L'industrie de la musique souhaite depuis longtemps que les fournisseurs de services Internet fassent davantage pour surveiller et limiter le piratage sur leurs réseaux. Aux États-Unis, les fournisseurs de services Internet sont généralement protégés du droit d’auteur, ce qui signifie qu’ils ne peuvent être poursuivis lorsque leurs clients utilisent leurs réseaux pour distribuer du contenu sans licence, à la condition qu’ils donnent aux détenteurs de droit d’auteur des outils via lesquels ils peuvent retirer le contenu illicite.
Diverses tentatives ont été lancé pour contraindre les fournisseurs de services Internet à adopter des mesures anti-piratage, parfois en faisant adopter de nouvelles lois anti-piratage, parfois en sollicitant des accords volontaires avec les FAI.
C’est dans ce contexte que BMG Entertainment, un détenteur de droit musicaux, a poursuivi Cox Communications en justice en faisant valoir que l’entreprise appliquait une politique qui était délibérément de mauvaise qualité pour faire face aux violations répétées du droit d’auteur parmi ses clients. Par conséquent, a déclaré BMG, Cox ne remplissait pas les conditions requises par la loi américaine Digital Millennium Copyright Act pour pouvoir bénéficier de la protection Safe Harbour.
BMG a remporté cette affaire en première instance, bien qu’elle ait par la suite été annulée en appel pour des raisons techniques. Par conséquent, une deuxième audience est en cours dans cette affaire. Pendant ce temps, l’industrie du disque américaine a poursuivi Grande Communications - un FAI basé au Texas - (et plus tard Cox), en présentant essentiellement les mêmes arguments que dans le litige BMG.
La contre-attaque des FAI
Cette fois-ci, c’est Grande qui a fait valoir ses arguments au juge afin d’expliquer pourquoi l’affaire devrait être rejetée :
« Cette affaire est une tentative de l’industrie américaine du disque de transformer les fournisseurs de services Internet, ou FAI, de facto en ses agents de mise en application du droit d'auteur. Ayant renoncé à poursuivre directement les contrevenants en raison de la mauvaise publicité, et ayant décidé de ne pas cibler les logiciels et les sites Web qui rendent possible le partage de fichiers en ligne, l’industrie de l’enregistrement a mis l’accent sur la création de nouvelles formes de responsabilité en matière de droit d'auteur qui obligeraient les fournisseurs de services Internet à agir en tant que police des droits d'auteur », regrette Grande.
Et de continuer en disant que « Les théories juridiques des plaignants représentent une expansion absurde de la responsabilité du droit d'auteur. En substance, les plaignants veulent obliger les FAI à mettre fin aux comptes des abonnés en se basant sur rien de plus que des allégations non fondées et invérifiables de violation du droit d'auteur. Pour aller plus loin, l'industrie du disque a engagé un tiers afin de bombarder les fournisseurs de services tels que Grande avec des centaines de milliers de telles allégations par an - une quantité bien supérieure à des demandes sur lesquelles tout fournisseur de services Internet pourrait raisonnablement enquêter et essayer de vérifier, même s’il en avait la capacité pratique. Ces avis sont envoyés par une entreprise qui, étrangement, ne fait rien pour vérifier l'inscription ou la propriété de l'une des chansons pour lesquelles elle envoie des millions d'avis d'infraction et collecte des règlements monétaires. Cela met les fournisseurs de services Internet dans une position impossible : soit résilier le compte des abonnés sur la base d’allégations de contrefaçon non vérifiés, soit faire face à un litige pour violation secondaire de milliers d’œuvres protégées par le droit d'auteur. Heureusement, la loi sur le droit d'auteur ne donne pas de responsabilité secondaire dans ces circonstances ».
Un combat international
La responsabilité des FAI dans la violation du droit d’auteur par l’un de leurs abonnés est une question qui se pose dans de nombreux pays.
Au Japon par exemple, dans un contexte de litiges concernant les droits d’auteur, le gouvernement japonais a rédigé un rapport appelant à une « mesure d'urgence » qui bloquerait l'accès aux sites Web qui piratent les mangas. Le siège japonais de la stratégie de propriété intellectuelle prévoit d'encourager les fournisseurs de services Internet à restreindre « volontairement » l'accès à ces sites « malveillants » afin de protéger les célèbres mangas et industries d'animés.
Aux Pays-Bas, un litige a opposé pendant plus de sept ans deux fournisseurs d’accès Internet (FAI) et un groupe de défense des droits d’auteur. Le groupe en question, Stichting Brein, a intenté une action en justice devant les tribunaux néerlandais pour leur demander de contraindre deux FAI locaux à bloquer les noms de domaine et les adresses IP de The Pirate Bay. Ces fournisseurs ont en effet un nombre important de leurs abonnés qui utilisent la plateforme de partage de fichiers en pair-à-pair via le protocole de communication BitTorrent. Le problème, c’est que la plupart des fichiers torrent pointent vers des copies d’œuvres protégées par des droits d’auteur, dont les titulaires de droits n'ont pas autorisé le partage.
Dans la décision rendue par la CJUE en juin 2017, la Cour estime que « la mise à disposition et la gestion d'une plateforme de partage en ligne doivent être considérées comme un acte de communication au sens de la directive » et, de ce fait, « peut constituer une violation du droit d'auteur. » La Cour explique que « même si les œuvres en question sont mises en ligne par les utilisateurs de la plateforme de partage en ligne, les opérateurs de cette plateforme [The Pirate Bay] jouent un rôle essentiel dans la mise à disposition de ces œuvres. »
Source : plainte en PJ (au format PDF)
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Les FAI doivent-ils être tenus pour responsables des violations des droits d'auteurs commises par leurs clients ?
Voir aussi :
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La tension monte aux États-Unis
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Le , par Stéphane le calme
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