Une centaine de militants d’Attac (Association pour la taxation des transactions financières et pour l'action citoyenne) a pris d’assaut l'Apple Store Opéra à Paris samedi dernier qu’ils ont occupé pendant environ trois heures, chantant à tue-tête « On arrêtera quand Apple payera » et en déployant des banderoles sur les locaux. L’objectif est de faire pression sur l'entreprise pour qu'elle paye sa facture suite à un redressement fiscal de 13 milliards d'euros à l'Union européenne.
Pour rappel, fin août 2016, Apple a été sommé par la Commission européenne de verser une somme de 13 milliards d’euros à l’Irlande pour avantages fiscaux illégaux. D’après Margrethe Vestager, commissaire chargée de la politique de concurrence, les avantages fiscaux accordés à Apple ont permis à la société de payer beaucoup moins d'impôts que les autres sociétés pendant de nombreuses années. Ce traitement sélectif aurait permis à Apple de se voir appliquer un taux d'imposition effectif de 1 % sur ses bénéfices européens en 2003 ; lequel taux aurait diminué jusqu'à 0,005 % en 2014, d’après Margrethe Vestager.
La Commission européenne a précisé que l’Irlande n’est pas le seul pays concerné par ce remboursement. Apple aurait en effet pu échapper aux impôts dans certains pays en expatriant la majorité de ses revenus en Irlande. Les pays de l’UE qui ont estimé avoir été lésés par ce fait se sont donc servi des données et méthodes de la Commission pour déterminer combien Apple aurait dû leur payer en impôts supplémentaires.
Le fisc français n’a pas été en reste : en mai dernier, il a notifié à Apple un redressement fiscal portant sur les exercices de 2012 à 2014. Les services de Bercy ont réclamé à la filiale française d’Apple le paiement de 12,2 millions d’euros.
Précisément, la filiale redressée est Apple Retail France EURL, la filiale qui opère les Apple Stores français, et non Apple Sarl France qui est en charge du marketing. Cette filiale a été créée en 2005, quelques années avant l'ouverture du premier Apple Store au Louvre en 2009. Déficitaire jusqu'en 2013, elle n'a commencé à payer des impôts qu'à partir de cette année-là. Sur l'exercice clos fin septembre 2016, elle est retombée dans le rouge (à cause de la provision pour redressement fiscal), perdant 9,4 millions d'euros, sur un chiffre d'affaires de 623 millions.
Les deux filiales ont déclaré au fisc français 700 millions d'euros de chiffre d'affaires. C'est une fraction du chiffre d'affaires effectivement réalisé par Apple en France, estimé à 4,3 milliards d'euros.
Apple a remis en cause la décision de Bruxelles et a promis de faire appel après que Tim Cook a qualifié le verdict comme étant « exaspérant ». Apple a estimé que la Commission européenne a mal interprété la loi irlandaise.
L’argument le plus lisible d’Apple est que la commission a fait des erreurs fondamentales lorsqu’elle a évalué l’accord de la firme avec le gouvernement irlandais. À travers cet accord, ses deux filiales en Irlande bénéficient d’un taux d’imposition faible, mais légal. Apple a caractérisé cet accord comme étant parfaitement acceptable. « La Commission a présumé que toutes les activités génératrices de revenus critiques pour les acteurs sont attribuables à des filiales irlandaises sans faire une évaluation appropriée aux preuves, incluant un ensemble d’attestations d’experts montrant que les profits n’ont pas été générés par des activités en Irlande. » Apple a informé que ses filiales irlandaises avaient pour mission d’effectuer des fonctions routinières et n’étaient pas impliquées dans le développement et la commercialisation des produits phares d’Apple qui génèrent ses profits.
Autant d’éléments qui ont fait que l’entreprise lance un recours auprès de la CJUE, cherchant une annulation complète ou partielle du verdict de Bruxelles. Apple veut également que la commission paie pour ses frais juridiques dans l’affaire.
Pour Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac , « Apple doit cesser de nier les pratiques fiscales mises en évidence par l’enquête de la Commission européenne, retirer son recours auprès de la Cour de Justice de l’UE et payer son amende de 13 milliards d’euros au plus vite. De plus, nous devons être en mesure de vérifier que les impôts payés par Apple sont en adéquation avec ses activités réelles. Pour cela, nous exigeons qu’Apple publie son reporting pays par pays dès maintenant et de manière rétroactive sur les dernières années. »
Elle assure d’ailleurs que « Nous avons obtenu un rendez-vous, d'ici quinze jours, avec la direction nationale d'Apple. Si ce n'est pas le cas, nous nous engageons à revenir avant Noël, par une action bienveillante, mais déterminée. »
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Pour Dominique Plihon, porte-parole d’Attac, « le cas d’Apple est par bien des aspects exemplaire des pratiques fiscales actuelles des multinationales et souligne l’urgence de prendre des mesures pour y mettre fin. Pour cela, nous proposons l’instauration d’une taxe globale sur les multinationales consistant à calculer leurs bénéfices imposables sur la base d’indicateurs objectifs de leur activité dans chaque pays : nombres de salariés, équipements (usines, points de vente...) et niveau de ventes. »
Cette action s’inscrit dans le cadre de la campagne #iPhoneRevolt, initiée par des organisations citoyennes, associatives et syndicales avec le soutien d’intellectuels, de scientifiques et d’artistes. Ce collectif souhaite mettre en évidence les pratiques d’Apple notamment l’évasion fiscale, mais aussi l’extraction polluante de métaux, l’exploitation des travailleurs, la course à la consommation, l’obsolescence programmée, etc.
Source : blog Attac
Voir aussi :
Les Apple Store seraient sous le coup d'un redressement fiscal de plus de 12 millions d'euros, pour la période allant de 2012 à 2014
Apple estime que la Commission européenne a commis des erreurs fondamentales et refuse de payer les 13 milliards d'euros demandés par la commission
Des militants d'Attac ont occupé de force l'Apple Store Opéra à Paris pendant des heures
Exigeant que l'entreprise paye les impôts réclamés par l'UE
Des militants d'Attac ont occupé de force l'Apple Store Opéra à Paris pendant des heures
Exigeant que l'entreprise paye les impôts réclamés par l'UE
Le , par Stéphane le calme
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