s’effacera derrière les décisions de l’OCDE dont les 127 pays-membres ont promis une réforme des règles fiscales applicables aux géants de l’économie numérique d’ici 2020. Il faut tout de même noter que bien que cette taxe soit censée être transitoire, députés et sénateurs ont renoncé à la limiter dans le temps
Selon Reuters, le ministre allemand des Finances, Olaf Scholz, a dit s’attendre à ce que les membres de l’OCDE soient en mesure de trouver un accord d’ici la mi-2020.
Il ne reste plus que deux étapes avant que le texte ne soit adopté, des passages les 4 et 11 juillet, respectivement devant l’Assemblée puis le Sénat.
Source : Sénat
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