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L'UE s'engage à investir jusqu'à 145 milliards d'euros pour développer des processeurs de nouvelle génération

Et faire évoluer le procédé de gravure à 2 nm pour les processeurs

Le 2021-01-02 22:57:32, par Olivier Famien, Chroniqueur Actualités
Au début du mois de décembre dernier, une vidéoconférence des ministres des Télécommunications des pays de l’Union européenne a eu lieu au cours de laquelle les représentants des différents pays ont décidé de renforcer leur coopération dans les domaines de la conception et de la fabrication des processeurs de nouvelle génération et des technologies de semi-conducteurs à faible consommation énergétique pour l’application dans un large éventail de secteurs. Dans les faits, cela s’est traduit par la signature d’une déclaration commune de 18 États qui s’engagent à travailler ensemble afin d’investir jusqu’à 145 milliards d'euros sur 2 à 3 ans dans les domaines cités, ce qui inclut les puces et les systèmes embarqués qui offrent les meilleures performances pour des applications spécifiques dans un large éventail de secteurs, ainsi qu’une fabrication de technologies de pointe évoluant progressivement vers des processus de gravure en 2 nm pour les processeurs.

Selon le rapport de la Commission de l’UE, l’objectif de cette initiative est de rendre l’Europe de moins en moins dépendante des puces produites dans d’autres régions du monde, mais aussi de renforcer la position de l’Europe dans le domaine des processeurs et des semi-conducteurs. En effet, pour les États membres de l’UE, cette orientation stratégique est un passage obligé pour garantir la souveraineté technologique et la compétitivité de l’Europe, et aussi pour renforcer des capacités de l’UE afin de relever les principaux défis environnementaux et sociétaux et faire face aux nouveaux marchés émergents de masse.

Actuellement, l’Europe possède des atouts notables dans des domaines spécifiques de l’industrie des semi-conducteurs, tels que l’électronique, les technologies de fréquence radio, les capteurs intelligents pour l’intelligence artificielle intégrée, les microcontrôleurs, les technologies à faible consommation d’énergie, les composants sécurisés et les équipements de fabrication de semi-conducteurs. De même, les fabricants de puces européens bénéficient d’une forte présence mondiale sur les marchés verticaux tels que les systèmes embarqués pour la fabrication automobile et industrielle. L’Europe a également une position technologique forte dans les réseaux mobiles, y compris les technologies 5G actuelles et les technologies 6G émergentes.

Cependant, la part de l’Europe sur le marché mondial des semi-conducteurs estimée à 440 milliards d’euros est d’environ 10 %, bien en deçà de sa position économique. Par ailleurs, alors que la nouvelle réalité géopolitique, industrielle et technologique montre que les grandes régions du monde renforcent leurs écosystèmes locaux de semi-conducteurs afin d’éviter une dépendance excessive aux importations, l’Europe, quant à elle, est de plus en plus dépendante des puces produites dans d’autres régions du monde — notamment celles utilisées pour les communications électroniques, le traitement des données et les tâches de calcul, y compris les processeurs.


C’est donc pour corriger cette réalité que les 18 États ont signé cette déclaration commune pour renforcer les capacités de l’Europe afin de concevoir et éventuellement fabriquer la prochaine génération de processeurs fiables et de faible consommation énergétique, pour des applications dans la connectivité à haut débit, les véhicules automatisés, l’aérospatiale et la défense, la santé et l’agroalimentaire, l’intelligence artificielle, les centres de données, la photonique intégrée, le calcul intensif, l’informatique quantique, et dans bien d’autres domaines. Selon Thierry Breton, commissaire chargé du marché intérieur, « ;l’Europe a tout ce qu’il faut pour se diversifier et réduire les dépendances critiques, tout en restant ouverte. Il va donc falloir se fixer des plans ambitieux, de la conception à la fabrication des puces avancées évoluant vers des nœuds de 2 nm, dans le but de se différencier et de diriger nos chaînes de valeur les plus importantes. L’effort conjoint d’aujourd’hui, très bien accueilli, constitue un pas en avant important — il ouvrira la voie au lancement d’une alliance industrielle. Une approche collective peut nous aider à tirer parti de nos forces existantes et à saisir de nouvelles opportunités, car les puces avancées de processeurs jouent un rôle de plus en plus important pour la stratégie industrielle et la souveraineté numérique de l’Europe ;».

Les pays qui ont signé l’initiative sont la Belgique, la France, l’Allemagne, la Croatie, l’Estonie, l’Italie, la Grèce, Malte, l’Espagne, Les Pays-Bas, le Portugal, L’Autriche, la Slovénie, la Slovaquie, la Roumanie, la Finlande, Chypre, la Pologne. Pour que le projet puisse porter ses fruits, cela nécessitera des investissements provenant du budget de l’UE, mais aussi des budgets nationaux (y compris si possible par le biais des plans nationaux de relance et de résilience) et du secteur privé. S’il est mené comme il se doit, ce projet pourrait remettre l’UE en pole position dans le domaine des processeurs et des semi-conducteurs. Déjà, nous avons par exemple ASML, l’entreprise néerlandaise, qui est l’un des leaders mondiaux dans la fabrication de machines de photolithographie pour l’industrie des semi-conducteurs. Il serait le seul à produire des machines de lithographie ultraviolette extrême.

