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Copyright : l'UE sur le point de finaliser une machine de censure et sa taxe sur les liens Internet
Que contiennent ses dernières propositions ?

Le , par Michael Guilloux

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7  0 
Comme nous l'avons rapporté, les gouvernements des États membres de l'Union européenne ont récemment adopté leur position sur la réforme du droit d'auteur, mais sans apporter de changements significatifs au filtrage automatique des téléchargements (uploads) et aux dispositions visant à taxer les liens.

Les informations sur cette directive européenne sur le copyright - un projet de réforme des droits d’auteur dans le cadre du marché numérique unique - ont été divulguées début 2017 par Julia Reda, eurodéputée membre du Parti Pirate (PP). Il s'agit d'un parti politique engagé dans la protection des droits et libertés fondamentales, aussi bien dans le domaine numérique qu'en dehors.

Deux articles dans le texte initial proposé par la Commission européenne avaient particulièrement provoqué pas mal de remous. Le premier, l’article 11, traitait du droit de reproduction des publications de presse et de les rendre accessibles au public. Le second, l’article 13, préconisait d’obliger les services d’hébergement d’œuvres à surveiller les téléversements (uploads) de leurs utilisateurs, en mettant par exemple en place des technologies de filtrage des contenus.

Le Parlement européen et le Conseil de l'UE ont eu plus d'un an et demi pour corriger les lacunes de la proposition de la Commission, mais malgré les discussions qu'ils ont eues, les dernières versions proposées par les deux institutions de l'UE restent encore problématiques.

Les détails du texte adopté par le Conseil qui représente les gouvernements des États membres

Comme le rapporte Julia Reda, la proposition adoptée vendredi dernier par le Conseil de l'UE forcerait les plateformes d'Internet à implémenter des machines de censure. La présidence bulgare du Conseil est d'accord avec l'objectif de la Commission d'obliger les plateformes d'Internet à surveiller tous les téléchargements de leurs utilisateurs dans le but de détecter les violations de droits d'auteur. Mais, les gouvernements des États membres de l'UE sont conscients que cela entraînera nécessairement des suppressions d'actes d'expression totalement légaux, ce qui serait donc en violation de la législation de l'UE et la Charte des droits fondamentaux.

L'astuce utilisée a donc été de supprimer entièrement la protection des plateformes d’Internet qui, aujourd’hui, ne sont pas responsables du contenu que publient leurs utilisateurs. Le texte adopté les gouvernements de l'UE rend ces plateformes directement responsables de toutes les violations de droits d'auteur commises par leurs utilisateurs, puis leur propose d'éviter cette responsabilité si elles peuvent montrer qu'elles ont fait tout ce qui était en leur pouvoir pour empêcher que du contenu protégé soit mis en ligne illégalement par leurs utilisateurs. Et quelle est la meilleure manière de le prouver si ce n'est de déployer des filtres automatiques de téléchargements ?

Ainsi, dans les lignes du texte, les États membres de l'UE n'imposent pas le filtrage automatique des téléversements, ce qui pourrait entrainer des violations de la liberté d'expression. Mais entre les lignes, c'est ce que stipule leur texte, parce que les plateformes d'Internet seront dans l'obligation de filtrer automatiquement les contenus mis en ligne, comme preuve de leur volonté d'éviter la violation des droits d'auteur. « De manière tragique, le seul point de désaccord qui subsiste au Conseil est de savoir si cette proposition est suffisamment mauvaise ou devrait être pire », s'étonne Julia Reda.

Rappelons que cette mesure, propulsée par la France, menace n'importe quel type d'hébergeurs, y compris les plateformes comme GitHub et Wikipédia, ce qu'ont dénoncé Mozilla et la Free Software Foundation.


En plus de créer des machines de censure, le texte adopté par le Conseil de l'UE créerait encore un désordre total en ce qui concerne le copyright pour les éditeurs de presse, en permettant à chaque État membre d'implémenter sa propre version de la taxe sur les liens. On pourrait donc avoir 28 versions différentes si c'est ce texte qui est adopté définitivement.

Cette taxe sur les liens se rapporte au droit de reproduction des publications de presse et de les rendre accessibles au public. D'après Julia Reda, le gouvernement allemand s'oppose à un accord sur les types d'extraits de contenu d'information qui devraient tomber sous coup de la taxe sur les liens et qui devraient donc être soumis à une taxe lorsqu'ils sont partagés. Berlin pense que le fait qu'un extrait constitue une création intellectuelle originale par son auteur ou non ne devrait pas être un critère. Autrement dit, n'importe quel extrait de publication de presse devrait être concerné.

