Le PDG de Facebook, Mark Zuckerberg, a supervisé les plans visant à consolider le pouvoir du réseau social et à contrôler ses concurrents en traitant les données de ses utilisateurs comme une monnaie d'échange, tout en proclamant publiquement qu'il protégeait ces données, selon environ 4 000 pages de documents d'entreprise divulgués couvrant une grande partie de 2011 à 2015. obtenu par NBC News.
Environ 400 des 4 000 pages de documents avaient déjà été rapportées par d'autres médias, ainsi que par un membre du Parlement britannique qui enquêtait sur les pratiques de Facebook en matière de confidentialité des données à la suite du scandale Cambridge Analytica. Cependant, ce cache représente l’image la plus claire et la plus complète des activités de Facebook pendant une période critique, alors que la société avait du mal à s’adapter à la montée en puissance des smartphones après ses débuts difficiles en tant que société publique.
Les milliers de documents récemment partagés ont été divulgués anonymement au journaliste d'investigation britannique Duncan Campbell, qui les a partagés avec une poignée d'organisations de médias parmi lesquels NBC News et Süddeutsche Zeitung. Campbell, membre fondateur du Consortium international des journalistes d'investigation, est un expert en criminalistique informatique qui a travaillé sur des enquêtes internationales, notamment sur les activités bancaires offshore et le grand tabac. Les documents semblent être les mêmes que ceux obtenus par le Parlement à la fin de 2018 dans le cadre d'une enquête sur Facebook. Facebook n'a pas remis en question l'authenticité des documents obtenus par NBC News.
Les documents, qui comprennent des courriels, des webchats, des présentations, des feuilles de calcul et des résumés de réunion, montrent comment Zuckerberg, ainsi que son conseil d'administration et son équipe de direction, ont trouvé des moyens d'exploiter les données de l'utilisateur, telles que des informations sur les amis, les relations et les photos, comme levier entreprises partenaires.
Dans certains cas, Facebook récompenserait les entreprises favorisées en leur donnant accès aux données de ses utilisateurs. Dans d'autres cas, Facebook empêchait l'accès aux données utilisateur à des entreprises ou des applications concurrentes.
Par exemple, Facebook a donné à Amazon un accès étendu aux données des utilisateurs, car l’entreprise dépensait de l’argent pour la publicité sur Facebook et s’était associée au réseau social pour le lancement de son smartphone Fire. Dans un autre cas, Facebook a discuté de la suppression de l'accès aux données utilisateur pour une application de messagerie devenue trop populaire et considérée comme un concurrent, selon les documents.
Pendant ce temps, Facebook élaborait une stratégie pour définir publiquement ces changements comme un moyen de protéger la confidentialité des utilisateurs.
La communication privée entre les utilisateurs est « de plus en plus importante », a déclaré Zuckerberg dans un entretien accordé au New York Times en 2014. « Tout ce que nous pouvons faire pour que les gens se sentent plus à l'aise est une bonne chose ».
Mais les documents montrent que, dans les coulisses, contrairement aux déclarations publiques de Facebook, la société a proposé de nombreuses manières d'imposer aux applications tierces d'indemniser Facebook pour l'accès aux données de ses utilisateurs, notamment les paiements directs, les dépenses publicitaires et des arrangements sur le partage de données. Il n’est pas inhabituel que des entreprises collaborant partagent des informations sur leurs clients, mais Facebook a accès à des données sensibles que de nombreuses autres entreprises ne possèdent pas.
Facebook a finalement décidé de ne pas vendre les données directement, mais plutôt de les distribuer aux développeurs d'applications considérées comme des « amis » personnels de Zuckerberg ou ayant dépensé de l'argent sur Facebook et partageant leurs propres précieuses données, selon les mêmes documents.
Facebook a nié avoir accordé un traitement préférentiel aux développeurs ou aux partenaires en raison de leurs dépenses publicitaires ou de leurs relations avec les dirigeants. Il faut préciser que la société n'a pas été accusée d'avoir enfreint la loi.
Une vague de démissions chez Facebook
Mi-mars, Facebook a été confronté au départ de deux de ses plus importants cadres. Chris Cox, le responsable des produits chez Facebook et Chris Daniel ont quitté la direction de l’entreprise. Selon le New York Times, leur départ est étroitement lié à la très controversée idée de Mark Zuckerberg de vouloir unifier les trois principales plateformes du groupe notamment Facebook Messenger, Whatsapp et Instagram. Depuis un peu plus d'un an maintenant, les démissions se succèdent au sein de l’entreprise. On pourrait les illustrer en partant par exemple de la démission de Brian Acton et de Jan Koum, les deux cofondateurs de Whatsapp, respectivement en 2017 et 2018. Toujours en 2018, les deux cofondateurs d’Instagram ont également quitté la société. D'autres responsables, notamment le responsable des communications et des politiques de Facebook et le responsable de la sécurité, ont également quitté leurs fonctions.
