
Le Sénat l'avait rejeté une première fois en juillet dernier, puis une seconde fois le 6 novembre dernier jugeant qu'il n'y avait « pas lieu de délibérer » sur les deux propositions de loi très controversées destinées à lutter contre les fausses nouvelles en période électorale. Ces deux propositions de loi – l'une ordinaire et l'autre organique – visent à permettre à un candidat ou parti de saisir le juge des référés pour faire cesser la diffusion de « fausses informations » sous 48h durant les trois mois précédant un scrutin national. Elles touchent également à l'organisation des pouvoirs publics et donnent un pouvoir accru au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). En vertu de cette loi, le gendarme de l'audiovisuel pourra par exemple se permettre de suspendre la diffusion d'une chaîne étrangère en période électorale ou résilier sa convention, sous certaines conditions. En plus du pouvoir accru du CSA, les deux propositions de loi imposent aux plateformes numériques des obligations de transparence lorsqu'elles diffusent des contenus sponsorisés. Ces obligations incluent le fait de décliner l'identité des annonceurs et le montant de la contrepartie financière.
La réaction suite à l’adoption par l’Assemblée nationale
Le lendemain de son adoption par l'Assemblée nationale, soit le 21 novembre, le Conseil constitutionnel a été saisi par près de 140 sénateurs issus des Républicains (LR) et de l'Union centriste – comprenant entre autres le MoDem ou l'UDI – qui ont soutenu la démarche auprès des Sages. Ces élus ont contesté l'adoption définitive le 20 novembre par l'Assemblée nationale de la proposition de loi ordinaire contre la manipulation de l'information en période électorale en ce qu'elle « porte une atteinte à la liberté d'expression et de communication qui n'est pas nécessaire, adaptée et proportionnée ». Ceux-ci considèrent que la loi sur la liberté de la presse de 1881 suffit à encadrer les éventuelles pratiques délictueuses, avec la mise en place de sanctions pour certaines dérives comme la diffamation.
Selon l'AFP, qui a pu avoir copie du recours des sénateurs, ceux-ci mettent en cause deux mesures de la proposition de loi : d'une part, la possibilité de saisir un juge en référé pour faire cesser la diffusion de «fausses informations» sous 48 heures, et d'autre part, la création d'un délit en cas de non-respect des nouvelles obligations de transparence imposées aux plateformes numériques (Facebook, Twitter, etc.).
Pour leur première objection, les sénateurs s'interrogent : «Comment le juge des référés pourrait-il, en 48 heures, établir a priori l'altération d'un scrutin qui n'a pas encore eu lieu ?» Quant à la deuxième, ils la trouvent « contraire aux principes qui fondent le droit pénal français ». « L'imprécision des notions retenues [...] fait naître une grande incertitude sur les éléments constitutifs [des] infractions », notent-ils.
Au tour des députés communistes, socialistes et Insoumis
Les trois groupes de gauche dénoncent dans un communiqué une « proposition de loi, téléguidée par l’Elysée » et estiment qu'elle est « manifestement inconstitutionnelle ». Comme leurs prédécesseurs, les groupes de gauche dénoncent notamment l'article 1er du projet de loi ordinaire qui « permet à un ou une magistrate d’établir, seul ou seule en 48h, la véracité d’une information et d’en stopper la diffusion ». « Cette disposition est évidemment attentatoire à la liberté de communication et des opinions », écrivent-ils.
Ils évoquent également des « pouvoirs exorbitants donnés au CSA» par les articles 4, 5 et 6, le texte prévoyant que le Conseil pourra suspendre la diffusion de services de télévision contrôlés « par un Etat étranger ou sous l'influence » de cet État s'ils diffusent « de façon délibérée de fausses informations de nature à altérer la sincérité du scrutin ».
Enfin, ils estiment que l’article 8, « qui permet aux plateformes de lutter elles-mêmes contre les fausses informations conduira mécaniquement celles-ci à opérer une censure sur internet ».
Source : Le Figaro, communiqué de presse
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