C'est bien une position extrême qui a été adoptée par l'Allemagne et qui ne fait pas l'unanimité. Pour régler la question, la présidence du Conseil de l'UE a proposé que chaque pays décide lui-même. Le partage d'extraits « négligeables » d'un article devrait rester gratuit, mais les États membres doivent clarifier ce qu'ils entendent par « négligeable » : des extraits d'articles qui « ne sont pas l'expression de la création intellectuelle de leurs auteurs » ou des extraits qui n'ont « aucune importance économique indépendante », quelle que soit la longueur.

Rappelons que cela contredit fondamentalement l'objectif de créer un marché numérique unique qui met en avant des règles communes. Au lieu d'une loi européenne unique, on pourrait en avoir 28. Mais les lois extrêmes vont naturellement s'imposer, puisque pour éviter d'être poursuivies, les plateformes d'Internet opérant à l'échelle internationale seraient obligées de se conformer à la version la plus stricte. Selon Julia Reda, on ne sait pas non plus si les simples liens seront affectés. Le problème est que les liens contiennent presque toujours le titre des articles auxquels ils sont associés, et l'on ne peut pas dire actuellement si le titre d'un article peut être considéré comme un extrait « négligeable » au sens du Conseil de l'UE. Cela pourrait donner susciter des batailles juridiques - comme cela a commencé avec l'entrée en vigueur du RGPD - et des années d'incertitude juridique autour des hyperliens, si c'est cette version qui est définitivement adoptée.

Ci-dessous, les positions des différents gouvernements sur les dernières propositions relatives à la taxe sur les liens et le filtrage automatique des téléchargements.


L'état des discussions au niveau du Parlement qui représente les citoyens des États membres

Maintenant que les membres du Conseil de l'UE ont adopté leur position sur la réforme du droit d'auteur, seul le Parlement européen peut les arrêter. Mais quelle est la position de ceux qui sont censés représenter les citoyens de l'Union européenne ?

Ce que révèle l'eurodéputée est que la situation semble pire au niveau du Parlement européen. L'eurodéputé Axel Voss a récemment publié une nouvelle version du texte qu'il souhaite que la commission des affaires juridiques approuve lors de son prochain vote les 20 et 21 juin. Après ce vote, il sera presque impossible de faire des changements significatifs. Mais que propose-t-il ?

La dernière version de M. Voss élargit le champ d'application de la proposition de censure à toutes les plateformes Web dont l'objectif est de « donner accès au contenu protégé mis en ligne par les utilisateurs » et « d'optimiser » ce contenu. Par optimisation, il fait référence à une longue liste d'actions, y compris « l'affichage » des téléchargements. « Et dans sa version, les services Web ne peuvent même pas éviter d'être tenus pour responsables en mettant en œuvre des filtres de téléchargement. Pour se protéger d'une poursuite, ils devraient obtenir des licences de tous les détenteurs de droits existant sur la planète avant de permettre aux téléchargements des utilisateurs d'être mis en ligne, au cas où le téléchargement contiendrait (une partie de) leurs œuvres », explique Julia Reda.

En ce qui concerne la « taxe sur les liens », le texte d'Axel Voss viserait à forcer les médias européens à former un cartel sur lequel tout le monde va s'aligner. Vu que, dans la réalité, les éditeurs de presse semblent avoir intérêt à autoriser les moteurs de recherche et autres plateformes en ligne à partager leur contenu, l'objectif de ce cartel serait de s'assurer qu'aucun média ne puisse accorder des licences gratuites aux moteurs de recherche sur la base que « le fait d'être référencé dans un moteur de recherche ne doit pas être considéré comme une rémunération juste et proportionnée [de l'utilisation des extraits d'articles de presse] ».

Dans les mois à venir, le Conseil de l’UE et le Parlement européen, qui constituent les deux organes législatifs de l’Union européenne, vont travailler pour sortir un texte définitif. Mais ce qu’on voit aujourd’hui laisse croire qu’on a plus ou moins la version définitive de la prochaine loi sur le copyright.

Sources : Julia Reda, Texte du Conseil de l'UE, Texte du Parlement européen

Et vous ?

Qu'en pensez-vous ?
Selon vous, qu'est-ce qui motive les institutions de l'UE à mettre en place de telles mesures ?
Est-ce dans l'intérêt des citoyens de l'Union ?

