Epic Games, l'éditeur du jeu vidéo Fortnite, a annoncé mercredi avoir déposé une plainte contre Apple auprès de la Commission européenne pour abus de position dominante dans la distribution et les systèmes de paiement des applications mobiles.
Apple a retiré Fortnite de l’App Store depuis le 13 août dernier après qu’Epic ait lancé une mise à jour du jeu comportant son propre système de paiement in-app.
Le système de paiement d’Epic lui permet en effet d’éviter de payer les 30 % de commissions exigées par Apple lors des achats dans les applications. L’éditeur du jeu Fortnite a alors demandé une ordonnance dans le but d’obliger Apple à remettre le jeu dans sa boutique jusqu’à la fin de la bataille judiciaire. Mais la juge a estimé que le développeur de jeu a rompu son contrat en tout état de cause et était donc en train d’en subir les conséquences.
« Epic savait qu'il violait les termes de son contrat avec Apple lorsqu'il a publié la mise à jour, mais il l'a quand même fait », a déclaré Rogers, accusant la société de malhonnêteté. « Vous avez fait une chose, vous avez menti par omission, par manque de franchise », a rappelé Rogers à Epic. « Il y a beaucoup de gens dans le public qui vous considèrent comme des héros pour ce que vous avez fait, mais vous ne procédez pas de la façon la plus honnête ».
Ainsi, le refus d’accorder l'ordonnance à Epic signifie que la situation dans laquelle Epic est interdit de publier de nouveaux jeux sur iOS et ne peut pas distribuer Fortnite sur l'App Store sous sa forme actuelle restera en place pendant la durée du procès, à moins qu'Epic ne décide de supprimer son propre système de paiement in-app qui a déclenché l'amère querelle juridique en août.
La bataille ne s'est pas limitée au pays de l'oncle Sam. Epic a attaqué Apple sous d'autres cieux, notamment en Australie et au Royaume-Uni, comme l'a rappelé le développeur dans un communiqué :
« Epic Games a annoncé aujourd'hui avoir déposé une plainte antitrust contre Apple dans l'Union européenne («UE»), élargissant la lutte de l'entreprise pour promouvoir des pratiques de plateforme numérique plus équitables pour les développeurs et les consommateurs.
« La plainte, déposée auprès de la direction générale de la concurrence de la Commission européenne, allègue que, grâce à une série de restrictions anticoncurrentielles soigneusement conçues, Apple a non seulement nui, mais complètement éliminé la concurrence dans les processus de distribution et de paiement d'applications. Apple utilise son contrôle de l'écosystème iOS pour en tirer profit tout en bloquant ses concurrents et sa conduite est un abus de position dominante et une violation du droit de la concurrence de l'UE.
« La plainte complète les processus juridiques déjà en cours aux États-Unis et en Australie, ainsi que le récent dépôt d'Epic devant le tribunal d'appel de la concurrence du Royaume-Uni ».
« Ce qui est en jeu ici, c'est l'avenir même des plateformes mobiles », a estimé le fondateur et PDG d'Epic Games, Tim Sweeney. « Les consommateurs ont le droit d'installer des applications à partir des sources de leur choix et les développeurs ont le droit de rivaliser sur un marché équitable. Nous ne resterons pas les bras croisés et ne laisserons pas Apple utiliser sa domination de plateforme pour contrôler ce qui devrait être un terrain de jeu numérique égal. C'est mauvais pour les consommateurs, qui paient des prix gonflés en raison du manque total de concurrence entre les magasins et du traitement des paiements via l'application. Et c'est mauvais pour les développeurs, dont les moyens de subsistance dépendent souvent de l'entière discrétion d'Apple quant à savoir qui autoriser sur la plateforme iOS et à quelles conditions ».
Dans son communiqué, Epic indique avoir été lésé par les restrictions anticoncurrentielles d'Apple concernant les paiements et la distribution d'applications : « Quand Epic a donné aux joueurs Fortnite sur iOS le choix entre le paiement Apple et le paiement direct Epic, en transférant les économies aux acheteurs directs, Apple a riposté en bloquant les mises à jour Fortnite. Lorsque Epic a cherché à amener Epic Games Store sur iOS, Apple a refusé. Et tandis qu'Apple a lancé son propre service de distribution de jeux, Apple Arcade, il a interdit à des concurrents, dont Epic, de faire de même ».
