Le gouvernement des États-Unis vient de voir le rejet de sa demande d’intervention en faveur d’Apple dans le cas d’optimisation fiscale opposant la firme de Cupertino à Bruxelles. Pour rappel, c’est à la fin du mois d’août 2016 qu’Apple a été sommé par la Commission européenne de verser une somme de 13 milliards d’euros à l’Irlande pour avantages fiscaux illégaux. Ces avantages fiscaux ont, d’après la commissaire européenne chargée de la politique de concurrence, permis à Apple de payer beaucoup moins d'impôts que les autres sociétés pendant de nombreuses années ; soit un taux d'imposition effectif de 1 % sur ses bénéfices européens en 2003, qui aurait diminué jusqu'à 0,005 % en 2014.
Apple et l’Irlande se sont opposés à ce redressement fiscal et ont fait appel de la décision de la Commission européenne. La firme de Tim Cook a saisi le Tribunal général de l’Union européenne, la deuxième plus haute instance juridique de l’Europe, pour tenter d’annuler la décision de la Commission européenne sinon obtenir une sanction moins lourde.
La décision avait également provoqué le mécontentement de Washington qui a demandé à intervenir dans le procès pour défendre le fabricant d’iPhone. À l’appui de leur demande d’intervention, les États-Unis ont fait valoir en premier lieu que leur situation économique serait affectée par la décision de la Commission européenne dans la mesure où cette décision pourrait avoir pour conséquence l’augmentation des crédits d’impôt et des déductions qu’Apple pourrait faire valoir auprès de leurs autorités fiscales, au moment où la société déciderait de rapatrier les bénéfices obtenus par ses filiales off-shore. D'après les USA, un tel rapatriement pourrait en effet être décidé par Apple où ses bénéfices pourraient être traités comme ayant été rapatriés, à la suite d’une éventuelle réforme fiscale aux États-Unis. Et dans ce cas, la décision de l’UE ne pourrait qu’avoir des effets négatifs sur leurs recettes fiscales et la situation économique du pays.
La justice européenne remet toutefois en doute la possibilité que les États-Unis soient directement et de manière certaine touchés par la décision de la Commission. Le Tribunal note en effet que « les prétendus effets négatifs sur la situation économique des USA seraient conditionnés par plusieurs événements, dont la survenance est loin d’être certaine ». En effet, « les États-Unis d’Amérique font valoir que leur situation économique ne se verrait affectée que si Apple décidait de rapatrier les bénéfices de ses filiales off-shore. Or ils n’ont pas présenté d’éléments de preuve établissant le caractère certain du rapatriement des bénéfices des filiales off-shore d'Apple. »
« D’autre part, il convient de relever que les États-Unis d’Amérique ne fournissent aucune autre précision quant à la portée et l’entrée en vigueur de la réforme fiscale à laquelle ils font référence ni n’expliquent comment cette réforme déclencherait le rapatriement des bénéfices des filiales off-shore [d'Apple] », peut-on lire dans la décision du Tribunal. Il estime donc que « les États-Unis d’Amérique n’ont pas établi l’existence d’un intérêt certain à la solution du litige qui résulterait du prétendu effet négatif que le remboursement ordonné par la décision [de la Commission] aurait sur leurs recettes fiscales. »
Ce n'est pas le seul argument des États-Unis qui a été balayé. L'administration Trump a également soutenu pour justifier sa demande d'intervention que la décision de Bruxelles nuirait à leurs efforts pour développer des normes en matière de prix de transfert dans le cadre de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). « À cet égard, il y a lieu de souligner qu’aucun lien direct apparent n’existe entre la décision et le développement des normes en matière de prix de transfert dans le cadre de l’OCDE et, ce, d’autant plus que celles-ci sont établies de manière collective par les membres de l’OCDE et non par les efforts d’un seul État », répond la justice européenne. « En toute hypothèse, les États-Unis d’Amérique n’avancent aucun élément de preuve spécifique qui étaye leur affirmation selon laquelle la décision attaquée nuirait à leurs efforts pour développer ces normes. »
Entre autres arguments, le gouvernement américain estime que son intervention pourrait aider le Tribunal dans la compréhension du droit fiscal des États-Unis. Mais le Tribunal rappelle qu'en vertu du statut de la Cour de justice, « une intervention ne peut avoir d’autre objet que le soutien des conclusions de l’une des parties, ce qui exclut une intervention visant à aider le Tribunal dans la compréhension du droit, tel qu’avancé par les États-Unis. »
Autrement dit, la justice européenne estime que les États-Unis n’ont pas établi l’existence d’un intérêt direct à la solution du litige. Pour cette raison, leur demande d'intervention a été rejetée.
Source : Ordonnance du Tribunal
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Voir aussi :
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Taxe Apple : la justice européenne rejette la demande d'intervention des États-Unis
En faveur du fabricant d'iPhone
Taxe Apple : la justice européenne rejette la demande d'intervention des États-Unis
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Le , par Michael Guilloux
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