Dans un mouvement sans précédent, le Comité du Commerce de la Chambre des États-Unis a voté à l’unanimité (50-0) pour approuver un projet de loi qui obligerait ByteDance, propriétaire de TikTok, à vendre l’entreprise ou à perdre l’accès au marché américain. Cette décision fait suite à des inquiétudes croissantes concernant la sécurité nationale et la protection des données des utilisateurs.
Le projet de loi, intitulé “Protecting Americans from Foreign Adversary Controlled Applications Act”, vise à aborder les risques immédiats pour la sécurité nationale posés par TikTok et établit un cadre pour que le pouvoir exécutif protège les Américains contre les applications contrôlées par des « adversaires étrangers » à l’avenir. « Si une application est jugée exploitée par une entreprise contrôlée par un adversaire étranger, comme ByteDance Ltd., qui est sous le contrôle de la République populaire de Chine, l’application doit être cédée dans les 180 jours, est-il indiqué sur une note de comité.
Si le projet de loi est adopté par la Chambre et le Sénat et signé par le président Biden, TikTok pourrait éventuellement être retiré des magasins d’applications aux États-Unis si son propriétaire ne vend pas. Il perdrait également l’accès aux services d’hébergement Web basés aux États-Unis. « Si l'application n'est pas cédée, il sera interdit aux entités aux États-Unis de distribuer l'application via un marché ou un magasin d'applications et de fournir des services d'hébergement Web », indique la note du comité.
Après l'approbation à l'unanimité du commité, la Chambre des représentants des États-Unis prévoit de se prononcer par vote mardi ou mercredi sur ce projet de loi. De son côté, Biden a déclaré aux journalistes : « si le Congrès l’adopte, je le signerai ». Le projet de loi est confronté à une issue incertaine au Sénat, où certains législateurs ont déclaré qu'ils souhaitaient apporter des modifications à la législation.
Trump s'oppose au projet de loi
L'ancien président Trump a signalé jeudi son opposition à une législation qui pourrait interdire TikTok aux États-Unis, malgré son soutien antérieur à l'interdiction de l'application de médias sociaux.
Dans un message publié sur Truth Social, le candidat à la présidence pour les élections de novembre a affirmé qu'une interdiction de TikTok profiterait à Facebook et à son fondateur, Mark Zuckerberg, qui occupe le poste de PDG de sa société mère, Meta. « Si vous vous débarrassez de TikTok, Facebook et Zuckerschmuck doubleront leur chiffre d'affaires », a déclaré Trump. « Je ne veux pas que Facebook, qui a triché lors des dernières élections, fasse mieux. C'est un véritable ennemi du peuple ! »
Facebook a banni Trump en janvier 2021 à la suite des émeutes du Capitole, au cours desquelles des centaines de ses partisans ont tenté d'empêcher la certification des résultats de l'élection de 2020. Ses comptes ont été rétablis en février 2023.
L'ancien président a passé des mois à diffuser de fausses affirmations sur l'élection sur les médias sociaux avant l'insurrection.
En 2020, alors que Trump était encore au pouvoir, il a promis d'interdire à l'application de médias sociaux basée sur la vidéo d'opérer aux États-Unis et a émis un ordre demandant à ByteDance de se désengager des activités de TikTok aux États-Unis. L'ordonnance a toutefois été bloquée par la suite devant les tribunaux.
TikTok ayant gagné en popularité ces dernières années, les législateurs des deux bords s'inquiètent de plus en plus des risques que l'application fait peser sur la confidentialité des données et la sécurité nationale.
Le conflit a commencé en décembre 2019, quand la Cour fédérale de Californie a accusé le réseau social d'avoir transféré des données privées d'utilisateurs à des serveurs en Chine. De plus, ByteDance était à ce moment-là soupçonné par Washington de partager ces données avec Pékin. À cette période, Mike Pompeo, qui était le secrétaire d'État américain, avait laissé entendre que son gouvernement pourrait suivre l'exemple de l'Inde. En effet, l'Inde a interdit TikTok en juin 2019 dans le cadre d'une purge des applications chinoises. Le gouvernement indien avait alors évoqué un comportement malveillant quant à la collecte des données de ses citoyens.
Dans une lettre, un groupe de sénateurs républicains avait demandé à l'administration Trump de mettre en œuvre des actions le plus rapidement possible. Ils accusaient TikTok de censurer certains contenus et redoutaient que le Parti communiste chinois se serve de son contrôle sur l'application « pour déformer ou manipuler les discours politiques afin de semer la discorde parmi les Américains et d'obtenir le résultat électoral qu'il escompte ». D'ailleurs, des utilisateurs de l'application ont affirmé qu'ils ont en partie « saboté » le meeting de Donald Trump de Tulsa, en réservant des places en ligne sans avoir l'intention de s'y rendre.
Trump est en froid avec Zuckerberg
Trump a déjà eu l'occasion de s'opposer au PDG de Meta.
L'ancien président a qualifié Zuckerberg de « criminel » sans preuve et l'a accusé d'avoir changé le cours de l'élection de 2020 grâce à ses dons passés. Rien ne prouve que les dons passés de Zuckerberg étaient partisans. Depuis, Donald Trump a été inculpé dans quatre affaires criminelles totalisant 91 chefs d'accusation, dont des accusations liées à l'ingérence dans les élections.
