USA : un tribunal estime qu'un suspect a l'obligation de déchiffrer ses disques durs
Si la police pense y trouver des preuves pouvant l'incriminer
Le 2017-03-21 17:58:41, par Michael Guilloux, Chroniqueur Actualités
Cela fait 17 mois que Francis Rawls, un ancien sergent de la police de Philadelphie est détenu en prison. Les raisons ? Il est suspecté d'avoir du contenu lié à la pornographie juvénile sur deux disques durs externes qu'il refuse de déverrouiller, pour permettre à la police d'en vérifier le contenu.
Dans le cadre de l’enquête, la police a saisi du matériel appartenant à monsieur Rawls. Il s’agit entre autres d’un iPhone 5S, un Mac Pro et ses deux disques durs externes. D’après les documents du tribunal, le suspect « a volontairement fourni le mot de passe pour l'iPhone 5S d'Apple, mais a refusé de fournir les mots de passe pour déchiffrer l'ordinateur Apple Mac Pro ou les disques durs externes. Malgré son refus, les enquêteurs ont découvert le mot de passe pour déchiffrer le Mac Pro, mais n'ont pas pu déchiffrer les disques durs externes. »
Les enquêteurs n’ont pas trouvé de contenu pédopornographique sur le Mac Pro, mais une analyse de la machine a révélé des traces de pornographie juvénile. Les fichiers journaux indiquaient par exemple des termes couramment utilisés dans cette forme d’exploitation juvénile. En plus, « l'examen a montré que [Francis Rawls] a accédé ou tenté d'accéder à plus de 20 000 fichiers avec des noms de fichiers compatibles avec une évidente pornographie juvénile ».
Pour le tribunal de première instance qui a jugé cette affaire, il n’y a aucun doute que le suspect détienne ce type de contenu. Il estime d’ailleurs que les fichiers en question ont été stockés sur les disques durs que Rawls refuse de déchiffrer. Accusé de faire outrage au tribunal, le suspect a donc été détenu en prison depuis maintenant 17 mois. Il affirme pourtant ne pas se souvenir des mots de passe nécessaires pour débloquer les disques durs et a même essayé plusieurs mots de passe incorrects.
Dans un dépôt à la Cour d’appel, l’avocat de l’accusé conteste donc cette décision, soutenant que son client a été incarcéré sans avoir été jugé coupable pour aucun crime relatif à la pornographie juvénile, mais à cause de son incapacité de débloquer les deux disques durs externes. L’appel remet en cause la capacité du gouvernement fédéral à obliger le déchiffrement des appareils numériques lorsqu’il saisit ces appareils en vertu d'un mandat de perquisition valide. Rawls estime par ailleurs qu’en le forçant à révéler ses mots de passe, sa protection du Cinquième Amendement contre l’auto-incrimination est violée ; un argument qui a été rejeté par le tribunal.
Dans une décision rendue ce lundi, la Cour d’appel du troisième circuit des États-Unis a décidé de ne pas s’opposer à la décision rendue par le tribunal de première instance rejetant l’argument de violation du Cinquième Amendement. Ce nouveau verdict se base sur une règle qui stipule que « le Cinquième Amendement ne protège pas un acte de production de preuve [ici le déchiffrement des dispositifs] lorsque l'existence, la détention et l'authenticité de la preuve est une « conclusion prévisible » qui « ajoute peu ou rien à la quantité d’informations du gouvernement fédéral ». Pour que la règle s'applique, le gouvernement doit être en mesure de « décrire avec une précision raisonnable » les documents ou éléments de preuve qu'il cherche à imposer.
Dans le cas de Rawls, la Cour estime en effet qu’en demandant à l’accusé de débloquer ses dispositifs, on ne le force pas à témoigner contre lui-même ou fournir des preuves qui pourraient l’incriminer, puisque les autorités disent qu’elles savent déjà qu’il y a du contenu de pornographie juvénile sur les disques durs. La Cour d’appel indique également que « l'acte de déchiffrer des dispositifs ne serait pas un témoignage dans le sens du privilège du Cinquième Amendement contre l'auto-incrimination. Le Cinquième Amendement ne s'applique que lorsque l'accusé est obligé de faire une communication testimoniale qui est incriminante. Et pour être un témoignage, une communication doit explicitement ou implicitement… relater un fait ou divulguer de l'information », ce qui ne semble pas être le cas de Rawls. Cela signifie que le suspect va rester indéfiniment en prison, à moins que cette décision soit levée.
Source : Décision de la Cour d’appel
Et vous ?
Qu’en pensez-vous ?
Que prévoit la loi en France dans ce genre de situation ?
