De grands annonceurs comme Coca-Cola ont décidé de cesser leurs campagnes publicitaires sur les réseaux sociaux pendant 30 jours à compter du 1er juillet 2020. Cette décision fait partie d'un boycott plus large de Facebook et Instagram appelé campagne « Stop Hate For Profit » initiée par la Ligue anti-diffamation, la NAACP et d'autres organisations. Facebook a décidé quelques modifications sur sa plateforme de réseau social, mais les annonceurs les ont trouvées insignifiantes. D’après Stephan Loerke, directeur général de la Fédération mondiale des annonceurs, ces grands annonceurs ne reviendront probablement pas tant que de réels changements n'auront pas été apportés, selon CNBC.
Les initiateurs de la campagne #StopHateforProfit, lancée le 19 juin après la mort de George Floyd et les protestations mondiales qui ont suivi, ont expliqué : « Ils ont permis l'incitation à la violence contre les manifestants luttant pour la justice raciale en Amérique dans le sillage de George Floyd, Breonna Taylor, Tony McDade, Ahmaud Arbery, Rayshard Brooks et tant d'autres. Ils ont nommé Breitbart News une "source d'informations fiable" et ont fait de The Daily Caller un "vérificateur des faits", bien que les deux publications aient des antécédents de travail avec des nationalistes blancs connus. Ils ont fermé les yeux sur la répression flagrante des électeurs sur leur plateforme ».
En fin juin, alors que le boycott prenait de l'ampleur, Facebook a déclaré qu'il apposerait des étiquettes sur les messages « dignes d'intérêt » de politiciens qui violaient ses politiques de discours de haine et qu’il renforçait ses règles pour les annonceurs. Bien que ce changement soit important, étant donné que l'entreprise a, dès le départ, refusé totalement de modérer la rhétorique des politiciens, les discussions ont finalement échoué, les annonceurs estimant que les efforts de Facebook « n’étaient pas significatifs » et les organisateurs du boycott exigeant que Zuckerberg y assiste personnellement car « il est l'autorité ultime ».
Cette semaine, The Information a rapporté que le PDG de Facebook, Mark Zuckerberg, a déclaré la semaine dernière à ses employés, lors d'une discussion en ligne, que la société ne changerait pas son approche en matière de discours de haine, même si des dizaines d'annonceurs boycottaient la plateforme. « Je suppose que tous ces annonceurs seront de retour sur la plateforme bien assez tôt », a déclaré Zuckerberg, selon le même média.
Mais lors d’une interview accordée à CNBC vendredi, Stephan Loerke, directeur général de la Fédération mondiale des annonceurs (WFA), a estimé que les nombreuses grandes marques qui ont publiquement cessé de faire de la publicité sur les médias sociaux ne reviendront probablement pas tant que de réels changements n'auront pas été apportés. « Je ne vois pas ces grandes marques revenir si aucun changement structurel n'a eu lieu », a déclaré Loerke. « C'est ce que je pense sur la base de mes conversations avec elles », a-t-il ajouté.
La pause des grandes marques annonce un changement dans la façon dont les entreprises percevaient les médias sociaux
Selon WFA, les 120 membres qui constituent le groupe commercial, y compris PepsiCo, P&G et Diageo, représentent 90 % des dépenses mondiales en communication marketing, a rapporté CNBC. Lors d’une récente enquête menée auprès de 58 de ses membres, la Fédération a constaté que 31 % des répondants avaient déjà décidé de ne pas faire de publicité dans les médias sociaux ou étaient susceptibles de le faire. 41 % ont déclaré qu'elles étaient indécises et 29 % ont déclaré qu'il était peu probable ou qu'elles ne prévoyaient pas de s'abstenir.
Cette enquête est intervenue alors que les principaux annonceurs, d'Unilever à Starbucks en passant par Coca-Cola Co et autres, ont annoncé divers degrés de pause dans leurs budgets de publicité sur les médias sociaux, suite à la campagne #StopHateForProfit qui incite les annonceurs à boycotter Facebook pour le mois de juillet.
Selon The Information, Zuckerberg a aussi déclaré la semaine dernière que le boycott était un « problème de réputation et de partenariat » plutôt qu'un problème financier, car la plupart des revenus de Facebook proviennent des petites entreprises et non des grandes marques.
Lors de l’interview avec CNBC, Loerke a reconnu que des pauses temporaires ne risquaient pas de nuire financièrement à Facebook, mais qu'elles annonçaient un changement radical dans la façon dont les entreprises percevaient les médias sociaux. Il a ajouté que même les entreprises qui ne font pas de pause ont dit qu'elles étaient déterminées à trouver des solutions aux problèmes posés par les médias sociaux.
« Si les grandes marques se retirent comme elles semblent le faire pendant un mois, ou quelques mois, cela ne va probablement pas faire une grande différence dans les revenus de Facebook », a déclaré Loerke. « Je pense que le point de vue, que ces marques expriment, a un certain poids dans l'industrie, et je pense qu'à plus long terme, cela aura une importance pour les plateformes de médias sociaux », a-t-il ajouté.