Beaucoup d’explications à propos de ses vagues de démission laissent entendre que ces cadres sont partis à la suite de malversations entre ces derniers et Mark Zuckerberg concernant la façon dont le PDG de Facebook dirige l'entreprise. Des spéculations lient certains de ces départs au scandale qui a tant faire parler de lui, celui du Cambridge Analytica. Est-ce vrai ? On ne saurait y répondre avec certitude puisqu’à ce jour, aucun commentaire de la part de Facebook n’existe à ce propos. Si depuis l’explosion du scandale de Cambridge Analytica, Facebook a toujours nié être au courant de l’utilisation finale des données collectées et traitées par l’entreprise britannique, les récentes accusations à l’encontre de la société en disent totalement le contraire. D’après des révélations faites par l’hebdomadaire britannique The Observer en mars, Facebook aurait dissimulé depuis le début de cette histoire des preuves qui prouvent son implication directe dans l’affaire dite de Cambridge Analytica.
En effet, pour l’affaire qu’on cite et d’après les propos de The Observer relayés par The Guardian, au moins un membre du conseil d’administration de Facebook était au courant du but réel et permanent de la collecte de données litigieuse plusieurs années avant l’explosion du scandale. Facebook aurait-il menti jusque là en soutenant qu’il a appris de la presse ce à quoi les données collectées par Cambridge Analytica devraient servir ? C’est que ressortent les récentes affirmations de l’hebdomadaire britannique. « Des personnes de la Silicon Valley ont témoigné que Marc Andreessen, membre du conseil d'administration de Facebook, le fondateur de la société de capital-risque Andreessen Horowitz et l'une des personnes les plus influentes de la Silicon Valley, ont assisté à une réunion avec Christopher Wylie qui s'est tenue dans le bureau d'Andreessen Horowitz deux ans avant que Wylie ne se présente comme dénonciateur », a indiqué The Observer.
Les actionnaires de Facebook forcent un vote pour évincer Mark Zuckerberg du poste de président
Facebook a déposé vendredi un document à la SEC (Securities and Exchange Commission), annonçant son assemblée annuelle des actionnaires du 30 mai et confirmant les propositions des investisseurs qui seront soumises au vote pendant l'événement. En effet, certains investisseurs reviennent à la charge pour tenter à nouveau de démettre Zuckerberg du poste de président du groupe, renverser la structure à deux catégories d'actions de Facebook et imposer une nouvelle gouvernance sur le réseau social.
Le document déposé le vendredi dernier, contient huit propositions des actionnaires de Facebook, selon Business Insider, y compris deux qui sont bien connues des internautes du fait qu’elles ont déjà fait la une des médias en ligne à plusieurs reprises. Les investisseurs veulent, non seulement, évincer Zuckerberg en tant que président du conseil d'administration de Facebook en faveur de l'embauche d'un dirigeant indépendant, mais aussi instaurer de nouveaux « mécanismes équitables et appropriés permettant d'éliminer les droits disproportionnés des actionnaires de catégorie B ».
Pour rappel, en 2017, l’un des gros investisseurs de Facebook, Trillium Asset Management, a été à l’origine d’une proposition visant à obtenir un président indépendant. Mais cette résolution a connu d’importantes oppositions parmi les investisseurs. D’autres gros investisseurs tels que les fonds Vanguard Total Stock Market Index et Fidelity Contrafund avaient voté contre la proposition de 2017.
En octobre 2018, quatre grands fonds publics américains investisseurs de Facebook ont proposé, à nouveau, de démettre Mark Zuckerberg en tant que président-directeur général au profit d’un président indépendant. Ils avaient justifié leur proposition par la série de scandales notoires qui ont émaillé la vie du réseau social depuis un certain temps et avaient espèrent obtenir le soutien de grands gestionnaires d'actifs. La chute régulière des actions depuis le début des problèmes de Facebook a aussi été citée comme un autre motif de leur résolution.
En novembre 2018, suite à la publication d’un rapport selon lequel Facebook aurait embauché une entreprise de relations publiques pour lutter contre les critiques dirigés contre la société, des investisseurs ont réitéré leur proposition de mettre fin à la fonction de président du conseil d’administration qu’exerce Mark Zuckerberg en plus de son poste de directeur général du groupe. Toutefois, la position du réseau social sur la question de création d’une présidence indépendante est très bien connue. Selon Facebook, un président indépendant pourrait « créer de l'incertitude, de la confusion et de l'inefficacité dans les fonctions et les relations du conseil d'administration et de la direction».
Cependant, les efforts continuent. Des investisseurs militants qui contrôlent plus de 3 milliards de dollars d'actions font pression pour évincer Mark Zuckerberg du poste de président du conseil d'administration de Facebook. Bien d'autres changements dans la gouvernance de l’entreprise sont également prévus à condition que le vote soit favorable pour ces investisseurs activistes le 30 mai prochain.
Source : NBC News
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Le , par Stéphane le calme
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