Les 28 pays membres de l’Union européenne (UE) viennent officiellement de rejeter le projet de loi qui visait à instaurer une taxe numérique européenne ciblant les GAFA afin de limiter l’optimisation fiscale pratiquée par de nombreuses multinationales. Cette décision est la conséquence directe de l’absence d’unanimité au sein des 28 entretenue par quatre pays (l’Irlande, la Suède, le Danemark et la Finlande) qui se sont opposés jusqu’au bout à l’adoption de ce projet de loi.
En parallèle, le gouvernement étasunien qualifie désormais cette initiative avortée qui était soutenue par la majorité des 28 pays membres de l’UE (Espagne, France et Allemagne inclus) « ;d’extrêmement discriminatoire à l’égard des multinationales basées aux États-Unis ;». D’après l’administration Trump, quelle que soit la manière dont elles sont présentées, la base théorique des taxes européennes sur les services numériques que certains pays membres de l’UE, notamment la France, veulent imposer aux grandes entreprises de l’Internet communément désignées par le sigle GAFA est mal conçue.
L’administration Trump envisage même de saisir l’Organisation mondiale du commerce (OMC) en représailles afin de protéger les intérêts des entreprises technologiques américaines qui sont visées par l’instauration d’une éventuelle taxe GAFA, notamment Google, Amazon, Facebook et Apple. À ce propos, Chip Harter, responsable du Trésor et délégué US pour les discussions fiscales internationales a déclaré : « ;Au sein de notre gouvernement, certains étudient si cet impact discriminatoire nous donnerait le droit [de contester] en vertu des accords commerciaux et traités OMC ;».
Si dans le fond, les États-Unis semblent d’accord avec le principe de taxer plus lourdement diverses multinationales (taxation des activités digitales et taxation minimum), ils estiment, néanmoins, que « ;cela devrait être fait sur une base plus large que la sélection d’un secteur particulier ;», comme l’a précisé Harter. Dans tous les cas, la Maison-Blanche ne soutient pas la version française de la taxe GAFA.
Suite à cette déclaration de l’administration Trump, Matignon a tenu à rappeler à son voisin d’outre-Atlantique par la voix de Bruno Le Maire — actuel ministre de l’Économie — que la France « ;est un État libre et souverain qui décide de sa taxation et qui la décide librement et souverainement ;».
Pour rappel, au début de ce mois, la France a dévoilé un projet de loi qui permettrait d’instaurer une « ;taxe souveraine ;» de 3 % sur le chiffre d’affaires numérique réalisé dans l’Hexagone par les GAFA, à défaut d’un équivalent à l’échelle européenne. Cette nouvelle taxe GAFA adaptée au marché français devrait être rétroactive puisqu’entrant en vigueur à partir du 1er janvier 2019 et toucher « ;toutes les entreprises représentant un chiffre d’affaires supérieur à 750 millions d’euros au niveau mondial et 25 millions d’euros en France ;».
Bruno Le Maire a assuré que la menace étasunienne de saisir l’OMC « ;ne remettait absolument pas en cause le projet de loi [français] qui sera étudié à partir du 4 avril à l’Assemblée nationale ;». Selon lui, « ;le mieux est que nous arrivions à un consensus à l’OCDE ;», précisant que « ;dès qu’il y aura une taxation internationale, la France retirera sa taxe nationale ».
De son côté, le commissaire européen à la Fiscalité, Pierre Moscovici, a déploré « l’attitude agressive » des États-Unis dans cette affaire : « Je ne pense pas que ce soit une façon légitime d’aborder les relations entre alliés ». Il ajoute que « ;la France et d’autres pays sont tout-à-fait légitimes pour décider qu’il existe une taxation nationale de l’activité numérique. Ce n’est pas anti-américain, ce n’est pas protectionniste. C’est juste une question d’équité ».
Désormais, tous les regards sont tournés vers l’OCDE (l’organisation de coopération et de développement économique) où des discussions sont en cours pour parvenir à un accord sur une taxe internationale sur les géants du numérique d’ici à 2020.
Source : Le Figaro, Le Monde
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Le , par Christian Olivier
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