« Les agences pourraient obliger un fabricant d'appareils à précharger (puis dissimuler) des logiciels de pistage ou de capture d'écran (logiciels espions) sur des combinés commerciaux pouvant être activés à distance », ont déclaré dans une communication conjointe la Communications Alliance (l'organe de représentation de Telstra, Optus et de fabricants d’appareils tels que Nokia et Huawei), l’Australian Information Industry Association et l’Australian Mobile Telecommunications Association.
« Le manque de clarté et de détail soulève des préoccupations importantes quant à l'intention, à la mise en œuvre effective et, en fin de compte, à la portée législative ».
Le ministre de l'Intérieur, Peter Dutton, cherche à obtenir de nouveaux pouvoirs au nom des agences de sécurité australiennes en réponse à l'utilisation croissante du chiffrement par les criminels : « Les syndicats criminels et les terroristes abusent de plus en plus de ces technologies », a déclaré Dutton dans un discours la semaine dernière tenu devant le Parlement sur The Assistance and Access Bill 2018.
« Le projet de loi prévoit des pouvoirs supplémentaires pour les forces de l’ordre en matière d'accès informatique ouvert et caché. L'accès aux ordinateurs implique l'utilisation de logiciels pour collecter des informations directement à partir de dispositifs », a-t-il déclaré.
L'industrie de la technologie s’est montré unanime en s’opposant au projet de loi, malgré les assurances de Dutton, selon lesquelles la législation ne va pas « affaiblir le chiffrement et ne va pas introduire des portes dérobées au sein des dispositifs chiffrés ». .
Ministre de l'intérieur Peter Dutton.
« Il s’agit d’une énorme expansion de la gamme d’entités, en Australie et à l’étranger, qui peuvent être amenées à fournir une assistance de tous types, y compris la création de nouvelles capacités pour permettre aux organismes de contrôle de contourner le chiffrement », a déclaré John Stanton. Il a assuré que le scénario des logiciels espions pourrait impliquer d'obliger les fournisseurs de télécommunications locaux à installer ce logiciel sur les téléphones mobiles des clients.
Le Digital Industry Group, l’organe représentatif des géants de la technologie tels que Facebook, Amazon, Google et Twitter, a avancé que ces « vulnérabilités de sécurité, même si elles sont conçues pour lutter contre la criminalité, nous exposent à des attaques de criminels ».
Même l’Internet Architecture Board (IAB), l’organe qui supervise le fonctionnement technique du réseau, a pris l’initiative inhabituelle de commenter le projet de loi : « Bien que nous ne révisions normalement pas la législation proposée, nous sommes préoccupés par le fait que cette proposition pourrait avoir un impact grave et indésirable sur Internet », a indiqué le communiqué. Si cela se traduit par une législation similaire dans d'autres pays, « cela pourrait entraîner la fragmentation de l'Internet », a déclaré l'IAB.
Un porte-parole du gouvernement a insisté sur le fait que le projet de loi comportait de « solides garanties » afin de s’assurer que toute aide demandée à l'industrie était « raisonnable et proportionnée » et ne menacerait pas la sécurité des systèmes de communication.
Les travaillistes ont critiqué ce qu'ils prétendent être une hâte injustifiée d'adopter le projet de loi étant donné qu’il n’a été déposé au Parlement que 10 jours après la clôture de la consultation publique du projet : « Les propositions visant à fournir aux agences de sécurité les pouvoirs nécessaires pour contourner le chiffrement et accéder aux communications personnelles doivent faire l'objet d'une consultation solide et réfléchie », ont déclaré les députés travaillistes Mark Dreyfus, Michelle Rowlands et Ed Husic.
Le gouvernement australien n'est pas le seul à chercher un moyen de « vaincre » la barrière du chiffrement, mettant en avant le fait que les criminels et les terroristes s’en servent pour leurs communications. Cependant, à chaque fois qu’une telle législation était proposée, les grandes enseignes de la technologie n’ont pas hésité à faire comprendre que cela ferait plus de mal que de bien.
L'année dernière, Apple a refusé une demande du FBI pour déverrouiller le téléphone d'un tireur de masse au Texas. En mai, tous les géants de la technologie, dont Apple, Facebook, Google et Microsoft, ont critiqué les propositions qui donneraient aux autorités chargées de l’application de la loi d’accéder à des dispositifs verrouillés et cryptés.
« Affaiblir la sécurité et la confidentialité que le cryptage contribue à fournir n’est pas la solution », ont déclaré en mai dernier dans un communiqué commun Apple, Facebook, Microsoft, Google, Dropbox, Twitter, Oath.
Source : SMH
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