
Après examen de la plainte, l'Union européenne décidera d'ouvrir ou non une enquête sur les pratiques de Microsoft.
Mais le grand gagnant de cette guerre pourrait bien être Google
Après avoir soutenu pendant des mois que Microsoft Teams n'était pas un véritable concurrent de Slack et ressemblait davantage à Zoom, Slack a finalement admis ce qui était clair depuis le début : Microsoft Teams est un concurrent et Slack a du mal à rivaliser avec Microsoft. Ce n’est pas un aveu surprenant, mais si Slack a du mal à rivaliser avec Microsoft, il devra faire face à une concurrence encore plus sévère une fois que Google aura enfin pris ses marques. Après avoir cherché a faire populariser des applications de communication pendant des années, il y a des signes qui indiquent que Google est désormais prêt à affronter Slack, Microsoft Teams et Zoom.
La stratégie de Google au sein des entreprises a d'énormes implications sur la bataille antitrust que Slack voudrait engager contre Microsoft en Europe. Slack va devoir faire face à deux grandes entreprises technologiques qui profitent de la domination de leurs produits pour prendre une part importante du secteur des communications sur le lieu de travail. Si Slack parvient à convaincre l'UE de prendre des mesures contre l'offre groupée de Microsoft, elle est toujours confrontée à la menace imminente de Google qui regroupe ses propres applications et services de la même manière.
En fait, la plainte relative à la concurrence de Slack vise uniquement Microsoft et se concentre sur le fait que l'éditeur ait regroupé ses offres Teams et son abonnement Office 365 : « Ce que nous demandons, c'est que Teams soit séparé de la suite Office et vendu séparément avec un prix commercial équitable associé à celui-ci afin qu'il y ait une véritable concurrence sur le mérite avec notre produit », a expliqué David Schellhase, responsable juridique de Slack.
Microsoft a regroupé une variété d'applications de productivité avec sa suite Office pendant des décennies et a choisi d'ajouter Teams gratuitement aux clients d'Office 365 lors de son lancement en 2016. Cet ensemble, associé à une intégration étroite d'Office, a rendu difficile pour Slack de convaincre les entreprises qui paient déjà Office de payer un supplément pour obtenir Slack.
Mais Google semble prêt à reproduire cette stratégie avec G Suite, sa suite d'outils et de logiciels de productivité de type Cloud computing et de groupware destinée aux professionnels qu'il propose sous la forme d'un abonnement. G Suite, qui inclut des services comme Gmail, Drive, des outils comme Google Docs, Sheets, Form, Slides, ainsi que les services de communication comme Hangouts Chat et Meet (concurrents directs de Slack et de Microsoft Teams) a franchi le cap des deux milliards d'utilisateurs actifs par mois en mars 2020 (bien que le nombre d'utilisateurs payants a franchi le cap des six millions d'utilisateurs en avril 2020 et était de 5 millions en février 2019). Javier Soltero, patron de G Suite depuis octobre, a déclaré à ce moment que « changer la façon dont les gens travaillent est quelque chose pour lequel nous sommes particulièrement bien placés ».
Soltero est arrivé chez Google récemment après une carrière de quatre ans chez Microsoft, une société qu'il a rejointe à l'origine lorsque la grande enseigne a fait l'acquisition d'Acompli, qui est ensuite devenu Outlook pour iOS. Il a déjà démontré son expertise pour repérer les tendances et combler les lacunes avec des applications et des services suffisamment bons pour que Microsoft les acquière. S'il peut le répéter chez Google, alors Slack a un autre concurrent avec d'énormes dimensions prêt à regrouper et à tirer parti de ses applications de communication et de productivité populaires.
Google a déjà montré qu'il se rapprochait du terrain de Zoom, Microsoft Teams et Slack. Google a rendu Meet gratuit plus tôt cette année, son outil « premium » de vidéoconférence qui était réservé aux entreprises, pour tenter de contrer Zoom qui a gagné en popularité durant le confinement.
Concrètement, avec Google Meet, le grand public aura accès, sur ordinateur, iOS et Android, à :
- la possibilité de faire un direct avec jusqu’à 100 000 téléspectateurs pour les clients G Suite
- un affichage « mosaïque » qui permet de voir 16 personnes à la fois
- la possibilité d’avoir jusqu’à 100 personnes par appel (250 pour les entreprises)
- des sessions d’une durée illimitée pendant cette période (qui reviendront à leur limite de 60 minutes après le 30 septembre) ;
- la possibilité de partager son écran pour faire une présentation
- des sous-titres en temps réel grâce à l’intelligence artificielle
- la possibilité d'intégrer des vidéos YouTube dans la discussion, afin de les regarder tous en même temps.
