Les États-Unis vont suspendre le plan visant à frapper de droits de douane 1,3 milliard de dollars de biens français en représailles à la taxe du pays européen sur les revenus des entreprises technologiques mondiales (dont beaucoup sont américaines), afin de désamorcer le différend commercial transatlantique, deux semaines seulement avant que le président Donald Trump ne quitte son poste.
« Le représentant américain au commerce a décidé de suspendre les droits de douane à la lumière de l'enquête en cours sur les Digital service Tax (DST) similaires adoptées ou envisagées dans 10 autres juridictions. Une suspension de l'action tarifaire dans l'enquête sur la DST en France favorisera une réponse coordonnée dans toutes les enquêtes en cours sur la DST, a-t-il déclaré dans un communiqué jeudi, en référence aux taxes sur les services numériques ». La taxe de 25 %, qui devait entrer en vigueur mercredi à minuit, aurait touché les produits français de marque tels que les sacs à main, le savon et le maquillage.
L'Union européenne et les États-Unis tentent déjà de régler un différend sur les avions qui a vu les deux parties frapper de droits de douane leurs exportations respectives, pour un montant de 11,5 milliards de dollars. « Nous prenons note de la décision de l'administration américaine", a déclaré le ministre français des Finances, Bruno Le Maire. « Nous estimons que ces sanctions sont illégitimes au regard du droit de l'OMC. Une fois de plus, nous appelons à un règlement global des différends commerciaux entre les États-Unis et l'Europe, dans lequel tout le monde est perdant, surtout en cette période de crise », a-t-il ajouté.
Cette opposition n'est qu'un symptôme d'un conflit mondial sur la manière de taxer les entreprises technologiques telles qu'Amazon et Facebook. Près de 140 pays négocient depuis plusieurs années une refonte du système international, mais ils se sont heurtés à plusieurs reprises à des questions telles que l'opportunité de protéger les entreprises numériques, la répartition des bénéfices entre les différents pays et le caractère contraignant des nouvelles règles.
L'Union européenne est prête à explorer « toutes les options » si les États-Unis vont de l'avant avec des mesures tarifaires, a déclaré Valdis Dombrovskis, vice-président exécutif pour l'économie et commissaire au commerce pour le bras exécutif du bloc. « Plus généralement, nous sommes prêts à travailler de manière constructive avec les États-Unis pour trouver une solution globale et opportune à la taxation équitable du secteur numérique », a-t-il déclaré sur son compte Twitter.
La France a mis en place sa taxe sur les revenus numériques en 2019 pour faire pression sur les négociations afin de faire avancer les choses, mais les États-Unis ont déclaré que cette mesure unilatérale visait injustement les entreprises américaines.
Ce sursis donne au président élu Joe Biden et à sa candidate au poste de chef du commerce, Katherine Tai, le temps de travailler avec la France et d'autres pays pour trouver une solution multilatérale, a déclaré la Coalition des industries de services.
La présidente de la coalition of services industries (CSI), Christine Bliss, a également exhorté la France et les autres pays cités dans l'enquête du bureau du représentant américain au commerce à suspendre l'imposition des DST et à continuer à travailler pour trouver une solution. Les pays participant aux pourparlers ont convenu en octobre dernier de poursuivre les négociations jusqu'à la mi-2021, après que les discussions se sont enlisées en raison de la réticence de Washington à signer un accord international avant l'élection présidentielle américaine.
Mercredi, le représentant américain au commerce a déclaré qu'il avait constaté que les taxes sur les services numériques adoptées par l'Inde, l'Italie et la Turquie étaient également discriminatoires à l'égard des entreprises américaines et incompatibles avec les principes fiscaux internationaux, mais il a reporté l'annonce de toute mesure tarifaire spécifique. Ces enquêtes font partie de plusieurs enquêtes actives du bureau du représentant américain au commerce qui pourraient conduire à des tarifs avant que le président Donald Trump ne quitte son poste ou au début de l'administration Biden.
En janvier 2020, le président Emmanuel Macron et son homologue américain Donald Trump ont convenu d'une trêve dans leur différend afin de laisser le temps aux négociations internationales de parvenir à un accord global, mais les pourparlers ont échoué en octobre et la France a repris la perception de la taxe à la mi-décembre. Le Maire a à son tour reproché aux États-Unis de bloquer les négociations avec des exigences qui sont inacceptables pour d'autres. L'UE commencera cette année à travailler sur une taxe pour l'ensemble du bloc en cas d'échec des négociations coordonnées par l'Organisation de coopération et de développement économique.
Sources : Twitter, Reuters
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Le , par Nancy Rey
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