Voir aussi :

Les moteurs de recherche devraient-ils rémunérer les éditeurs de presse pour afficher leurs articles ? Un projet adopté par les ambassadeurs de l'UE
Ce que l'UE prépare à propos des liens et téléchargements de fichiers sur internet : des actions courantes sur le Web pourraient devenir illégales
UE : la France et deux autres pays militent pour le filtrage automatique des contenus mis en ligne, dans le cadre de la réforme sur le droit d'auteur
Mozilla et la Free Software Foundation condamnent la réforme de l'UE sur le droit d'auteur qui propose un filtrage massif de contenu sur Internet
Google et Facebook sous le coup de 4 accusations dans 4 pays pour avoir enfreint le RGPD, quelques heures seulement après son entrée en vigueur

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Avatar de tomlev
Rédacteur/Modérateur https://www.developpez.com
Le 26/09/2019 à 10:33
Le gouvernement a appelé mercredi à « une véritable négociation globale » entre Google et les agences et éditeurs de presse, jugeant « pas admissible » que le géant américain tente d’échapper aux dispositions de la nouvelle loi française sur les droits d’auteur en modifiant l’affichage des contenus d’actualité.
En quoi ce n'est "pas admissible" ? On demande à Google de payer pour afficher le contenu des articles, il décide de ne pas l'afficher et donc de ne pas payer. Je ne vois pas où est le problème.
19  0 
Avatar de defZero
Membre extrêmement actif https://www.developpez.com
Le 25/09/2019 à 22:28
[LOL]Dans leurs gueules, à tous ces journaux rentier et re-pompeur de contenu [/LOL]
Non, plus sérieusement, loin de moi l'idée de défendre Google de façon générale, mais il faut avoué que sur ce coup là Google à raison.
On leurs demandes de payer pour utiliser de cours extraits et des miniatures.
Google dit ok donc on va arrêter d'utiliser de cours extraits et des miniatures et la dessus le ministre Français et les "ayant droit" viennent ce plaindre qu'il ne vont pas recevoir de rentes .
Je sais pas ce qu'ils fument ces gens mais à mon avis c'est pas légale .
16  0 
Avatar de bk417
Membre actif https://www.developpez.com
Le 25/10/2019 à 14:07
Ils sont gonflés d'inverser les choses.
Ils admettent que Google leur apporte de l'audience mais veulent en plus qu'il les paye, énorme !

Comme si les kiosques devaient payer pour pouvoir vendre des journaux.
Comme si Allociné devait payer pour pouvoir lister les films au cinéma.
Comme si le guide Michelin devait payer les restaurants dont il fait la promotion.
Comme si Autoplus devait payer les constructeurs automobile pour pouvoir parler de leurs voitures.
17  1 
Avatar de Grogro
Membre extrêmement actif https://www.developpez.com
Le 21/06/2018 à 11:02
Citation Envoyé par slowsaz Voir le message
J'aurais juste une question, comment le peuple peut à ce point ne pas être au courant ou n'en avoir rien à faire de ce genre de loi qui les concerne directement en censurant quelque chose qu'ils utilisent tous les jours ?

Comment les gens peuvent aujourd'hui ne plus défendre leurs droits et leurs intérêts comme ils le faisaient à l'époque ?
Tu as vu passer ne serait-ce qu'un seul article dans la presse généraliste toi ? Seule la presse spécialisée à couvert les débats. Omerta la plus complète partout ailleurs.

Alors que cette même presse avait plutôt bien couvert les débats autour de la neutralité d'internet, et particulièrement les péripéties récentes aux USA. Ce silence s'explique clairement par l'article 11. Je pense que l'article 13 aurait été très largement médiatisé autrement.

Quant aux impacts... je pense que le plus évident est que les agrégateurs de news vont fermer partout dans l'UE. Et la même presstituée (désolé pour la formulation outrancière et excessive, mais il n'est plus permis de faire dans la mesure) viendra pleurer ensuite auprès de Maman État parce que leur audience s'effondrera. Et réclamera sans doute de bloquer les sites de news qui n'auront pas eu le sceau du CSA ?