Google a également commencé à intégrer profondément l'application de vidéoconférence dans Gmail et Google Agenda. La prochaine étape vers une véritable concurrence entre Slack et Teams est le travail initial de Google pour intégrer Google Chat, Rooms et Meet dans Gmail. Cela n'arrivera que plus tard cette année, mais c'est clairement une grande priorité chez Google.
À ce propos, Soltero a expliqué :
« Les gens nous disent qu'ils se sentent surchargés avec trop d'informations et trop de tâches sur trop d'outils différents. Au lieu d'apprendre un autre outil, nous avons besoin que les outils que nous utilisons déjà soient encore plus utiles et travaillent ensemble, de manière intégrée et intuitive. C'est pourquoi aujourd'hui, nous introduisons un meilleur foyer pour le travail. G Suite rassemble désormais intelligemment les personnes, le contenu et les tâches dont vous avez besoin pour tirer le meilleur parti de votre temps. Nous intégrons des outils de base tels que la vidéo, le chat, le courrier électronique, les fichiers et les tâches, et les améliorons ensemble, afin que vous puissiez plus facilement rester au courant des choses, où que vous soyez ».
La menace tapie dans l'ombre ?
Si Google peut vraiment fournir une plateforme de communication plus cohérente qui fusionne les e-mails, les chats et les appels vidéo en une seule expérience, alors c'est une menace aussi grande pour Slack que pour Microsoft Teams.
Slack semblait hésitant quant à la menace imminente de Google et pourquoi il considère le fait que cette approche d'un groupement des outils Google est moins menaçante que l'approche de Microsoft. « Google et Microsoft sont différents », a déclaré Schellhase, répondant à une question sur les raisons pour lesquelles le travail de Microsoft avec Teams est différent de l'approche récente de Google. « Microsoft occupe une position dominante avec la suite de productivité Office et tous les logiciels auxiliaires. Il n’existe pas de loi contre la position dominante, mais il existe des lois sur la manière dont les entreprises qui détiennent une part de marché dominante doivent se comporter. Une chose qu’ils ne peuvent pas faire est de lier un nouveau produit indépendant au produit dominant qu’ils ont. »
Si nous nous penchons du côté des chiffres bruts entre la portée ou la domination de Google et de Microsoft, Office est utilisé par environ 1,2 milliard de personnes, et Google indique que G Suite est utilisé par 2 milliards de personnes. La principale différence entre ces chiffres est que la grande majorité des personnes qui utilisent Office l'utilisent dans le cadre d'une licence de travail ou d'un abonnement, alors que l'écrasante majorité de ce que Google appelle les utilisateurs de G Suite sont les quelque 1,5 milliard d'utilisateurs de Gmail qui ne le sont probablement pas. Tous n'utilisent pas le service pour le travail. Jusqu'à présent, Google ne s'est pas concentré à convertir ces utilisateurs de la version gratuite en clients d'entreprise. Cependant, lorsque l'entreprise le fera, elle pourrait devenir un acteur majeur plus ou moins rapidement.
Microsoft domine le lieu de travail avec Office, mais Google domine clairement l'utilisation des e-mails, de la recherche et des services comme YouTube par les consommateurs. Les services gratuits de Google sont également utilisés pour le travail. Cela est particulièrement vrai dans l'éducation, où G Suite et les Chromebooks continuent de prendre le contrôle des salles de classe aux États-Unis. La capacité de Google à regrouper et à intégrer Meet à Gmail devrait toujours être une source de préoccupation pour Slack, même si l'entreprise n'est pas prête à l'admettre ou à se battre pour le moment.
La réponse de Microsoft
On ne sait toujours pas si la Commission européenne va même enquêter officiellement sur la plainte de Slack. Nous aurons probablement des mois d'incertitude jusqu'à ce qu'une décision soit prise, et ce sont des mois clés à venir pour Microsoft, Google, Slack, Zoom et bien d'autres qui se battent pour la manière dont les entreprises et le milieu universitaire communiquent.
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