
l'anonymat en ligne existe-t-il aujourd'hui ?
Jeffrey Burrill, secrétaire général de la Conférence des évêques catholiques des États-Unis (USCCB), a été obligé de démissionner lundi de sa fonction après avoir été trahi par l'application de rencontres pour hommes gays Grindr. Des détails cachés et compromettants de sa vie ont en effet été révélés à partir de données privées et supposées anonymes collectées par l'application. Une situation qui amène à s'interroger sur l'existence de l'anonymat à l'ère de l'internet et la légitimité des activités de vente de données personnelles.
Ces secrets ont été divulgués par le média catholique américain The Pillar, qui a accusé Jeffrey Burrill d’avoir activement utilisé Grindr et s’être souvent rendu dans des lieux fréquentés par des gays dans différents endroits aux États-Unis. Ces affirmations, The Pillar les fonde sur « des informations en [leur] possession qui prouvent que [le responsable catholique] s’est adonné à des écarts de conduite illicites en série entre 2018 et 2020 », disent-ils.
Comme le rapporte la Catholic News Agency (CNA), un site d’information catholique conservateur, depuis 2018, un individu clamait auprès des institutions et médias catholiques avoir accès « à des technologies permettant d’identifier des membres du clergé utilisateurs d'applications de rencontres comme Tinder et Grindr », et proposait de leur fournir une liste de ces « pêcheurs ». Si « la CNA et d’autres ont décliné cette offre » au nom du respect de la vie privée, The Pillar semble avoir été plus sensible aux discours de cette personne qui assurait agir « pour réformer le clergé américain ». Pour sa part, The Pillar dit avoir obtenu les données de l’application Grindr auprès d'un revendeur de données et les avoir faire authentifier par une société d’analyse indépendante.
Le « lanceur d'alerte » explique avoir découvert, dans les données qui lui ont été fournies, l’identifiant unique d’un téléphone souvent géolocalisé au domicile et au lieu de travail de Jeffrey Burrill. Il en a déduit qu’il s’agissait de son appareil. Les données de géolocalisation ont également montré que ce téléphone était aussi utilisé pour se connecter « quotidiennement » à Grindr depuis des bars et autres lieux de rencontres gays.
En théorie, les informations recueillies par Grindr sont « anonymisées » avant d’être revendues à une vingtaine de régies publicitaires. Autrement dit, il n'est pas possible de savoir qui sont ceux qui se cachent derrière les statistiques sur l’âge des utilisateurs de Grindr, leurs lieux de rencontre favoris, ou encore leurs hobbies. Mais ce scandale montre que, contrairement à ce que disent les courtiers de données et les publicitaires, les informations collectées ne sont pas si anonymes. Cela donne donc raison aux experts qui disent qu’il est toujours possible d’identifier les individus derrière les données.
Bien au-delà d'un scandale religieux, c'est une affaire qui devait éveiller les consciences et interpeller les gouvernements et autorités sur des sujets qui relèvent de la sphère informatique et technologique : les dangers de la géolocalisation, des applications qui collectent les données, le web scraping, la vente de données, etc. Il y a une industrie, qui pèse des centaines de milliards de dollars, qui passe son temps à collecter des données personnelles des quatre coins de l’internet pour les revendre, en assurant à tort qu’elles sont parfaitement anonymes. Il y a aussi des entreprises qui capitalisent sur la découverte de la vraie personne derrière les identifiants publicitaires. Mais l'attention des autorités et gouvernements ne semble pas encore vraiment captée par cette industrie qui prospère en mettant en péril la vie privée des internautes.
Sans remettre en cause la décision de l'Église catholique, ne pensez-vous pas qu'une organisation religieuse ou des institutions ou médias affiliés ne devraient pas espionner les membres ?
Source : The Pillar
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