Selon CNBC, Loerke ne pense pas que les marques se contenteront de revenir sur la plateforme si aucun changement n'est fait. « D'après les conversations que j'ai eues avec les marques, celles qui sont allées en public pour déclarer qu'elles allaient faire une pause sont très conscientes qu'elles ont fait ces déclarations publiquement. Et elles sont également très conscientes que les mêmes médias qui ont pris note de cette décision poseront des questions le jour où elles recommenceront », a-t-il déclaré. « Je pense que les marques qui ont été publiques sont sérieuses dans leur volonté de conduire le changement collectivement ».
La question s'est transformée de la « sécurité de la marque » à la « sécurité sociétale »
Selon CNBC, depuis des années, les annonceurs font pression sur les plateformes pour qu'elles fassent le ménage. Le média a cité l’exemple de 2017 où le quotidien britannique The Times a publié un rapport sur les publicités de grandes marques apparaissant sur les sites de haine et à proximité des vidéos YouTube créées par des partisans de groupes terroristes. À partir de cette publication, le géant des biens de consommation Procter & Gamble avait suspendu sa publicité sur YouTube pendant plus d'un an, après que ses publicités aient été trouvées à côté de vidéos extrémistes, a rapporté CNBC.
Mais selon Loerke, il ne s’agit plus de la « sécurité de la marque », mais dorénavant de la « sécurité sociétale », probablement à cause de certains événements qui ont lieu sur les médias sociaux ces dernières années. L'année dernière, Facebook, Twitter et d’autres plateformes ont fait l’objet de diffusion d'une fusillade de plus de 50 personnes à Christchurch, en Nouvelle-Zélande. Une autre fusillade à proximité d'une synagogue à Halle, en Allemagne, a été amplifiée l'année dernière lorsqu'une vidéo de cette fusillade est apparue sur le site de streaming vidéo Twitch.
Et comme une grande partie du Web est financée par les annonceurs, selon CNBC, l’action des grandes marques crée un tournant, selon Loerke, en passant d'une ère où les médias sont axés sur l'efficacité et la portée à une ère où l'allocation des dépenses médiatiques a une dimension stratégique. « La façon dont vous répartissez vos dépenses médiatiques, l'endroit où vous placez vos annonces, parle de votre entreprise », dit-il. « Nous sommes passés de la sécurité de la marque à celle, je pense, de la société ».
Mais selon Loerke, la façon dont les marques procèdent actuellement, chacune ayant ses propres politiques, valeurs et outils, est inefficace. « Cela conduit à une multitude d'opérateurs qui agissent de bonne foi, mais un système qui est tout simplement non évolutif et inefficace », a-t-il déclaré. « La seule façon de remédier à cela est de trouver un système et de mettre en place un système qui soit transversal à l'écosystème, qui permettra aux propriétaires de marques de faire des choix éclairés sur l'endroit où ils mettent leurs annonces ».
Pour cela, Loerke propose que le contenu soit « normalisé, afin d'harmoniser, par exemple, la définition du "discours de haine" entre les entités ; les données doivent être collectées sur les incidents de discours de haine et autres contenus préjudiciables de manière unifiée ; une vérification par des tiers est nécessaire au lieu de données autodéclarées ; et des outils qui fonctionnent dans tout l'écosystème et qui permettent aux marques d'agir en fonction de leurs valeurs », a rapporté CNBC.
Loerke a déclaré à CNBC que les plateformes de médias sociaux ont déjà travaillé l’année dernière avec l'Alliance mondiale pour des médias responsables créée par la Fédération mondiale des annonceurs afin de s'attaquer à ces problèmes.
« Je pense que le fait que la pression augmente et que la visibilité publique de cette question a atteint le niveau qu'elle a atteint aujourd'hui va contribuer à accélérer notre effort », a-t-il déclaré. Mais, selon un commentateur, affaiblir Facebook équivaudrait à rendre Google « exponentiellement plus puissant ». Et vous, que pensez-vous de l’action des grandes marques ?
Source : CNBC
Et vous ?
Que pensez-vous de l’action des grandes marques ?
Pensez-vous que Facebook cédera et apportera des changements structurels comme le veulent ces marques ?
Pensez-vous que les annonceurs maintiendront la pause jusqu’à ce que les réseaux sociaux fassent des changements significatifs ?
Voir aussi :
Stop Hate for Profit : Mark Zuckerberg a perdu 7 milliards de dollars de sa fortune, des grands annonceurs ayant décidé de cesser les campagnes publicitaires sur sa plateforme pour 30 jours
Stop Hate for Profit : Zuckerberg déclare que Facebook ne va pas changer son approche sur quoi que ce soit « à cause d'une menace sur un petit pourcentage de nos revenus »
Stop Hate for Profit : le PDG d'un grand groupe de publicité déclare que le boycott de Facebook est un tournant,
Car cela changera la façon dont les entreprises percevaient les médias sociaux
Stop Hate for Profit : le PDG d'un grand groupe de publicité déclare que le boycott de Facebook est un tournant,
Car cela changera la façon dont les entreprises percevaient les médias sociaux
Le , par Stan Adkens
Une erreur dans cette actualité ? Signalez-nous-la !