Toutefois, pour plusieurs personnes qui ne partagent pas l’optimisme des dirigeants qui ont signé l’initiative, même si le projet s’avère nécessaire et louable, les investissements alloués iront probablement dans les poches de bureaucrates surpayés à occuper des postes administratifs.

Télécharger la déclaration commune de l’initiative

Source : Commission européenne

Et vous ?

Que pensez-vous de cette initiative ;? Pourra-t-elle atteindre son objectif ;?

Pensez-vous que l’Europe pourra se rendre de moins en moins dépendante des importations de puces et semi-conducteurs ;?
  Discussion forum
23 commentaires
  • yahiko
    Rédacteur/Modérateur
    Ca va dans le bon sens. Il y a un début de stratégie et de vision industrielle à une échelle européenne.

    Il aura fallut la montée des populismes (pour ne pas dire des extrémismes) un peu partout en Europe et dans le monde, ainsi que du Brexit, pour que l'UE ne se résume plus uniquement à l'ouverture des frontières au tout venant, la libéralisation de son marché et l'empilement de normes déconnectées de la réalité.

    Maintenant, 145 milliards, c'est juste le minimum dans la mesure où le principal écueil de ce genre d'initiative est non seulement la bureaucratie qui va sans doute prendre sa dîme au passage, mais surtout sur le risque de saupoudrage de cette somme à une myriade de projets, puisque chaque pays va vouloir faire bénéficier de cette manne financière à ses entreprises.

    C'est là où on atteint les limites de l'initiative publique qui cherche le consensus et les compromis, contrairement à une démarche privée qui cherche le profit, et donc souvent l'efficacité et la concentration.

    Néanmoins, même s'il serait illusoire de pouvoir recréer tout un écosystème industriel de premier plan dans le domaine des semi-conducteurs, il est dans le domaine de l'envisageable de pouvoir faire émerger un équivalent européen d'ARM, spécialisé dans la conception d'architecture de puces, sans la partie fabrication en elle-même qui de toute manière ne serait pas viable économiquement en Europe.
  • krakatoa
    Membre éprouvé
    non pas que je sois pessimiste mais l'europe, depuis 30 ans a perdu un savoir faire industriel.
    les cerveaux part au USA.

    comment ils vont faire pour lancer quelque chose d'extrêmement complexe sans savoir faire, sans les cerveaux...
  • Galet
    Membre confirmé
    Faire de la recherche commune est déjà un bon pas mais ensuite, encore faudrait-il avoir l'outil industriel pour réellement devenir moins dépendant.
    Doit-on rappeler que, pendant ce temps, Nokia ferme des unités de production et de recherche !
    Espérons que le fruit des recherches ne soit pas, une fois de plus, confié à nos amis (les Usa ou la Chine) ... sous couvert d'un accord basé sur une collaboration franche et honnête (sic) !
  • disedorgue
    Expert éminent sénior
    En espérant que la France ne sera pas le grand pilote de tout ça, car au vu de ces exploits actuels, le mieux que l'on puisse espérer dans 10 ans c'est un processeur 2 bits avec une mémoire de 1 demi octet
  • Ryu2000
    Membre extrêmement actif
    Dans la vie on ne peut être sûr de rien ^^.
    Je ne suis pas le biographe de Nokia. Mais en tout cas j'ai trouvé aucune info sur une fonderie Nokia.
    Par contre il doit y avoir STMicroelectronics et NXP qui produisent des semiconducteurs.

    Il semblerait que Nokia ait utilisé ces processeurs :
    - Nokia 2 : Qualcomm Snapdragon 212
    - Nokia 3 : MediaTek 6737
    - Nokia 5 : Qualcomm Snapdragon 430
    - Nokia 6 : Qualcomm Snapdragon 430
    - Nokia 7 : Qualcomm Snapdragon 630
    - Nokia 8 : Qualcomm Snapdragon 660
    - Nokia 9 : Qualcomm Snapdragon 835
  • quicky2000
    Membre actif
    Envoyé par nhugodot
    Pas besoin de x86 ni même d'ARM, l'architecture Risc-V arrive et apparemment avec d'excellentes performances (l'un des fournisseur semble faire mieux que la puce M1 d'Apple!): c'est le Linux des CPU, libre, open source, et une fois la masse critique de participants atteinte pour évoluer rapidement, l'évolution devient exponentielle en rassemblant de plus en plus de concepteurs et fabriquants, et la machine ne s'arrête plus, pour dépasser ARM et Intel/AMD.
    Attention un processeur ne se reduit pas a son jeu d instruction, et un SoC encore moins.
    L'architecture ARM marche tres bien aussi grace aux multiples technos hardware qu il y a en plus du jeu d instructions ( technologies de bus, interconnects, coherences de caches, pipelining etc) et toutes ces technos sont brevetées, sans compter tout l aspect software ( chaines de compilations ARM, Linaro, environnements de debug, outils de développement et d'integration des core etc ). Cela avait deja ete mentionne ici d ailleurs
    Pour ce qui est du RiscV c'est effectivement tres prometteur sur le papier mais pour l instant je n ai pas vu de bench independant de la solution Micro Magic ( j imagine que c est de ce fournisseur dont il est question ) qui confirmeraient les performances. L'industrie regarde du cote de RiscV comme alternative ( le rachat de ARM par Nvidia va surement accelerer le mouvement a cause du risque d embargo des US vis a vis des gros clients chinois comme Huawei ou auttres ) mais je doute que la bascule soit s y rapide que ça.
  • byrautor
    Membre éclairé
    Utopie quand tu nous tiens !
    Ce ne sont pas tellement des milliards d'euros qui sont indispensables, mais des ingénieurs ! (et du matériel introuvable, 2 nm !)
    C'est vrai maintenant que tous nos diplômés sont OBLIGES de parler anglais, alors pourquoi rester en Europe avec des impôts à 60 % des revenus alors qu'au Texas par exemple il n'y a pas d'impôt sur le revenu. Il reste l'impôt fédéral je crois.
    Même en Californie, que beaucoup de firmes abandonnent pour d'autres motifs que l'impôt, l'imposition est à 16 %
    Enfin, les communicateurs en tous genres auront leur pactole, c'est le principal pour nos médias.
  • defZero
    Membre extrêmement actif
    Que pensez-vous de cette initiative ;? Pourra-t-elle atteindre son objectif ;?

