Frances Haugen a été chef de produit chez Facebook jusqu'en avril de cette année. Avant de démissionner, elle a rassemblé des dizaines de milliers de documents détaillant divers problèmes au sein de l'entreprise, allant des atteintes à la santé mentale des adolescents à la violence ethnique en passant par le traitement spécial réservé aux VIP. Elle a remis ces documents au Congrès, au Wall Street Journal et aux régulateurs de la Securities and Exchange Commission (SEC), où elle a également intenté une action en justice pour dénonciation, estimant que la société avait manqué à son obligation fiduciaire en cachant aux actionnaires bon nombre de ses problèmes.
À la suite des révélations de Haugen, Facebook a rebaptisé sa société mère Meta et Mark Zuckerberg a commencé à présenter le métavers comme la prochaine grande nouveauté de la société de médias sociaux. Haugen a déclaré que ces mesures constituaient une tentative de détourner l'attention des problèmes de l'entreprise. La mentalité de Facebook, dit-elle, a été : « Si vous n'aimez pas la conversation alors vous essayez de la changer ».
« Facebook devrait avoir un plan de transparence pour le métavers avant de commencer à construire tout cela, parce qu'ils ont démontré, en ce qui concerne Facebook, qu'ils peuvent se cacher derrière un mur, qu'ils continuent à faire des erreurs involontaires, qu'ils continuent à faire des choses qui donnent la priorité à leurs propres profits plutôt qu'à notre sécurité », a-t-elle déclaré dans une interview.
Frances Haugen appelle l’Europe à modérer Facebook
Lundi, Frances Haugen était à Bruxelles pour s'exprimer devant le Parlement européen. Ses commentaires et sa séance de questions-réponses ont duré près de trois heures. Dans ses remarques, elle a prévenu que Facebook excelle à « danser avec les données » et elle a encouragé les législateurs à demander à Facebook des détails sur toutes les données qu'ils reçoivent de l'entreprise, y compris la manière exacte dont elles ont été obtenues. Elle a également recommandé aux législateurs européens de se concentrer sur l'avenir de la proposition de loi sur les services numériques, qui augmenterait la pression sur les plateformes pour modérer les contenus illégaux.
« La loi sur les services numériques qui est actuellement examinée par ce Parlement a le potentiel pour devenir un étalon d’or mondial. Elle peut inspirer d'autres pays, dont le mien, à poursuivre de nouvelles règles qui protégeraient nos démocraties. Mais la loi doit être forte et son application ferme. Sinon, nous perdrons cette opportunité unique en son genre d'aligner l'avenir de la technologie et de la démocratie », a-t-elle déclaré dans son propos introductif.
Facebook/Meta a cherché à amadouer les législateurs européens en promettant de créer 10 000 emplois dans le bloc pour développer son concept de métavers.
Des craintes amplifiées
Haugen craint qu'un métavers appartenant à Facebook/Meta ne fasse qu'exacerber les problèmes qui existent sur les plateformes actuelles de l'entreprise. Les environnements virtuels tels que ceux proposés par Zuckerberg peuvent créer une dépendance extrême et encourager les gens à se déconnecter de la réalité dans laquelle ils vivent », a-t-elle déclaré.
Elle craint également que l'arrivée de Facebook/Meta sur le lieu de travail ne donne pas d'autre choix aux gens que de transmettre davantage de données personnelles à l'entreprise. « Dans le cas des lieux de travail, nous n'avons pas le choix d'être dans ces espaces. Si votre employeur décide qu'il est désormais une entreprise métaverse, vous devez donner beaucoup plus de données personnelles à une entreprise qui a démontré qu'elle mentait chaque fois que c'était dans son intérêt », a-t-elle déclaré.
Le fait que Facebook/Meta lance une initiative majeure au milieu d'une crise à l'échelle de l'entreprise est emblématique de la façon dont l'entreprise aborde les problèmes, a-t-elle ajouté. Elle préfère « passer à autre chose » plutôt que de réparer ses produits existants. « Le fait qu'ils puissent se permettre 10 000 ingénieurs supplémentaires pour construire des jeux vidéo alors qu'ils ne peuvent prétendument pas se permettre d'avoir 10 000 ingénieurs travaillant sur notre sécurité, je trouve cela inadmissible », a déclaré Frances Haugen au Parlement européen.
Et vous ?
Quel est votre avis sur le sujet ?
Voir aussi :
Facebook annonce qu'il va embaucher 10 000 personnes en Europe pour l'aider à construire un « métavers », qui imitera l'expérience d'interagir en personne grâce à des techno comme l'AR et la VR
La lanceuse d'alerte Frances Haugen exhorte Mark Zuckerberg à démissionner et à investir davantage sur la « sécurité », au lieu de consacrer des ressources au « métavers »
Le métaverse de Facebook pourrait être toxique pour la société humaine, ce qui reflète l'inquiétude que suscite la sécurité de l'intelligence artificielle, selon Eric Schmidt, l'ex-PDG de Google
Contrairement à Facebook, Méta ne va pas abandonner son algorithme de reconnaissance faciale, la maison-mère de Facebook compte bien se servir de DeepFace dans son métavers