Après en avoir fait l'acquisition en 2016 pour un peu plus de 29 milliards d’euros, le groupe japonais SoftBank se prépare à se séparer d’ARM Ltd., l’un des plus grands fabricants de microprocesseurs d'architecture 32 bits et d'architecture 64 bits de type RISC dans le monde.
La raison de cette acquisition ? Le marché des smartphones et l’internet des objets. Il faut rappeler que ses microprocesseurs sont utilisés sur de très nombreux modèles de smartphones et tablettes (95 % des smartphones d’après certains baromètres), sans compter que les perspectives de croissance d’ARM sur ce secteur sont très intéressantes : le Britannique, qui a réalisé un chiffre d'affaires de 1,5 milliard de dollars durant son année fiscale 2015, a indiqué une forte demande de sa technologie (avec 50 % des smartphones qui se servent d’un processeur ARMv8-A et 40 % des smartphones qui ont un Mali GPU).
Mais c'était sans compter sur les mauvais paris de SoftBank : la holding japonaise a proposé un plan de relance pour WeWork, une enseigne d'espaces de co-travail. En octobre 2019, SoftBank Group a proposé d'avancer 5 milliards de dollars (4,5 milliards d’euros) pour maintenir WeWork à flot dans le cadre d’une opération qui ferait du conglomérat technologique japonais l’actionnaire majoritaire de l’entreprise américaine de location de bureaux en partage. Il a également investi dans 29 licornes (startups avec une valorisation d'un milliard de dollars ou plus) parmi lesquels Uber. Ce sont des investissements qui ont plombé SoftBank au grand regret de Masayoshi Son, PDG de SoftBank. Couplé à l'impact dévastateur du coronavirus sur l'économie mondiale, le groupe a décidé de vendre ARM pour lever des fonds.
Parmi les parties intéressées figurent Nvidia Corp., qui serait actuellement en pourparlers avancés pour acquérir Arm Ltd., selon des personnes proches du dossier. Les deux parties visent à parvenir à un accord dans les prochaines semaines, ont assuré des sources, demandant à ne pas être identifiées, car les informations sont privées. Nvidia est le seul prétendant à des discussions concrètes avec SoftBank, selon eux. Concernant SoftBank et Apple, les deux sociétés ont eu des discussions préliminaires, mais Apple ne prévoit pas de poursuivre une offre. L'opération de licence d'ARM s'inscrirait mal dans le modèle commercial d'Apple, axé sur le matériel. Il pourrait aussi y avoir des problèmes de réglementation.
Un accord entre SoftBank et Nvidia sur Arm pourrait être le plus important jamais conclu dans l'industrie des semi-conducteurs, qui s'est consolidée ces dernières années alors que les entreprises cherchent à se diversifier et à accroître leur envergure. Mais tout accord avec Nvidia, qui est un client d'Arm, déclencherait probablement un examen réglementaire ainsi qu'une vague d'opposition de la part d'autres utilisateurs.
La technologie Arm, développée à Cambridge (en Angleterre) sous-tend les puces qui sont essentielles à la plupart des appareils électroniques modernes, y compris celles qui dominent le marché des smartphones, un domaine dans lequel Nvidia n'a pas réussi à s'implanter. Des clients, notamment Apple Inc., Qualcomm Inc., Advanced Micro Devices Inc. et Intel Corp., pourraient exiger l’assurance qu’un nouveau propriétaire continuerait de fournir un accès égal au jeu d’instructions d'Arm. Ce sont ces préoccupations qui ont permis à SoftBank, une société neutre, d'acheter Arm la dernière fois qu'elle était en vente sans qu'il n'y ait de vives réactions.
Aucune décision finale n'a été prise et les négociations pourraient s'éterniser ou se désagréger, ont déclaré les sources. SoftBank peut évaluer l'intérêt d'autres prétendants s'il ne parvient pas à un accord avec Nvidia.
Les différentes perspectives
« Avec le modèle sans usine à faible coût de Nvidia lui permettant de se concentrer sur la R&D, l’ingénierie et la programmation, l’ajustement avec Arm serait parfait », a estimé Neil Campling, analyste chez Mirabaud Securities.
Nvidia est le plus grand fabricant de processeurs graphiques et étend l'utilisation de la composante de jeu dans de nouveaux domaines tels que le traitement de l'intelligence artificielle dans les centres de données et les voitures autonomes. Le mariage de ses propres capacités avec des unités centrales de traitement conçues par Arm pourrait lui permettre de rattraper voire prendre de l'avance sur Intel et Advanced Micro Devices, selon Hans Mosesmann, analyste chez Rosenblatt Securities. Il estime que Nvidia devrait payer environ 55 milliards de dollars pour faire l'acquisition d'Arm.
« Vous devez contrôler à la fois les feuilles de route CPU et GPU et cela inclut bien sûr les centres de données », a-t-il écrit dans une note vendredi, faisant référence aux unités centrales de traitement et aux unités de traitement graphique. « Stratégiquement, Nvidia a besoin d'un processeur évolutif qui peut être intégré dans sa feuille de route GPU, comme c'est le cas avec AMD et Intel. »
Le milliardaire Masayoshi Son a vendu certains des actifs clés de SoftBank alors que la société cherche à rembourser la dette du conglomérat japonais. SoftBank a cédé une partie de sa participation dans le géant chinois de l'internet Alibaba Group Holding Ltd. et une partie de sa participation dans l'opérateur sans fil T-Mobile US Inc.
SoftBank a étudié des options pour quitter une partie ou la totalité de sa participation dans Arm par le biais d'une vente ou d'une cotation en bourse. La société de conception de puces pourrait être introduite en bourse dès l'année prochaine si SoftBank décide de poursuivre avec cette option, ont déclaré des personnes connaissant le sujet. Arm est devenu plus précieux en poussant son architecture dans les voitures intelligentes, les centres de données et les équipements de réseau. La société pourrait valoir 44 milliards de dollars si elle poursuit une offre publique initiale l'année prochaine, une valorisation qui pourrait atteindre 68 milliards de dollars d'ici 2025, selon New Street Research LLP.
Nvidia, basé à Santa Clara, en Californie, est le plus grand fabricant de puces graphiques au monde. La valeur de ses actions a été multipliée par plus de vingt au cours des cinq dernières années, donnant à l'entreprise plus de puissance de feu pour conclure de grosses transactions. La valeur marchande de Nvidia a augmenté à plus de 260 milliards de dollars au cours de cette période, dépassant Intel. La société a étendu sa domination sur les puces graphiques utilisées par les joueurs à de nouveaux domaines tels que le traitement de l'intelligence artificielle dans les centres de données. Elle a également pris pied dans le marché naissant des systèmes qui permettent de faire fonctionner les voitures autonomes.
Source : Bloomberg
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Nvidia serait actuellement en pourparlers avancés pour acquérir Arm Ltd auprès de SoftBank
Une opération qui pourrait lui coûter plus de 32 milliards de dollars
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Le , par Stéphane le calme
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