    J'en pense que les Pays Européen participant (vous noterez qu'ils sont loin les 27) ont débloqués un budget sans cahier des charges.
    Partant de là, j'estime que l'objectif ne sera pas atteint, tout simplement car les gens qui débloque les budgets n'ont aucune idée d'où, ni dans quoi vas aller les font.

    Pensez-vous que l’Europe pourra se rendre de moins en moins dépendante des importations de puces et semi-conducteurs ;?

    Concrètement, non, car la fabrication n'est pas rentable au coup de production Européen ou alors il faudra fortement automatisé ce qui coutera plus cher et nécessitera de rentabilisé l'investissement sur beaucoup, beaucoup plus longtemps.
    Sachant la vitesse à laquelle les technologies évoluent, on pourra produire, mais pas être compétitif niveau perf face à la concurrence.
    Après c'est une question de besoin.
    Est-ce que tout le monde a besoin des toutes dernière technologie ?
    Personnellement, je ne le pense pas, mais bon en face on a des gens qui achète des iPhone à +1000€ pour faire la même chose qu'avec un smartphone à 90€, donc la logique vous en faite ce que vous voulez .

    Après, si l'Europe s'autorise à faire du protectionnisme et revenir sur certains traiter, c'est largement faisable techniquement d'avoir un ARM Européen pour beaucoup moins que 145Md€ .
  • Ryu2000
    Membre extrêmement actif
    Envoyé par Olivier Famien
    ainsi qu’une fabrication de technologies de pointe évoluant progressivement vers des processus de gravure en 2 nm pour les processeurs.
    Les taiwanais vont probablement y arriver bien avant l'UE.
    Il y a une entreprise qui s'appelle "Taiwan Semiconductor Manufacturing Company" qui maitrise la fabrication de puce :
    AMD passerait à une gravure 5 nm spéciale l’an prochain grâce à TSMC
    TSMC inaugure son usine pour le 3 nm, dont la production débutera en 2022

    Envoyé par Olivier Famien
    L’Europe a également une position technologique forte dans les réseaux mobiles, y compris les technologies 5G actuelles et les technologies 6G émergentes.
    Toutes les grosses puissances mondiales sont en train de travailler à fond sur la 6G alors qu'elle est prévue pour 2030. Elles n'ont vraiment pas envie de prendre du retard, c'est impressionnant.

    Envoyé par Olivier Famien
    l’Europe, quant à elle, est de plus en plus dépendante des puces produites dans d’autres régions du monde — notamment celles utilisées pour les communications électroniques, le traitement des données et les tâches de calcul, y compris les processeurs.
    Pour les processeurs ça va être compliqué de se faire une place à côté d'AMD et Intel.
    Il y a des chinois qui produisent des processeurs x86 et ont en entend pas trop parler. (l'architecture x86 appartient à Intel et ils n'ont pas la licence)

    Envoyé par Olivier Famien
    les investissements alloués iront probablement dans les poches de bureaucrates surpayés à occuper des postes administratifs.
    Ce serait dommage.

    Envoyé par defZero
    Concrètement, non, car la fabrication n'est pas rentable au coup de production Européen
    Ça dépend parce que dans certains pays membre de l'UE les salaires sont plus faibles qu'en Chine (Croatie, Lituanie, Lettonie, Estonie)
  • zozizozu
    Membre régulier
    Envoyé par disedorgue
    ... un processeur 2 bits avec une mémoire de 1 demi octet
    Ha ha ha, merci, ça m'a bien fait rire.
    Après, si c'est pour faire tourner Netscape, je dis pourquoi pas ? ( cf https://www.developpez.com/actu/3115...ices-modernes/ ).