Amar Singh, un designer indépendant, a tenté de répondre à cette question. Dans un billet de blog, il explique pourquoi travailler dans un bureau ouvert n’est pas une bonne idée. Amar préfère plutôt le télétravail en raison des nombreux avantages qu’il offre. Il raconte que dans son job le plus récent, le meilleur de son travail a été réalisé à domicile. Dans sa maison, il a installé deux bureaux et détient le contrôle total sur son environnement, et toute distraction relève de son choix.
Mais quand il est passé dans un bureau, tout a changé. Il y avait constamment des distractions de toutes parts, des autres employés qui bavardent, en passant par les chiens qui aboient, l’interruption constante des réunions et les célébrations d’anniversaires. Amar raconte qu’il a été difficile pour lui de se concentrer et tout à fait facile de se déconcentrer à tout moment. Dans tous les lieux dans lesquels il a travaillé, ce bureau a été le lieu le plus terrible.
Amar raconte de sa propre expérience, quand il est dans un espace encombré, il trouve du mal à raisonner. Au contraire, quand il est seul, avoir son propre espace (mental et physique) lui permet de se lancer dans défis et comprendre ses pensées et présomptions, ce qui ne peut que contribuer à améliorer significativement la qualité de son raisonnement. Bref, Amar a réalisé qu’il déteste les open spaces.
La montée en puissance des open spaces
« Nous encourageons les gens à rester dans un espace ouvert parce que nous croyons à l’heureux hasard  – et les gens se déplacent tout en apprenant de nouvelles choses. » (Jack Dorsey – pg. 49, Deep Work)
Ce concept parait intéressant en théorie, un espace ouvert permet d’avoir plus de synergie entre les différentes équipes. Le marketing et design pourront travailler ensemble sur les projets, l’ingénierie et les équipes de produit peuvent s’attaquer aux bogues sur-le-champ, en gros c’est toute la communication de l’organisation qui est améliorée.
80 % des bureaux aux États-Unis sont aujourd’hui dans des espaces ouverts. Les entreprises traditionnelles ont choisi cette option afin de doper la créativité et l’harmonie dans leurs bureaux, une idée inspirée directement des startups.
Toutefois, d’autres aspects de cette idée ont été négligés.
Les open spaces ne marchent pas
C’est le constat de différentes études, les employés souffrent après la transition à ces espaces dits ouverts. Dans une étude réalisée par une société pétrolière en 1997, des psychologues ont évalué le niveau de stress, la performance au travail et les relations interpersonnelles avant la transition, quatre semaines après la transition, et finalement six mois après. Ils ont constaté que les employés ont souffert : le nouvel espace a été perturbateur, stressant et encombrant. Les entreprises en voulant améliorer la productivité, ils ont placé leurs employés dans un espace où ils se sentent moins proches, non satisfaits et aigris.
Si on fait une comparaison avec les bureaux réguliers, les employés dans les espaces ouverts font face à plus d'interactions non contrôlées, à des niveaux plus élevés de stress et des niveaux moins élevés de concentration et de motivation. Les études montrent que les open spaces mènent souvent vers des comportements antisociaux.
Dans les open spaces de Facebook, il manque un certain sens de confidentialité
Les études récentes montrent que les open spaces n’améliorent pas vraiment les interactions sociales entre les employés, ou du moins comme l’avaient prédit les premières études. La présence inévitable du bruit dans les open spaces a été toujours perçue comme un obstacle à la concentration nécessaire pour la productivité. Les barrières physiques insinuent la présence d’un sens de la confidentialité — et il a été prouvé que ce sens de la productivité permet d’améliorer la performance au travail.
Il faut l’admettre, les espaces ouverts représentent une mauvaise architecture. Ils représentent un échec en psychologie comme en design. Afin de comprendre pourquoi un espace ouvert est si intrusif, il faudra comprendre la psychologie et les motifs qui y sont derrière. Les arguments les plus cités pour l’espace ouvert sont les suivants.
La créativité spontanée au lieu de la concentration
Argument : placer des gens dans un large espace augmente de façon naturelle la collaboration spontanée et la créativité.
Contre-argument : combien de fois ces moments fortuits ont-ils vraiment lieu ? Et même s’ils ont lieu, est-ce que la structure de vos entreprises permet de les exploiter de façon effective ? Vous entrez une optimisation pour un effet de longue traîne au prix de quelque chose qui est bénéfique pour chaque employé, la concentration.
L’occupation comme un intermédiaire de productivité
Argument : Quand tout le monde est présent dans la même salle, les gens sont motivés pour travailler parce que les autres peuvent voir ce qu’ils font.
Contre-argument : c’est une façon terrible d’évaluer la performance au travail. Un manager qui donne plus de valeur à la présence physique de leurs employés n’a pas d’autre façon ou capacité à mesurer le rendu. Si vous jugez la valeur de quelqu’un en vous basant sur leur apparence seulement, bonne chance !
