
En plus des améliorations apportées au niveau de l’ergonomie et du contenu, TousAnticovid a reçu une implication particulière de la part du gouvernement dans la promotion de l’application. En effet, le gouvernement français a envoyé un SMS à tous les Français afin de les encourager à télécharger et à activer TousAntiCovid. Si l’application TousAntiCovid donne déjà des résultats prometteurs après quelques semaines d’utilisation, quel est le bilan que l’on peut faire de son ancêtre StopCovid qui a fonctionné pendant plus de 5 mois et n’a récolté que 2,5 millions d’utilisateurs ?
Avant le déploiement de StopCovid, Cédric O, le Secrétaire d’État chargé de la transition numérique et des Communications électroniques déclarait que si l’application était adoptée par 56 % de la population, elle mettrait fin à l’épidémie. Cet objectif étant difficilement réalisable, Cédric O ajouta que « si on a 20 % ou 30 % des populations des grandes villes, c’est très bien. En termes de gain marginal, c’est non négligeable, c’est même très utile ». Mais après un peu moins de six mois d’utilisation, la réalité est tout autre. À peine 3,5 % de la population (2,5 millions d’utilisateurs) ont installé StopCovid, tandis qu’elle a enregistré 1 million de désinstallations et 300 000 réinstallations. Il est clair qu’avec de tels chiffres, il ne fallait vraiment pas s’attendre à grand-chose.
Pour certains, ce fiasco était prévisible. En effet, le 23 juin, c’est-à-dire trois semaines après la mise à la disposition du public de StopCovid, Cédric O a présenté les premiers chiffres de StopCovid qui s’avéraient décevants, selon certains sénateurs. Pour Loïc Hervé, sénateur français, les chiffres communiqués confirment les doutes exprimés dès le début sur l’opportunité même du déploiement d’une telle application de suivi des contacts :
- L’adoption par la population française reste minime (1,9 million de téléchargements seulement, auxquels il faut même retrancher 460 000 désinstallations), ce qui contraste fortement avec la situation en Allemagne (près de 7 millions de téléchargements le jour de son lancement pour l’application développée par les autorités sanitaires), pays pourtant moins touché que le nôtre par l’épidémie ;
- l’utilité sanitaire concrète à ce jour semble bien négligeable ; seules 68 personnes ont fait une déclaration de test positif via l’application, et avec seulement 14 utilisateurs avertis d’un risque de contact avec une personne contaminée, « StopCovid » apparaît bien comme un rendez-vous manqué ;
- réduisant encore son efficacité, le dispositif reste un des rares en Europe qui ne sera probablement pas interopérable avec les autres applications développées par nos partenaires européens, en raison du choix minoritaire d’une architecture technologique centralisée (selon les informations de la Commission européenne, seules la Hongrie, la Norvège et la Slovaquie auraient fait un choix comparable) ;
- si le protocole et le système applicatif ont été développés dans des conditions de délais exceptionnelles et grâce à la participation largement bénévole des équipes de chercheurs et d’informaticiens associées au projet, le fonctionnement normal de l’application et la maintenance des serveurs semblent désormais particulièrement coûteux (environ 200 000 € par mois), et ce d’autant plus au regard de ses maigres résultats ;
Dans ces 200 000 euros par mois, il faut inclure 40 000 euros pour l’hébergement, 80 000 euros pour la maintenance et les développements et, en option, 50 000 euros pour l’appui au support utilisateur ainsi que 30 000 euros de dépenses liées au déploiement. Nous précisons que lors de son audition devant le Sénat, Cédric O avait déclaré que l’application ne coûterait que « quelques centaines de milliers d’euros par mois ».
Récemment, les députés français Julien Borowczyk (LREM) et Eric Ciotti (LR) ont fourni un rapport qui montre avec plus de précisions qu’en plus d’avoir été un fiasco (« 5 553 tests positifs ont été scannés dans l’application qui a émis seulement 346 alertes, dont 296 ont été effectivement transmis »), StopCovid a été un gouffre financier. Après avoir auditionné les acteurs impliqués dans la conception et la maintenance de StopCovid, les députés ont révélé qu’en cinq mois d’existence (du 3 juin au 22 octobre), StopCovid a englouti 6,5 millions d’euros TTC. Pour son développement seulement, l’État français a dû débourser 2,5 millions d’euros TTC qui incluent les frais suivants :
- Exploitation : 1 128 000 euros TTC/an ;
- licences : 69 876 euros TTC/an ;
- support utilisateur : 720 000 euros TTC/an ;
- animation du déploiement : 432 000 euros TTC/ans ;
- hébergement : 576 000 euros TTC/an.
En plus de ces coûts liés au développement de StopCovid, le gouvernement français a dû décaisser 2 793 000 euros TTC pour assurer sa campagne de lancement.
Au-delà de ces dépenses, il faut préciser que StopCovid a été conçue avec des défauts qui ont scellé son sort d’avance. L’application souffre d’un manque d’interopérabilité avec les applications développées au sein de l’Union européenne, ce qui fait que hors de la France, elle devient inutile pour le suivi des contacts. De même, comme son successeur TousAntiCovid, StopCovid sur un téléphone iOS n’arrive pas à communiquer avec un autre iPhone utilisant StopCovid, lorsque les applications tournent en arrière-plan. En comparant les investissements et les résultats obtenus, le rapport des députés n’a pas manqué de souligner que l’application a été d’une « inutilité sanitaire manifeste ».
Pour certains utilisateurs, les montants déboursés pour StopCovid sont justifiés au regard de toutes les ressources (personnes et infrastructures cloud) qu’il a fallu mobiliser en très peu de temps pour développer une application qui supporte des millions d’utilisateurs. Pour d’autres par contre, il aurait fallu ne même pas avoir entamé le d...
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