Nous avons tendance à considérer notre sens du toucher comme acquis dans la vie quotidienne, mais il est vital pour notre capacité à interagir avec notre environnement. Imaginez que vous alliez chercher un œuf dans le réfrigérateur. Lorsque vos doigts touchent sa coquille, vous pouvez dire qu'il est froid, que sa coquille est lisse et avec quelle fermeté vous devez le saisir pour ne pas l'écraser. Ce sont des capacités avec lesquelles les robots, même ceux qui sont directement contrôlés par l'homme, peuvent avoir du mal. Des scientifiques ont mis au point une peau artificielle qui confère aux robots un sens du toucher similaire à celui des humains. Cette peau permet aux robots de détecter la température, la pression et même la toxicité d'un objet. Les applications de cette technologie vont de la détection d'une source de pollution dans une rivière à la "détection" de traces d'explosifs sur un bagage suspect dans un aéroport.
« Les robots modernes jouent un rôle de plus en plus important dans la sécurité, l'agriculture et la fabrication. Pouvons-nous donner à ces robots le sens du toucher et le sens de la température ? Pouvons-nous également leur faire détecter des produits chimiques comme les explosifs et les agents neurotoxiques ou des risques biologiques comme les bactéries et les virus infectieux ? Nous travaillons sur ce sujet », explique Gao.
La peau
Une comparaison côte à côte d'une main humaine et d'une main robotisée révèle des différences flagrantes. Alors que les doigts humains sont doux, spongieux et charnus, les doigts robotiques ont tendance à être durs, métalliques, plastiques ou caoutchouteux. La peau imprimable développée dans le laboratoire de Gao est un hydrogel gélatineux qui rend le bout des doigts des robots beaucoup plus semblable aux nôtres. Les capteurs qui permettent à la peau artificielle de détecter le monde qui l'entoure sont intégrés dans cet hydrogel. Ces capteurs sont littéralement imprimés sur la peau de la même manière qu'une imprimante à jet d'encre applique du texte sur une feuille de papier. « L'impression à jet d'encre a cette cartouche qui éjecte des gouttelettes, et ces gouttelettes sont une solution d'encre, mais elles pourraient être une solution que nous développons à la place de l'encre ordinaire. Nous avons développé une variété d'encres de nanomatériaux pour nous-mêmes », explique Gao.
Après avoir imprimé un échafaudage de fils de nanoparticules d'argent, les chercheurs peuvent ensuite imprimer des couches de capteurs à l'échelle micrométrique qui peuvent être conçus pour détecter une variété de choses. Le fait que les capteurs soient imprimés permet au laboratoire de concevoir et d'essayer plus rapidement et plus facilement de nouveaux types de capteurs. « Lorsque nous voulons détecter un composé donné, nous nous assurons que le capteur a une réponse électrochimique élevée à ce composé. Le graphène imprégné de platine détecte l'explosif TNT très rapidement et de manière sélective. Pour un virus, nous imprimons des nanotubes de carbone, qui ont une très grande surface, et nous y fixons des anticorps pour le virus. Tout cela peut être produit en masse et mis à l'échelle », explique Gao.
Un système interactif
L'équipe de Gao a couplé cette peau à un système interactif qui permet à un utilisateur humain de contrôler le robot par ses propres mouvements musculaires tout en recevant un retour d'information de la peau du robot sur celle de l'utilisateur. Cette partie du système utilise des pièces imprimées supplémentaires, en l'occurrence des électrodes fixées à l'avant-bras de l'opérateur humain. Les électrodes sont similaires à celles utilisées pour mesurer les ondes cérébrales, mais elles sont positionnées de manière à détecter les signaux électriques générés par les muscles de l'opérateur lorsqu'il bouge sa main et son poignet. Un simple mouvement du poignet humain indique au bras robotique de monter ou de descendre, et le fait de serrer ou d'écarter les doigts humains provoque une action similaire de la part de la main robotique. « Nous avons utilisé l'apprentissage automatique pour convertir ces signaux en gestes pour le contrôle robotique. Nous avons entraîné le modèle sur six gestes différents », explique Gao.
Le système fournit également un retour d'information à la peau humaine sous la forme d'une très légère stimulation électrique. Pour reprendre l'exemple du ramassage d'un œuf, si l'opérateur serre trop fort l'œuf avec la main robotique et risque d'écraser sa coquille, le système l'avertit par ce que Gao décrit comme « un petit picotement » sur la peau de l'opérateur.
Wei Gao espère que le système trouvera des applications dans tous les domaines, de l'agriculture à la sécurité en passant par la protection de l'environnement, en permettant aux opérateurs de robots de « sentir » la quantité de pesticides appliquée sur un champ de cultures, de savoir si un sac à dos suspect laissé dans un aéroport contient des traces d'explosifs ou de localiser une source de pollution dans une rivière. Mais il veut d'abord apporter quelques améliorations. « Je pense que nous avons démontré une preuve de concept. Mais nous voulons améliorer la stabilité de cette peau robotique pour qu'elle dure plus longtemps. En optimisant de nouvelles encres et de nouveaux matériaux, nous espérons qu'elle pourra être utilisée pour différents types de détections ciblées. Nous voulons l'appliquer à des robots plus puissants et les rendre plus intelligents », dit-il.
Source : Science robotics
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