L’éditeur estime que les implications de cette affaire vont beaucoup plus loin que son simple combat contre Apple : « il s'agit de savoir si les consommateurs et les développeurs peuvent faire des affaires ensemble directement sur des plateformes mobiles ou sont contraints d'utiliser des canaux de monopole contre leurs souhaits et leurs intérêts ».
Et d’indiquer : « Epic a demandé à la Commission de remédier au comportement anticoncurrentiel d'Apple en imposant des recours rapides et efficaces. Epic ne demande pas de dommages et intérêts à Apple, comme c'est le cas aux États-Unis, en Australie et au Royaume-Uni. Il recherche simplement un accès et une concurrence équitables qui profiteront aux consommateurs et aux développeurs ».
Suite aux plaintes d'autres développeurs d'applications, la Commission européenne enquête déjà sur le comportement abusif d'Apple
Parmi les plaignants nous pouvons citer Telegram, une application de messagerie sécurisée.
Dans un billet de blog, le cofondateur et PDG de Telegram, Pavel Durov, a exposé sept raisons pour lesquelles il pense que les utilisateurs d'iPhone devraient s'inquiéter du comportement de l'entreprise. Ces raisons vont de l'affirmation que les 30 % de frais qu'Apple impose aux développeurs d'applications entraînent une hausse des prix pour les utilisateurs d'iPhone.
« La commission de 30 % d'Apple rend toutes les applications et les produits numériques plus chers pour vous. Elle s'ajoute au prix que vous payez aux développeurs pour tous les services et jeux que vous achetez sur votre téléphone. Vous payez plus cher pour chaque application, même si Apple vous a déjà facturé quelques centaines de dollars de plus pour votre iPhone qu'il en a coûté pour le fabriquer. En bref, vous continuez à payer même après avoir payé », a-t-il écrit.
D’autres raisons évoquées par Durov sont des préoccupations de censure, étant donné qu'Apple contrôle ce qui est autorisé et ce qui ne l’est pas sur son magasin en ligne ; il critique également des retards dans les mises à jour des applications qui découlent du processus d'examen des applications d'Apple ; il affirme aussi que la structure de l'App Store est hostile à la vie privée des utilisateurs : « Les politiques d'Apple poussent l'ensemble du secteur à vendre des données utilisateur au lieu de les laisser adopter des modèles commerciaux plus respectueux de la vie privée, comme la vente de services supplémentaires à leurs utilisateurs ».
« Chaque trimestre, Apple reçoit des milliards de dollars des applications tierces. Pendant ce temps, les dépenses nécessaires pour héberger et réviser ces applications se chiffrent en dizaines de millions, et non en milliards de dollars. Nous le savons parce que nous, au Telegram, nous hébergeons et révisons plus de contenu public que l'App Store ne le fera jamais ».
Selon un autre argument réfuté par le PDG de Telegram, iOS fait face à une concurrence importante des développeurs, ou que les développeurs peuvent choisir de ne pas développer pour iOS et de ne publier que des applications pour Android.
« Essayez d'imaginer Telegram ou TikTok comme des applications uniquement pour Android et vous comprendrez rapidement pourquoi il est impossible d'éviter Apple », écrit-il. « Vous ne pouvez pas simplement exclure les utilisateurs d'iPhone. Quant aux utilisateurs d'iPhone, le coût pour les consommateurs de passer d'un iPhone à un Android est si élevé qu'il peut être considéré comme un verrouillage monopolistique », a-t-il écrit en citant une étude réalisée par l'Université Yale pour étayer cette affirmation.
Source : Epic
Epic Games dépose une plainte contre Apple auprès de la Commission européenne pour abus de position dominante
Dans la distribution et les systèmes de paiement des applications mobiles sur iOS
Epic Games dépose une plainte contre Apple auprès de la Commission européenne pour abus de position dominante
Dans la distribution et les systèmes de paiement des applications mobiles sur iOS
Le , par Stéphane le calme
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