En 2022, l'ancien président a déclaré que « l'énergumène », en référence à Zuckerberg, était venu dîner à la Maison Blanche pendant sa présidence et qu'il lui avait « léché les bottes toute la nuit ».
Zuckerberg a déjà critiqué Trump par le passé, se disant « profondément ébranlé et dégoûté » par certains messages incendiaires de l'ancien président sur Facebook.
Musk est d'accord avec Trump
Le dernier message de Trump sur TikTok a attiré le soutien d'un PDG très en vue : Elon Musk, qui a récemment rencontré Trump à Palm Beach, en Floride. Après la rencontre, le milliardaire a indiqué sur X qu'il ne ferait pas de dons à Trump ou à Biden.
« La déclaration de Trump est exacte », a indiqué Elon Musk sur X, anciennement Twitter.
Musk n'est pas non plus un fan de Zuckerberg. Les deux hommes sont en conflit depuis 2016, lorsqu'une erreur de lancement de la fusée SpaceX a ruiné un satellite de Facebook.Trump’s statement there is correct
— Elon Musk (@elonmusk) March 8, 2024
Puis, en 2018, dans le contexte du scandale Cambridge Analytica, Musk a supprimé ses comptes Facebook SpaceX et Tesla. Il a publié un message public à ce sujet avec le hashtag #deletefacebook et a tweeté que Facebook lui donnait « la chair de poule ».
Les tensions n'ont fait qu'augmenter depuis lors, Musk allant même jusqu'à défier Zuckerberg lors d'un combat en cage. Une fois que Zuckerberg a accepté et a demandé à Musk de nommer un lieu et une heure, Musk a semblé hésiter et a fini par abandonner cette idée.
La tentative de TikTok qui se retourne contre elle
Les commentaires de Trump sur TikTok sont intervenus alors que les utilisateurs de l'application s'insurgent contre une proposition de loi bipartisane qui interdirait l'application aux États-Unis ou forcerait ses propriétaires à la vendre à une entreprise non chinoise. Pour tenter d'obtenir du soutien, l'application a demandé à ses utilisateurs d'appeler le Congrès pour protester contre le projet de loi.
« TikTok risque d'être fermé aux États-Unis », indique la notification push. « Appelez votre représentant maintenant ». Un message dans l'application demande ensuite aux utilisateurs de « s'exprimer maintenant - avant que votre gouvernement ne prive 170 millions d'Américains de leur droit constitutionnel à la liberté d'expression ». Il fournit également aux utilisateurs un raccourci pour appeler le bureau de leur représentant s'ils saisissent leur code postal.
Il semble toutefois que cette initiative se soit retournée contre elle. Après que les utilisateurs ont inondé le Congrès d'appels, les 50 législateurs d'un groupe de la Chambre des représentants ont tous voté en faveur du projet de loi.
Dans un post sur X, le représentant Mike Gallagher, qui préside le comité restreint qui a présenté le projet de loi, a déclaré que les notifications push « interféraient avec le processus législatif » : « Nous avons ici un exemple d'une application contrôlée par un adversaire qui ment au peuple américain et qui interfère avec le processus législatif du Congrès ».
La Maison-Blanche soutient l'idée, comme l'avait fait Trump lorsqu'il était président.
Un porte-parole de TikTok a déclaré que la législation avait un « résultat prédéterminé » : « une interdiction totale de TikTok aux États-Unis ». La société a lancé une campagne pour tenter d’empêcher l’avancement du projet de loi jeudi avant le vote en envoyant des notifications aux utilisateurs les exhortant à appeler le Congrès pour « arrêter la fermeture de TikTok ».
En plus de nommer spécifiquement ByteDance et TikTok dans la législation, le projet de loi prévoit également un processus permettant au président de nommer d'autres applications qui présentent des risques pour la sécurité nationale en raison des liens avec des adversaires étrangers, notamment la Chine, la Russie, la Corée du Nord et l'Iran.
Sources : Donald Trump, Joe Biden
Et vous ?
Quelle est votre opinion sur la décision du président Biden de signer le projet de loi sur TikTok ?
Pensez-vous que les préoccupations de sécurité nationale justifient une telle mesure ?
Comment évaluez-vous l’argument de Trump selon lequel l’interdiction de TikTok pourrait bénéficier à Facebook ?
Croyez-vous que la cession de TikTok par ByteDance résoudra les problèmes de sécurité soulevés ?
Quel impact pensez-vous que l’interdiction de TikTok aurait sur la liberté d’expression en ligne ?
Comment la proposition de législation sur TikTok reflète-t-elle les tensions entre les États-Unis et la Chine ?
Quelles pourraient être les conséquences à long terme d’une telle interdiction pour les utilisateurs et les entreprises technologiques ?
Quelle est votre réaction aux commentaires de Mike Pence sur l’influence de la Chine sur les jeunes Américains ?
Que pensez-vous de la comparaison faite par Rand Paul entre l’action du Congrès et les pratiques des communistes chinois ?
Selon vous, quelle devrait être la réponse appropriée du gouvernement américain face aux applications appartenant à des entreprises étrangères ?