Hyperloop est l’un des projets futuristes et fous présentés par le milliardaire de la tech et entrepreneur en série Elon Musk. En 2013, le patron de Tesla a lancé ce projet de recherche industrielle qu’il a défini comme un cinquième mode de transport, en plus des bateaux, des avions, des voitures et des trains.
Les systèmes Hyperloop sont destinés à déplacer des marchandises (au départ, il était également question de transporter des passagers) aux vitesses des compagnies aériennes, mais à une fraction du coût. Ils sont conçus pour fonctionner suspendus par des systèmes magnétiques dans un tube à vide. Le concept original d’Hyperloop proposait d’utiliser un moteur électrique linéaire pour accélérer et décélérer une nacelle en lévitation sur coussin d’air via un tube basse pression. Le véhicule glisserait silencieusement à des vitesses allant jusqu'à 760 mph (1 223,1 km/h) avec de très faibles turbulences. Le système est proposé comme étant entièrement autonome, silencieux, direct à destination et à la demande. Comme il est proposé de le construire sur des colonnes ou dans des tunnels souterrains, il éliminerait les dangers des passages à niveau et nécessiterait des emprises plus petites qu'un train à grande vitesse ou une autoroute. Virgin Hyperloop a apporté des modifications techniques substantielles à la proposition initiale d'Elon Musk et a choisi de ne pas poursuivre la route théorique de Los Angeles à San Francisco envisagée par Musk dans son livre blanc de 2013 sur la conception alpha.
La société a levé 295 millions de dollars le 18 décembre 2017 et a fait la démonstration d'une forme de technologie de propulsion le 11 mai 2016 sur son site d'essai du nord de Las Vegas. Elle a réalisé une Developpment Loop (DevLoop) de 500 mètres et a réalisé le 12 mai 2017 son premier test à grande échelle. Le test combinait des composants Hyperloop, notamment le vide, la propulsion, la lévitation, le traîneau, les systèmes de contrôle, les tubes et les structures. En mai 2019, l'entreprise avait levé 400 millions de dollars.
Le 8 novembre 2020, après plus de 400 tests sans équipage, l'entreprise a mené le premier (et seul) essai avec l'homme à une vitesse de 172 km/h sur son site d'essai de Las Vegas, Nevada. Cependant, en février 2022, l’entreprise a abandonné ses projets de voyages à dimension humaine et s’est plutôt concentrée sur le fret, licenciant plus d’une centaine d’employés, soit la moitié de son effectif total. Plus tard en novembre de la même année, la société a accepté d'abandonner la marque Virgin et de revenir au nom Hyperloop One.
Le 21 décembre 2023, Bloomberg a annoncé la fermeture d'Hyperloop.
L'entreprise vend ses actifs, ferme ses bureaux et licencie du personnel. Elle fermera officiellement ses portes à la fin de l'année, date à laquelle toute sa propriété intellectuelle sera transférée à son actionnaire majoritaire, le principal opérateur portuaire de Dubaï, DP World.
Depuis sa création en 2014, la société a levé environ 450 millions de dollars en fonds de capital-risque et autres investissements. Bien qu’il existe encore une petite poignée de startups qui tentent de construire des hyperloops, la disparition de l’une des plus grandes sociétés d’hyperloop marque la fin du rêve né avec le soi-disant « papier alpha » d’Elon Musk en 2013.
Elon Musk n’avait jamais voulu que le train Hyperloop se concrétise
Dix ans plus tard, le constat est clair : Hyperloop a été un fiasco au moins pour la métropole de Toulouse qui essaie de tourner la page.
Pourtant, selon le Times, Elon Musk a admis qu'il n'a jamais eu l'intention de construire l'Hyperloop. La réelle intention du multimilliardaire américain était de faire annuler le projet de TGV en Californie. Mais c'est apparemment une information cruciale dont ne disposait pas la Métropole de Toulouse où s’est implanté dès 2017 un projet visait à déployer Hyperloop d'Elon Musk.
Une vingtaine d’embauches ont eu lieu et des subventions publiques ont même été avancées. Après avoir démarré avec beaucoup d'enthousiasme, le projet a fini par être abandonné. En décembre 2021, le conseil de la Métropole a voté la résiliation du bail pour la piste d'essai d'un kilomètre sur l'ancienne base aérienne de Toulouse Francazal.
Le site Hyperloop sur l'ancienne base militaire de Toulouse-Francazal
Aujourd'hui, la métropole essaie encore d'effacer les souvenirs de ce fiasco industriel. En juillet 2023, Hyperloop TT (Transportation Technologies), la start-up américaine chargée de déployer le projet, a été sommée de quitter les lieux avant septembre 2023. Récemment, les services municipaux ont repeint en blanc le logo d'Hyperloop TT affiché en grand sur un château d'eau sur le site de Toulouse-Francazal ; une action symbolique qui marque la fin du projet de train du futur. Mais, il faut plus d'un coup de pinceau pour faire oublier Hyperloop. Ses gigantesques tubes sont encore présents et le projet aura coûté des millions d'euros à la métropole. L'entreprise américaine a en effet reçu des aides publiques et a bénéficié d'un rabais sur son loyer pour s'installer. Elle n'a pas non plus payé pour la dépollution du site et la rénovation promise de certains bâtiments.
