Google a mis au point un prototype de moteur de recherche censuré pour la Chine, qui relie les recherches des utilisateurs à leurs numéros de téléphone personnels, facilitant ainsi la surveillance par le gouvernement chinois des requêtes des internautes.
Le moteur de recherche, baptisé Dragonfly, a été conçu pour les appareils Android et supprimerait les contenus jugés sensibles par le régime du Parti communiste chinois, tels que les informations sur les dissidents politiques, la liberté d’expression, la démocratie, les droits de l’homme et même sur les manifestations pacifiques.
Mi-septembre, le quotidien The Intercept a affirmé avoir obtenus des détails qui montrent que Google a compilé une liste noire de censure comprenant des termes tels que « droits de l'homme », « protestation des étudiants » et « prix Nobel » en mandarin.
Les principaux groupes de défense des droits de l’homme ont critiqué Dragonfly, affirmant que cela pourrait avoir pour conséquence que l'entreprise « contribue directement aux violations des droits de l'homme ou en devienne complice ». Une préoccupation centrale exprimée par les groupes est que, au-delà de la censure, les données des utilisateurs sauvegardées par Google sur le territoire chinois pourrait être accessible aux autorités chinoises, qui ciblent régulièrement les militants politiques et les journalistes.
Des sources proches de Dragonfly ont déclaré que la plateforme de recherche semblait également avoir été conçue pour remplacer les données sur la pollution atmosphérique et la météo par des informations fournies directement par une source anonyme à Beijing. Le gouvernement chinois a l'habitude de manipuler des détails sur la pollution dans les villes du pays. Une source de Google a déclaré que la société avait mis au point un système intégré à Dragonfly qui était « essentiellement codé pour forcer leurs données [fournies par la Chine] ». La source craignait que le système de recherche Dragonfly fournisse de fausses données sur la pollution qui afficheraient une quantité de toxines dans l'air inférieure à ce qu’il en est réellement.
Pendant ce temps, la pression sur Google ne fait que s’intensifier. Le mois dernier, 16 législateurs américains ont écrit au PDG de Google, Sundar Pichai, exprimant de « sérieuses inquiétudes » à propos de Dragonfly et exigeant des informations sur les projets chinois de la société. Pendant ce temps, Jack Poulson, un ancien chercheur principal de Google, a déclaré à The Intercept qu’il était l’un des cinq employés à avoir démissionné de la société en raison de Dragonfly.
Cette fois-ci, c’est le vice-président américain, Mike Pence, qui s’en est pris avec virulence jeudi au vol de technologies américaines par la Chine, et il a exhorté Google à renoncer sans attendre à poursuivre la mise au point de Dragonfly.
Washington a montré un scepticisme croissant à l'égard des liens du secteur américain de la technologie avec la Chine. Les démocrates et les républicains ont exprimé leur inquiétude à propos du retour de Google sur le marché chinois. En outre, au début de l’année, l’administration Trump avait interdit aux employés du gouvernement d’acheter des technologies auprès d’entreprises chinoises comme Huawei et ZTE.
« Il existe un nouveau consensus sur la montée en puissance de la Chine à travers l'Amérique », selon lequel de plus en plus de dirigeants d'entreprises « réfléchissent à deux fois avant de se lancer sur le marché chinois si cela signifie renoncer à leur propriété intellectuelle ou s’incliner devant la répression exercée par Pékin », assure Mike Pence.
« Par exemple, Google devrait sans attendre arrêter le développement de son moteur de recherche ‘Dragonfly’ qui va renforcer la censure du Parti communiste et s’insinuer dans la vie privée des utilisateurs chinois », a continué le vice-président.
Intra, le compromis qui tombe à pic ?
Ironiquement, Jigsaw, une division de Google, a proposé Intra, une nouvelle application dédiée à combattre la censure.
Dans un billet, Jigsaw explique que « 60 % des utilisateurs d'Internet, soit la majorité des internautes, vivent dans des pays qui ont recours à une forme de censure. Chaque jour, des informations importantes sont passées sous silence, et des activistes sont réprimés par des gouvernements qui cherchent à restreindre la liberté d'expression. Il est possible, pour seulement 20 $, de réduire au silence un site d'informations avec une cyberattaque, et des pare-feu gouvernementaux peuvent empêcher les internautes d'accéder aux informations dont ils ont besoin. Dans certains pays, les journalistes peuvent être emprisonnés ou torturés s'ils traitent de sujets controversés, et certains gouvernements votent des lois d'une extrême sévérité pour entraver le droit à la liberté d'expression ».
Il faut souligner que Jigsaw a été créé avec pour objectif d’empêcher les attaques par manipulation DNS et de protéger les utilisateurs contre la censure parrainée par l’État. C’est dans cette optique que cette division a développé une application baptisée Intra. Cette dernière transmet toutes les requêtes de navigation et le trafic applicatif via une connexion chiffrée à un serveur de noms de domaine approuvé, garantissant ainsi que les utilisateurs puissent se servir du réseau et accéder au site de manière appropriée, sans interférence.
Sur la description de l’application, qui est disponible sur Play Store, nous pouvons lire « Intra vous protège contre les manipulations DNS, un type de cyber-attaque utilisé pour bloquer l'accès aux sites d'actualités, aux plateformes de médias sociaux et aux applications de messagerie. Intra vous aide également à vous protéger contre le phishing et les logiciels malveillants. C’est facile à utiliser - il suffit de télécharger l’application et de commencer en quelques secondes à peine. Vous pouvez le laisser et l'oublier ».
Source : Reuters
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Voir aussi :
Jigsaw, une division de Google, présente une nouvelle application dédiée à combattre la censure ! Intra est déjà disponible sur Play Store
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Le , par Stéphane le calme
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