Dans le cadre de l’enquête, la police a saisi du matériel appartenant à monsieur Rawls. Il s’agit entre autres d’un iPhone 5S, un Mac Pro et ses deux disques durs externes. D’après les documents du tribunal, le suspect « a volontairement fourni le mot de passe pour l'iPhone 5S d'Apple, mais a refusé de fournir les mots de passe pour déchiffrer l'ordinateur Apple Mac Pro ou les disques durs externes. Malgré son refus, les enquêteurs ont découvert le mot de passe pour déchiffrer le Mac Pro, mais n'ont pas pu déchiffrer les disques durs externes. »
Les enquêteurs n’ont pas trouvé de contenu pédopornographique sur le Mac Pro, mais une analyse de la machine a révélé des traces de pornographie juvénile. Les fichiers journaux indiquaient par exemple des termes couramment utilisés dans cette forme d’exploitation juvénile. En plus, « l'examen a montré que [Francis Rawls] a accédé ou tenté d'accéder à plus de 20 000 fichiers avec des noms de fichiers compatibles avec une évidente pornographie juvénile ».
Pour le tribunal de première instance qui a jugé cette affaire, il n’y a aucun doute que le suspect détienne ce type de contenu. Il estime d’ailleurs que les fichiers en question ont été stockés sur les disques durs que Rawls refuse de déchiffrer. Accusé de faire outrage au tribunal, le suspect a donc été détenu en prison depuis maintenant 17 mois. Il affirme pourtant ne pas se souvenir des mots de passe nécessaires pour débloquer les disques durs et a même essayé plusieurs mots de passe incorrects.
Dans un dépôt à la Cour d’appel, l’avocat de l’accusé conteste donc cette décision, soutenant que son client a été incarcéré sans avoir été jugé coupable pour aucun crime relatif à la pornographie juvénile, mais à cause de son incapacité de débloquer les deux disques durs externes. L’appel remet en cause la capacité du gouvernement fédéral à obliger le déchiffrement des appareils numériques lorsqu’il saisit ces appareils en vertu d'un mandat de perquisition valide. Rawls estime par ailleurs qu’en le forçant à révéler ses mots de passe, sa protection du Cinquième Amendement contre l’auto-incrimination est violée ; un argument qui a été rejeté par le tribunal.
Dans une décision rendue ce lundi, la Cour d’appel du troisième circuit des États-Unis a décidé de ne pas s’opposer à la décision rendue par le tribunal de première instance rejetant l’argument de violation du Cinquième Amendement. Ce nouveau verdict se base sur une règle qui stipule que « le Cinquième Amendement ne protège pas un acte de production de preuve [ici le déchiffrement des dispositifs] lorsque l'existence, la détention et l'authenticité de la preuve est une « conclusion prévisible » qui « ajoute peu ou rien à la quantité d’informations du gouvernement fédéral ». Pour que la règle s'applique, le gouvernement doit être en mesure de « décrire avec une précision raisonnable » les documents ou éléments de preuve qu'il cherche à imposer.
Dans le cas de Rawls, la Cour estime en effet qu’en demandant à l’accusé de débloquer ses dispositifs, on ne le force pas à témoigner contre lui-même ou fournir des preuves qui pourraient l’incriminer, puisque les autorités disent qu’elles savent déjà qu’il y a du contenu de pornographie juvénile sur les disques durs. La Cour d’appel indique également que « l'acte de déchiffrer des dispositifs ne serait pas un témoignage dans le sens du privilège du Cinquième Amendement contre l'auto-incrimination. Le Cinquième Amendement ne s'applique que lorsque l'accusé est obligé de faire une communication testimoniale qui est incriminante. Et pour être un témoignage, une communication doit explicitement ou implicitement… relater un fait ou divulguer de l'information », ce qui ne semble pas être le cas de Rawls. Cela signifie que le suspect va rester indéfiniment en prison, à moins que cette décision soit levée.
Source : Décision de la Cour d’appel
Et vous ?
-
NeckaraInactifEncore heureux qu'il ai été libéré. Ce qui est aberrant est même qu'il ai été condamné pour avoir refusé de déverrouiller ses disques durs.
Vous imaginez ? N'importe qui pourrait vous accuser de n'importe quoi, sur aucune base concrète, vous forçant de dévoiler le contenu de votre ordinateur ?
Cela violerait non seulement, et de manière flagrante, le droit à la vie privée, mais en plus d'autres libertés/secrets.
Vous avez un journaliste qui a publié un témoignage anonyme qui vous pose problème ? Vous voulez retrouver la personne qui a témoigné pour vous venger ?
Suffit juste de trouver un des proches du journaliste, ou une autre personne crédible, soit que vous pourrez acheter, soit qui soit en conflit avec le journaliste, et vous pourrez alors récupérer le contenu de son disque dur. Et potentiellement le témoin/lanceur d'alerte.
Idem pour les secrets industiels, secret de l'instruction, etc. Suffit juste d'une accusation.
Ridicule et dangereux.