Je pense également que l'UE(RSS) va devenir un repoussoir pour l'industrie de l'informatique. Que les hébergeurs vont massivement quitter le territoire vers des cieux un peu moins anti-business.
14  0 
Avatar de AndMax
Membre éprouvé https://www.developpez.com
Le 14/09/2018 à 19:14
Citation Envoyé par Sodium Voir le message
L'article original (https://www.mayoclinic.org/healthy-l...e/art-20045678) fait plusieurs centaines de mots et quelqu'un a passé du temps à l'écrire. Googe en extrait juste assez pour que l'utilisateur n'ait jamais à cliquer sur le lien.
Encore une fois, c'est un droit de courte citation. Tu as trouvé ce lien grâce à un moteur de recherche que tu as choisi d'utiliser et toi, tu as cliqué dessus. Sans le travail d'indexation de milliards de pages web que font les moteurs de recherche, comment ferais-tu pour trouver le site ?

Bing fait la même chose avec ses réponses: 3 lignes de texte au dessus de chaque lien. Qwant aussi, et même là en 2 lignes, si la recherche/requête était bien formulée, pas besoin de cliquer sur le lien pour voir une réponse "simple". Le site reste par contre indispensable si tu veux des détails... de quand date l'étude sur le café, qui a fait l'étude, comment c'est mesuré, etc...

On peut effectivement pousser les moteurs de recherche à revenir aux réponses des années 90: juste le titre, un début de ligne et le lien (genre le AltaVista de l'époque), mais dans ce cas combien de temps perdras-tu à trouver des informations, et réduire le droit de citation à un droit de citation méga court, est-ce que ça résoudra le problème de ceux qui veulent ces droit d'auteurs ?

Ou veux-tu que le moteur paie tous les sites indexés ? Ce sera juste une énorme usine à gaz.

Et pour finir, en quoi le texte débile voté cette semaine résoudra-t-il ces questions ?
13  0 
Avatar de Grogro
Membre extrêmement actif https://www.developpez.com
Le 13/06/2018 à 11:29
J'en pense qu'entre la révocation de la neutralité d'internet par les USA et cette directive ubuesque, la menace contre le web n'a jamais été aussi importante, et jamais accueillie dans un silence médiatique aussi assourdissant, même lors des précédentes crises (ACTA, SOPA, PIPA, etc). Il y avait un activisme considérable à l'époque, cette année, rien. Silence complet, pas la moindre réaction, pas le moindre suivi médiatique en dehors de la presse spécialisée. C'est affolant je trouve.

Et le tableau devient bien plus sombre encore quand on prend en compte les menaces plus spécifiquement françaises que sont la loi contre les "fakes news" et la loi sur le secret des affaires.
12  0 
Avatar de mm_71
Membre chevronné https://www.developpez.com
Le 22/06/2018 à 10:29
Citation Envoyé par slowsaz Voir le message
J'aurais juste une question, comment le peuple peut à ce point ne pas être au courant ou n'en avoir rien à faire de ce genre de loi qui les concerne directement en censurant quelque chose qu'ils utilisent tous les jours ?

Comment les gens peuvent aujourd'hui ne plus défendre leurs droits et leurs intérêts comme ils le faisaient à l'époque ?
La politique des dirigeants consiste justement à créer des multitudes de problèmes en tous genres pour détourner l'attention et faire en sorte que l'on n'arrive même plus à décider sur quoi ou qui il faut taper.
Ça leur permet de multiplier les atteintes aux libertés individuelles et publiques en toute sérénité car même si il y-a une multitude de protestataires ils se retrouvent divisés en catégories pas vraiment représentatives dans un domaine spécifique.
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Avatar de Charvalos
Membre éprouvé https://www.developpez.com
Le 05/07/2018 à 22:32
Il n'y que moi que cela fait rire de les voir se plaindre du lobbying ? C'est un peu l'histoire de l'arroseur arrosé.
12  0 
Avatar de Cpt Anderson
Membre émérite https://www.developpez.com
Le 06/07/2018 à 9:16
Les parlementaires français ont voté à 88% pour le oui. Quelle bande de pourris...La suède 0%.
12  0 
Avatar de Garvelienn
Membre éprouvé https://www.developpez.com
Le 06/07/2018 à 9:30
Citation Envoyé par Cpt Anderson Voir le message
Les parlementaires français ont voté à 88% pour le oui. Quelle bande de pourris...La suède 0%.
Et avec la Roumanie et le Bulgarie qui nous suivent de près... Vous la sentez la corruption en France, vous ? Car ça sent vraiment fort.

Pardon à tous les européens pour notre pays géré par des cancres.

/** c'était le coup de gueule de Garvelienn **/

edit: remplacez "corruption" par "lobbying" , ça sera politiquement correct.
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