« L'entreprise devait prendre en charge les coûts de dépollution du site et rénover les bâtiments », explique Maxime Texier, élu de la Métropole toulousaine et membre d'Archipel Citoyen. « Finalement, c'est la métropole qui s'en est chargée pour un coût de 5,5 millions d'euros », dit-il. La société Hyperloop TT a également bénéficié d'un loyer modéré, 70 000 euros par an. « La société n'a pas respecté ses engagements prévisionnels », déplore Albert Sanchez, maire de Cugnaux, « les tuyaux en métal sont là sur la piste ».
Les mises en garde des experts contre le projet Hyperloop ignorées : une « formidable escroquerie technico-intellectuelle »
Fin 2018, François Lacôte avait qualifié le projet Hyperloop d'Elon Musk de « formidable escroquerie technico-intellectuelle ». Il est important de préciser que François Lacôte est un ingénieur et industriel français spécialisé dans l'industrie ferroviaire. Diplômé de l'École polytechnique, puis de l'École nationale des ponts et chaussées, il a dirigé la réalisation et les campagnes d'essais de pratiquement toutes les générations de TGV au sein de la SNCF, puis d'Alstom.
François Lacôte estime avant tout que le postulat de départ du projet Hyperloop est inexact. Comme d’autres projets de transport terrestre guidés réputés « innovants », le projet Hyperloop se fonde sur la pétition de principe que le système roue-rail connaît plusieurs limites, comme le fait que la limite technique de vitesse du système ferroviaire tournerait autour de 200-250 km/h. Mais c'est un postulat faux, d'après François Lacôte, puisqu'une campagne d'essais a montré que le système ferroviaire dit traditionnel a un potentiel technique de vitesse d’au moins 500 km/h.
Les autres limites attribuées au système roue-rail sont la limite énergétique et le coût de l'infrastructure. Lacôte explique que la limite énergétique vient essentiellement de la résistance aérodynamique (qui s'applique de la même manière à tous les systèmes de transport terrestre) et de manière insignifiante de la résistance au roulement du contact roue-rail. Alors, les systèmes ne faisant plus appel au contact roue-rail ne bénéficient d’aucun avantage spécifique. En ce qui concerne le coût de l’infrastructure, il affirme également qu'il n’est que très faiblement lié à la technologie ferroviaire.
L'expert français montre également qu'Hyperloop n'apporte rien de nouveau et qu'il n'est que la reprise d’un très vieux projet. François Lacôte rappelle qu’à la fin des années 60 et au début des années 70, de nombreux projets de nouveaux systèmes de transport terrestre furent imaginés, et pour certains développés à grands frais, s’appuyant sur ce même faux postulat que le système ferroviaire était limité en pertinence technique et économique du fait de l’existence du contact entre mobile et infrastructure, soit le contact roue-rail.
Conclusion
Les critiques ont déclaré que même si l’hyperloop est techniquement réalisable, il ne s’agit toujours que d’un vaporware (ou produit fantôme, il s'agit d'un logiciel ou matériel informatique annoncé mais dont la date de sortie est repoussée à plusieurs reprises). On a qualifié cela de « vision utopique » qui serait financièrement impossible à réaliser. En 2017, les hauts dirigeants de Virgin Hyperloop ont déclaré qu’ils s’attendaient à voir « des hyperloops fonctionnels dans le monde entier… d’ici 2020 ». Cette date limite a ensuite été repoussée à 2021.
Pendant la pandémie, presque tous les hauts dirigeants et fondateurs ont quitté Hyperloop One, qui a également supprimé le nom Virgin de son nom après que la société a décidé d'éviter les voyages de passagers au profit du fret.
Aujourd’hui, il n’existe aucun hyperloop à grande échelle dans le monde. Le tunnel d’essai de Musk en Californie a disparu. L’homme lui-même est devenu plus enclin à approuver des théories antisémites qu’à résoudre le problème de la circulation automobile.
The Boring Company, l’entreprise de tunnels de Musk, creuse toujours des passages souterrains à Las Vegas – mais pour Teslas, pas pour des hyperloops. L’avenir, semble-t-il, est à peu près le même que le présent.
Source : Bloomberg
Et vous ?
Que pensez-vous d'une entreprise comme celle-là ? Êtes-vous surpris de voir l'aventure s'achever de la sorte ?
Quels sont les avantages et les inconvénients de l’Hyperloop par rapport aux autres modes de transport existants, comme le train, l’avion ou la voiture ?
Quels sont les principaux défis techniques et réglementaires à surmonter pour rendre l’Hyperloop opérationnel et sûr ?
Quels sont les potentiels économiques et sociaux d'un tel projet, notamment en termes de création d’emplois, de réduction des distances et de désenclavement des territoires ? Est-il, selon vous, réalisable ?
Que pensez-vous de la vision d’Elon Musk derrière le projet Hyperloop et comment se situe-t-il par rapport à ses autres initiatives comme SpaceX ou Tesla ?