Derrière, si la personne est réellement pédophile, il y a d'autres moyens que d'accéder à son disque dur pour récupérer des preuves...le 13/02/2020 à 14:48 -
TiranusKBXExpert confirméCette décision n'a rien de surprenante, ils le font déjà à Guantanamo et leurs autres prisons secrètes alors le faire dans les établissement officiels n'est que le prolongement d'une vielle pratiquele 31/08/2017 à 19:49
-
hotcryxMembre extrêmement actifla Cour estime en effet qu’en demandant à l’accusé de débloquer ses dispositifs, on ne le force pas à témoigner contre lui-même ou fournir des preuves qui pourraient l’incriminerle 01/09/2017 à 10:14
-
NeckaraInactifFaire des demandes de log auprès des FAI, et sur demande d'un juge.
Après, tu ne peux pas violer les droits fondamentaux des individus juste sur la base de on-dit.
Ben soit ils ont des preuves, soit ils ont pas de preuves.
Si les preuves ne sont pas suffisantes pour inculpé le suspect, elles ne seront, à mon avis, pas suffisantes pour demander de déverrouillage des disques.
Sachant que dans le droit européen, refuser de déverrouiller est normalement qu'une circonstance aggravante en cas de condamnation, mais en aucun cas un délit en lui-même.le 13/02/2020 à 19:17 -
NeckaraInactifSauf que les logs de ton FAI te dira que Tor a été utilisé… ce qui est déjà un élément de suspicion supplémentaire.
Et qui nous dis que sa sœur ne s'est tout simplement pas disputé avec lui et veut lui nuire ?
Sauf qu'ils ne peuvent le faire que sur autorisation d'un juge. Et le juge n'acceptera jamais de simples on-dit.
De plus, même avec une perquisition, ils ne peuvent pas te forcer à t'auto-incriminer.
Sauf que son disque aura été vu et il aura été diffamé, donc il aura de toute manière perdu.
Ce qui tombe bien si justement le but était de lui nuire, ou d'accéder au contenu de son disque.le 13/02/2020 à 20:17 -
hotcryxMembre extrêmement actifA sa place je ne dirais rien, ils vont devoir le relacher, ils n'ont pas de preuves.
Juste des soupçons.le 22/03/2017 à 10:04 -
abriotdeMembre chevronnéMais surtout c'est tout a fait possible qu'il ne se souvienne plus des mots de passe. Personnellement cela m'est arrivé plus d'une fois. Et je dirais même que c'est courant vu le nombre de demande de réinitialisation de mot de passe. Faire un délit de non-coopération avec la justice est totalement liberticide.
Par contre rien n'empêche la police de copier le contenu et a l'avenir, par brute force le déchiffrer (rien qu'en prenant kles combinaisons posible de ses mot de apsses historique et de sa vie personnelle). En attendant c'est affreusement scandaleux d'enfermer quelqu'un sans preuve.le 22/03/2017 à 13:42 -
Chuck_NorrisMembre émériteSauf qu'il y a des moments où tu es obligé d'avoir ou d'utiliser des mots de passe, par exemple des services en ligne, une boîte mail, etc, du coup on doit en chercher, les mémoriser, parfois on est contraint de les changer régulièrement.
Mais là, l'action de chiffrer ses disques externes est une action volontaire, rien ne l'obligeait à mettre un mot de passe dessus, et vu la quantité de données que cela peut stocker cela serait ballot d'oublier son mot de passe. Et s'il l'avait perdu depuis déjà longtemps, il aurait très bien pu vider ses disques vu que son contenu était perdu pour qu'ils puissent servir à autre chose, non ?
Tu as raison : le délit de fuite par exemple ne devrait plus exister, c'est notre liberté de fuir. On ne devrait plus avoir à répondre à une convocation des juges, c'est une atteinte manifeste à la liberté. On doit pouvoir s'opposer à un mandat de dépôt, c'est une limitation de liberté parfaitement scandaleuse. On devrait pouvoir mentir à tout le monde pour se faire élire afin d'avoir une immunité pour échapper à la justice, parce que les vrais méchants ce sont les enquêteurs, les juges, et certainement pas les hommes honnêtes ciblés qui ne cherchent qu'à exercer leur liberté.
C'est probablement en cours depuis longtemps.
En terme d'incarcération injuste je pense qu'il y a largement pire dans le monde.le 22/03/2017 à 14:32 -
LyonsMembre éclairéL'interprétation du 5ème amendement faite par le tribunal est très arrangeante... La frontière est floue entre "témoigner contre soi-même" et "fournir des preuves qui nous porte préjudice", j'aurais classé les deux dans le même pannier.
Sinon effectivement peut-être qu'ils ont des preuves qui ne sont pas mentionnées dans l'article mais sinon 17 mois de prison pour avoir oublier les passwords de ses disques durs c'est carrément inquiétant.le 23/03/2017 à 0:52 -
xaponMembre habituéIls viennent encore de le prouver.le 31/08/2017 à 20:37