Efficacités des coûts
Argument : on économise de l’argent en n’ayant pas à construire un bureau pour chaque employé.
Contre-argument : super, si vous recrutez des ingénieurs talentueux et des designers qui vous coûtent une fortune et vous les placez dans un environnement où ils sont constamment distraits, on ne peut pas dire que c’est vraiment une bonne façon pour faire des économies.
Les espaces ouverts donnent également aux employés le sentiment d’être surveillés à plein temps, que ça soit de façon active ou passive. En conséquence, ils sont encouragés à faire semblant d’être occupés ou productifs. Ils donnent l’illusion qu’ils sont occupés, mais ils sont moins efficaces, prennent plus de congés maladie et leur communication et bonheur prennent une raclée. Bref, un espace ouvert ne représente pas un meilleur compromis.
Les alternatives
Si les espaces ouverts ne sont pas aussi efficaces comme ils ont été toujours glorifiés, cela ne veut pas dire qu’il n’existe pas d’autres alternatives pour créer de meilleurs environnements de travail. En réalité, il y a une panoplie de concepts qui ont été proposés, en voici quelques exemples :
Hub and Spoke
En combinant le meilleur des deux mondes, les espaces dits Hub and Spoke consistent à lier un ensemble de bureaux individuels et d’espaces communs par une seule entrée. De cette façon, les gens ont le choix de collaborer ou se concentrer seuls dans leurs bureaux. Les espaces Hub and Spoke sont dotés aussi de larges espaces et couloirs qui doivent être traversés, ce qui encourage la conversation.
Une vue aérienne du Building 20 dans le MIT, tous ces bureaux ont une seule entrée centrale
Le Building 20 du MIT a été un exemple célèbre de l’approche Hub and Spoke. Ce bâtiment est devenu célèbre en raison du nombre d’innovations qui ont été mises au point entre ses murs. Certains ont attribué cette réussite à la structure unique du bâtiment. Les couloirs et les escaliers ont permis des collisions de créativité entre le personnel, pas des lignes d’employés encombrés l’un près de l’autre.
La machine Eudaimonía
L’eudaimonia est un concept grec qui fait référence à « l’état où vous s’achève le plein potentiel humain ». Le concept de la Machine Eudaimonia a été relaté par David Dewane dans le livre Deep Work, selon ce concept, il y a quatre espaces qui sont progressivement axés sur le travail concentré :
La galerie
C’est la première salle que vous entrez une fois que vous accédez au bâtiment. Cette salle doit contenir des exemples du travail réalisé. Elle a pour objectif d’inspirer les utilisateurs de la machine, en créant une culture saine où il n’y a pas de stress ou de pression.
Le salon
Le salon est conçu pour créer un climat qui plane entre curiosité intense et argumentation. Cette pièce existe pour mener des débats autour des idées qui vont être développées amplement par la machine.
La bibliothèque
Après le salon, vous entrez dans la bibliothèque. Cette salle loge un archivage permanent de tout le travail produit par la machine ainsi que les livres et autres ressources utilisées dans des travaux antérieurs.
Le bureau
La salle suivante est le bureau. Il regroupe une salle de conférence avec un tableau blanc et quelques compartiments avec des bureaux. Le bureau est conçu pour le travail de basse intensité.
La chambre
Nous arrivons enfin à la salle finale de la machine, une collection que Dewane appelle « les chambres de travail approfondi ». Chaque chambre a 1,8 m de largeur et 3 m de longueur, et elle est protégée par des murs épais insonorisés. Le but de cette chambre est de permettre la concentration totale et éviter toute interruption.
La cabine de l’écrivain
Peut-être que vous travaillez dans une startup ou que votre situation ne permet pas d’entrer des ajustements significatifs à votre espace de travail ou votre structure. Ne pas avoir le contrôle de votre environnement rend difficile l'achèvement de tout travail.
Pour cela, il faut essayer de trouver votre équivalent de la cabine de l’écrivain, un lieu où vous pourrez réaliser un travail sérieux sans interruption. Ça peut être un café, une bibliothèque ou le jardin de votre maison. La cabine est votre espace où vous réalisez votre travail.
La solution finale
Faites une évaluation de vous-même et trouvez l'endroit où vous êtes le plus efficace et où vous atteignez un rythme de travail optimal. Les évaluations sont pratiques, car nous faisons souvent des choses qui apparaissent logiques, mais au fond elles sont contre-productives. Jeter un coup d’œil sur les résultats est un investissement nécessaire de votre temps.
Source : Medium
Et vous ?
Avez-vous déjà travaillé dans un open space ?
Comment a été votre expérience ?
Voir aussi :
Les bureaux open spaces ont un impact négatif sur notre mémoire d'après un article publié par la BBC