À mesure que les jours se succèdent, on en sait un peu plus sur l’affaire concernant les deux crashs des Boieng 737 Max survenus en octobre et mars dernier. Même si le PDG de Boeing, Dennis Muilenburg, continue d’accuser les personnes qui étaient aux commandes des aéronefs lors de l’occurrence des deux crashs, il n’en demeure pas moins que les informations collectées jour après jour montrent avec plus de précision que Boeing a des choses à se reprocher dans cette affaire.
Selon les conclusions préliminaires des enquêteurs, le coupable devrait être recherché au niveau du système mis en place par Boeing pour éviter à l’appareil de décrocher. Nous rappelons que sur ce modèle amélioré du Boeing 737, Boeing a ajouté des turboréacteurs plus imposants afin de permettre à l’appareil de concurrencer l’A 320neo tant au niveau de l’autonomie que du rendement énergétique. Mais ces modifications ont changé le comportement de l’aéronef en vol, en le faisant cabrer lorsque l’appareil subit un angle d’attaque élevé. Boeing a tenté de corriger ce comportement avec son nouveau système anti-décrochage nommé le MCAS (Maneuvering Characteristics Augmentation System).
Après les crashs des deux appareils, les enquêtes en cours ont permis de mieux comprendre le fonctionnement du MCAS. En principe, pour assurer le fonctionnement optimal du système anti-décrochage, le système MCAS doit être couplé à des capteurs d’angle d’attaque et un voyant lumineux qui s'active lorsque le MCAS qui s’appuie sur les données des capteurs d’angle renvoie des données contradictoires. Mais après avoir mis le Boeing 737 Max à la disposition du public, il a été rapporté que Boeing a rendu un second indicateur d’angle ainsi que le voyant lumineux d’alerte de dysfonctionnement du MCAS payants.
Selon le New York Times (NYT), lorsque Boeing a commencé à livrer son 737 Max à ses clients en 2017, la société était convaincue que le voyant d’alarme de désaccord AOA était une caractéristique standard de tous les nouveaux avions à réaction. Toutefois, quelques mois après le vol des avions, les ingénieurs de la société ont compris que le voyant lumineux ne fonctionnait que sur les avions dont les clients avaient acheté un indicateur facultatif différent. Fondamentalement, cela signifiait qu’une caractéristique de sécurité que Boeing considérait comme standard était en réalité un complément premium. Dans un communiqué paru dimanche dernier, Boeing a expliqué sa confusion au sujet du voyant d’alerte qui ne fonctionnait pas comme il souhaitait avec le logiciel du système d’affichage du 737 Max.
Selon les déclarations de Boeing, le logiciel fourni à Boeing a lié l’alerte de désaccord AOA à l’indicateur AOA. Ce qui impliquait que le logiciel n’activait l’alerte de désaccord AOA que si une compagnie aérienne avait acheté en option l’indicateur AOA. Selon le NYT, ce manque initial de connaissances sur les fonctionnalités de l’appareil, ainsi que la publication différée, ajoutent des inquiétudes concernant la gestion de la conception du 737 Max par Boeing. Les révélations s'ajoutent aux problèmes croissants de Boeing, qui incluent des relations délabrées avec les compagnies aériennes et les clients, de multiples enquêtes fédérales, des coûts financiers croissants et le travail restant à accomplir pour que le Max vole à nouveau.
Après avoir réalisé les défauts liés aux capteurs et au MCAS, Boeing a commencé à travailler sur une mise à jour pour dissocier l’alerte de l’indicateur, vu que l’alerte ne pourrait pas fonctionner sans l’indicateur de désaccord AOA. Si l’on s’en tient à cela, les appareils d’Éthiopian Airlines et Lion Air qui ne disposaient pas de l’indicateur vendu en option ne pouvaient pas avoir d’alerte concernant les données erronées renvoyées par le capteur d’angle d’attaque. Il est bon également de préciser que seulement 20 % des clients avaient acheté l’indicateur facultatif, lors de la survenue des crashs.
Après avoir découvert la défaillance en 2017 du système MCAS et des composants manquants, Boeing a procédé à un examen interne et a déterminé que l’absence de voyant d’avertissement « n’avait pas d’incidence négative sur la sécurité ou l’exploitation de l’avion », a-t-il déclaré dans son communiqué. En conséquence, Boeing a déclaré qu’il n’avait pas informé les compagnies aériennes ou la Federal Aviation Administration (FAA) de cette erreur pendant un an. Ce n’est qu’après le crash du vol 610 de Lion Air en octobre dernier que Boeing a discuté de la question avec la FAA.
En novembre dernier, Boeing a eu une réunion avec les pilotes d’American Airlines (qui avait acheté l’extension). D’après le NYT, Boeing a déclaré aux pilotes que l’alerte de désaccord fonctionne au sol et les préviendrait des problèmes s’il y avait un souci avant le décollage. « On nous a dit que si l’indicateur et les capteurs AOA, comme sur Lion Air, présentaient une différence énorme, nous serions alertés au sol et donc ne décollerions même pas », a déclaré Dennis Tajer, porte-parole du syndicat des pilotes d’American Airlines. « Cela nous a donné une confiance supplémentaire pour continuer à piloter cet avion », ajoute-t-il. Mais ces dernières semaines, Boeing aurait avancé quelque chose de différent. Selon Tajer, la compagnie a affirmé récemment que « le système n’en avertirait les pilotes de tout désaccord sur les capteurs avant que si l’avion est à 400 pieds au-dessus du sol ». Un porte-parole de Boeing l’a confirmé, soulignant que l’alerte de désaccord ne fonctionnait pas au sol et n’aurait donc pas pu alerter les pilotes de Lion Air d’un capteur défectueux avant le décollage. M. Tajer a déclaré que Boeing semblait avoir « fourni des informations inexactes » et que les pilotes avaient demandé des éclaircissements à la compagnie. Tajer, qui est également un pilote 737, s’est dit préoccupé par le fait que Boeing ne semblait pas comprendre parfaitement le fonctionnement de chaque aspect du 737 Max. « Vous feriez mieux de commencer à connaître les choses sur l’avion que vous construisez et vendez, car ma vie et les passagers que je transporte en toute sécurité à travers le monde en dépendent », a déclaré M. Tajer.
Source : NYT
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Le , par Olivier Famien
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