Les initiatives de réglementation accompagnant la révision du cadre européen pour le droit d’auteur dans leur forme actuelle ne semblent décidément pas plaire aux entreprises d’Internet et certaines, à l’instar de Google et de sa filiale YouTube, ne ménagent aucun effort pour le faire savoir et mettre la pression sur les législateurs européens.
En septembre dernier par exemple, Robert Kyncl, Chief Business Officer chez YouTube, a qualifié l’un des articles controversés du projet de réglementation sur le copyright examiné par les instances de l’Union européenne de grossière erreur, précisant qu’il ne faudrait probablement pas laisser un tel projet aboutir. Un mois plus tard, Susan Wojcicki, la CEO de YouTube, est montée au créneau à son tour pour appeler les créateurs de vidéos à protester contre le même article qui, selon elle, menace des milliers d’emplois.
Plus récemment, Richard Gingras, vice-président de Google rattaché aux médias, a déclaré dans un entretien accordé au média The Guardian, que la firme de Mountain View envisage très sérieusement de fermer Google Actualités, son service d’agrégation d’actualité référence les articles derrière paywall, si l’UE s’entête à vouloir taxer les liens sortants.
Pour rappel, dans un effort visant à créer et à encadrer un marché unique du numérique permettant de fondre en un seul les 28 marchés nationaux des pays membres de son organisation, l’UE a élaboré une stratégie axée sur plusieurs initiatives : cybersécurité, droits d’auteur, connexion à haut débit, intelligence artificielle…
Dans le cadre de ce programme, elle a entrepris d’importantes réformes dans le domaine spécifique de la protection des droits d’auteur (copyright), incluant la mise en place d’un règlement relatif au blocage géographique et d’un nouveau cadre légal régissant le droit d’auteur. Cependant, le projet de loi sur le copyright dans le marché unique numérique défendu par la Commission européenne contient deux articles controversés (11 et 13).
L’article 13 propose de rendre obligatoire l’utilisation de technologies de filtrage basées sur les algorithmes afin d’identifier si les contenus téléchargés (textes, images ou vidéos) sont protégés par le droit d’auteur. Les contenus susceptibles d’enfreindre la législation devraient être bloqués de façon automatique afin d’empêcher leur diffusion.
L’article 11, quant à lui, prône l’instauration d’un droit voisin, un droit de créance en cas de republication d’un article soutenu par les éditeurs de presse de l’UE. Il traite du droit de reproduction des publications de presse et de leur accessibilité au public. Il ne s’applique pas aux créateurs d’une œuvre, mais aux personnes et entités participant à sa création. La validation de cet article permettrait de créer une sorte de taxe pour les clics sur les liens hypertextes qui imposera aux services d’agrégation de rémunérer les éditeurs dont ils reprennent le contenu, alors que certains de ses services d’agrégation, Google Actualités en l’occurrence, agissent simplement comme un relai ou une sorte de kiosque gratuit qui se contente de rediriger l’audience.
La filiale d’Alphabet brandit cette menace en connaissance de cause. Elle sait pertinemment que la clôture de Google Actualités aura un impact immédiat sur tous les organes de presse en ligne européens. Richard Gingras a rappelé à ce propos que l’Espagne avait voté une loi similaire, ce qui avait conduit à la fermeture de Google Actualités dans ce pays et entrainé une chute dans les audiences des médias.
La firme de Mountain View a précisé « ;attendre la formulation définitive ;» pour prendre une décision concernant l’avenir de son Google Actualités en Europe. Le Parlement européen, de son côté, doit se prononcer une nouvelle fois en janvier à propos de ces dispositions que certains considèrent déjà comme des « ;taxes aux hyperliens ;».
Source : The Guardian
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Le , par Christian Olivier
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