Après la plainte déposée contre Uber par Waymo, la bataille juridique entre les deux entreprises a commencé ce mercredi, devant le juge William Alsup, le même qui a jugé l’affaire entre Google et Oracle sur la copie des API Java dans Android. Mais cette fois, c’est plutôt Google, par le biais de la filiale d’Alphabet en charge du projet de voiture autonome Google Car, qui demande la protection de sa technologie. Waymo veut en effet obtenir une injonction du tribunal pour demander à Uber d’arrêter son travail sur les voitures autonomes, étant donné qu’il utiliserait sa propriété intellectuelle.
Rappelons-le, Waymo a porté plainte contre Uber et sa filiale Otto pour vol de technologies de voiture autonome. D’après Waymo, cela aurait été possible grâce à Anthony Levandowski, l’un de ses anciens employés, qui a quitté l’entreprise pour créer une start-up de technologies de voiture autonome (Otto), laquelle a été rachetée quelques mois plus tard par Uber. Dans l’audience de ce mercredi, l’avocat de Google soutient qu’Uber a comploté avec Levandowski pour voler les documents de Waymo, ensuite créer Otto pour la racheter plus tard, pour permettre à l’entreprise de rattraper son retard sur le marché naissant des voitures autonomes, mais déjà assez compétitif.
Arguments de l’avocat de Waymo
Plusieurs preuves ont été avancées par l’avocat de Waymo pour soutenir ses déclarations. D’abord, une note datant d’octobre 2015. Celle-ci indique que deux ingénieurs d’Uber, Scott Boehmke et Brian McClendon, avaient eu une discussion sur un certain « NewCo », qui aurait de « l'expérience avec les concurrents de l'automobile », d’après la note.
Waymo affirme également qu’Uber aurait rencontré Levandowski en janvier 2016, avant son départ de Google. Dans un courriel, McClendon disait en effet qu'il se préparait à rencontrer un « Anthony » le lendemain. « NewCo », qui serait la même personne que le dénommé « Anthony », aurait également fourni des livrables à Uber. Dans un autre email interne d’Uber, avec un fichier « NewCo Deliverables », il est en effet indiqué que « cette liste de produits livrables met la barre haute, ça ne fait aucun doute, mais encore une fois, ce qu’il demande est en $$ ». Cet email laisse donc croire que ce « NewCo », qui aurait de l'expérience avec les concurrents de l'automobile, aurait demandé des sommes importantes pour les livrables en question. Le même mois, le 27 janvier, Levandowski quitte alors Google sans préavis.
L’avocat de Waymo dit également qu’Uber a promis 5 millions d'actions à Anthony Levandowski, un jour après son départ de Google, dans un « avis d'attribution d'actions restreintes ». Ce montant vaut plus de 250 millions de dollars, selon l’avocat de Waymo. M. Verhoeven affirme également que Levandowski a reçu ces actions quand il a créé sa propre entreprise, et « alors qu’il était censé construire sa propre technologie, il travaillait secrètement pour Uber ».
Verhoeven cite également des emails échangés par Uber avec ses avocats, le 29 janvier 2016 ; lesquels portaient sur une « anticipation de litige » liée à l'acquisition d'Otto. Et en avril 2016, Uber et Levandowski concluent un accord de défense conjointe. Il faut noter que tout cela s’est passé bien avant l’annonce de l’acquisition d’Otto par Uber le 18 août 2016.
Explications de l’avocat d’Uber
Arturo Gonzalez a réfuté point par point les arguments de l’avocat de Google. D’après l’avocat d’Uber, le document portant sur l’attribution d’actions à Levandowski a été établi en août 2016, mais avec pour date d’entrée en vigueur le 28 janvier 2016, juste pour couvrir la période au cours de laquelle l’ex-employé de Google a travaillé sur sa technologie, avec Otto.
En ce qui concerne la note de Scott Boehmke à propos de « NewCo », Arturo Gonzalez soutient que cela faisait partie de l'évaluation des éventuelles sociétés tierces de technologie LiDAR, et que cela aurait pu inclure une conversation avec Levandowski au cas où il aurait décidé de créer une entreprise. Il affirme également qu’Uber a découvert en mars 2016 que Waymo envisageait de le poursuivre, ce qui aurait peut-être justifié l’accord de défense conjointe signé avec Levandowski en avril 2016, mais pas les emails échangés bien avant, en janvier, sur une anticipation de litiges liés à l’acquisition d’Otto.
Uber a également montré un dispositif, connu sous le nom de Spider, qu'il dit être l'un des systèmes LiDAR qu'il a développés indépendamment et quelque chose que Waymo dit utiliser sa technologie propriétaire.
Qu’en pense le juge William Alsup ?
L’avocat de Google a fourni des preuves montrant que Levandowski a accédé aux serveurs Waymo avant de partir et téléchargé 9,7 Go de données sur son PC. Il les a copiées sur un disque dur externe avant de reformater le disque dur de l'ordinateur portable, pour couvrir ses traces. Sur ce, le juge Alsup semble un peu convaincu. Il a déclaré qu'il y a bien de fortes évidences que Levandowski a volé des documents, mais Waymo devrait encore montrer qu'Uber l’a chargé de le faire, a utilisé ces documents ou même connaissait les documents volés.
William Alsup pense en effet qu’il y a des chances qu’Uber soit innocent. Peut-être que « la pire des choses qu'ils ont faites est d’avoir payé beaucoup d'argent pour embaucher un gars brillant d'un autre concurrent », explique le juge. « Vous ne l'avez pas poursuivi », poursuit-il en s'adressant à Google. « Vous avez poursuivi Uber. Alors, qu'est-ce qui arrivera s'il s'avère que Uber est totalement innocent ? », a-t-il demandé. Alsup défie donc Google de montrer qu’Uber était en complicité avec Levandowski. L’avocat de Google pense toutefois qu'il n’est pas possible de le prouver actuellement parce que Levandowski met en avant son droit contre l'auto-incrimination et Uber a retenu plus de 3000 documents qui pourraient le prouver. En ce qui concerne la rétention des documents en question, Uber dit ne rien cacher, mais avoir un privilège qu’il fait valoir sur ces documents.
Sources : Business Insider, Axios
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Le , par Michael Guilloux
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