La perspective de l'adoption de Libra, la monnaie numérique de Facebook, par les 2,5 milliards d'utilisateurs de Facebook a conduit à un examen minutieux des régulateurs mondiaux, dont beaucoup craignent que son lancement n'érode le contrôle national sur l'argent. Les dirigeants financiers des sept plus grandes économies du monde déclareront ce mardi qu'ils s'opposent au lancement de la "stablecoin" Libra du géant des réseaux sociaux tant qu'elle ne sera pas correctement réglementée, d’après un projet de communiqué du G7 vu par Reuters.
Libra est la nouvelle cryptomonnaie de Facebook basée sur la technologie de la blockchain et disposant de son propre portefeuille numérique. C’est une cryptomonnaie censée permettre d'acheter des biens ou d'envoyer de l'argent aussi facilement qu'un message instantané. Facebook l’a présentée en juin 2019, avec la participation de 28 autres sociétés des secteurs de la finance, du commerce électronique, des technologies et des télécommunications. Ensemble, elles forment l'association Libra – basée à Genève en Suisse – qui doit garantir l’évolution de la monnaie.
Alors qu’il comparaissait l’année dernière devant une commission des services financiers du Congrès américain à Washington pour défendre les biens fondés de son projet de cryptomonnaie, Mark Zuckerberg, PDG de Facebook, avait déclaré que la société attendra le feu vert des autorités de régulation américaines avant de lancer sa cryptomonnaie dans le pays et ailleurs dans le monde. Et depuis lors, l’organe de gouvernance de Libra avance dans la réforme de sa monnaie électronique.
Selon Reuters, le projet de déclaration, qui a été préparé pour une réunion des ministres des Finances et des banquiers centraux des États-Unis, du Canada, du Japon, de l'Allemagne, de la France, de l'Italie et de la Grande-Bretagne, reconnait que les paiements numériques pourraient améliorer l'accès aux services financiers, réduire les inefficacités et les coûts. Mais ces services de paiement doivent être supervisés et réglementés de manière appropriée afin qu'ils ne compromettent pas la stabilité financière, la protection des consommateurs, la vie privée, la fiscalité ou la cybersécurité.
Selon le projet de déclaration, sans une supervision appropriée, ces stablecoins (monnaies électroniques stables) pourraient être utilisées pour le blanchiment d'argent, le financement du terrorisme, ou pourraient compromettre l'intégrité du marché, la gouvernance et la sécurité juridique, a rapporté Reuters. Les stabilcoins sont liés à une monnaie traditionnelle ou à un panier d'actifs, et utilisés pour les paiements ou le stockage de la valeur.
« Le G7 continue de soutenir qu'aucun projet mondial sur la monnaie électronique stable ne devrait être mis en œuvre tant qu'il ne répond pas de manière adéquate aux exigences juridiques, réglementaires et de surveillance par une conception appropriée et en adhérant aux normes applicables », lit-on dans le projet de déclaration, d’après Reuters.
Libra a été beaucoup critiquée depuis son lancement et continue de l’être par les autorités financières et politiques. En décembre 2019, la cryptomonnaie a été attaquée par le président de la Suisse où le projet cherche à obtenir un consentement réglementaire. Lors d'une interview avec la chaîne de télévision suisse SRF, le président et ministre des Finances de la Suisse Ueli Maurer a déclaré que Libra n'a aucune chance de réussir dans sa forme actuelle, « parce que les banques centrales n'accepteront pas le panier de devises qui la sous-tend » . M. Maurer a recommandé que Libra continue d’être retravaillée pour être approuvée.
Certains membres de l'association Libra comme MasterCard, Visa et Stripe ont quitté le projet l’année sans donner de détails leur départ. Mais en février dernier, Ajay Banga, PDG de MasterCard, a confié au Financial Times que sa société s’est retirée parce qu’elle ne voyait pas comment Libra pourrait rapporter de l'argent. Selon ses explications, sa société et lui ne sachant pas de quelle façon Libra leur rapportera de l’argent, il était inquiet de gagner de l’argent par des moyens peu scrupuleux.
Cependant, différentes autorités du G7 envisagent le lancement de leur propre monnaie électronique
Malgré les réticences, Facebook n’a pas l’intention d’abandonner son objectif de lancer la nouvelle monnaie numérique. Et en attendant, il cherche justement des solutions pour atteindre ce but dans le cadre d'un examen réglementaire. En mars, le site The Information a révélé, après s'être entretenu avec « trois personnes connaissant bien le sujet », que Facebook envisagerait pour l'instant de proposer des versions numériques de monnaies soutenues par l'euro ou le dollar. Dante Disparte, responsable du projet, a aussi dit dans une déclaration relayée par la BBC que Facebook « reste pleinement engagé dans le projet ».
Selon Reuters, le Conseil de stabilité financière (CSF) du G20 a formulé 10 recommandations en avril pour une approche commune et internationale de la réglementation des crytomonnaies stables, à l'initiative du géant des médias sociaux Facebook qui a proposé sa propre monnaie Libra. Mais Facebook n’est pas le seul a avoir un projet de monnaies numériques. Le projet de communiqué du G7 note qu'un certain nombre d'autorités du G7 explorent les opportunités et les risques associés aux monnaies numériques des banques centrales (CBDC).
La Banque centrale européenne a déclaré ce mois-ci qu'elle devrait se préparer à émettre un euro numérique en complément des billets de banque, a rapporté Reuters. Sa directrice, Christine Lagarde, a déclaré lundi que la banque envisageait « très sérieusement » la création d'un euro numérique, lors d’une réunion virtuelle organisée par le Fonds monétaire international.
Elle a déclaré que la pandémie du covid-19 a conduit à de nombreux changements structurels, y compris la façon dont « nous travaillons, nous faisons du commerce et nous payons ». En conséquence, les paiements numériques ont considérablement augmenté, en particulier dans des pays comme l’Allemagne et l’Italie, où « l’argent comptant était roi », a déclaré Mme Lagarde.
La Banque d'Angleterre a également lancé des consultations sur une livre sterling numérique, selon Reuters. La Chine également s’apprêterait à lancer sa propre monnaie numérique. MIT a rapporté en décembre 2019 que le pays prévoit de lancer un projet pilote en situation réelle de sa monnaie numérique, dont la première phase devrait commencer avant la fin de l'année dernière. La Banque populaire de Chine (PBOC), la banque centrale du pays, devrait tester ce qu’elle a appelé « paiement électronique en monnaie numérique » (DCEP) dans certaines villes du pays.
Le projet du G7 exprime également des inquiétudes quant à la menace croissante d'attaques par des logiciels de rançon, qui sont en augmentation alors que la pandémie covid-19 a déplacé l'activité économique en ligne. « Ces attaques, qui impliquent souvent des paiements sous forme de crypto-actifs, mettent en péril des fonctions essentielles ainsi que notre sécurité et notre prospérité collectives. Nous affirmons notre détermination à lutter contre cette menace tant collectivement qu'individuellement », indique le projet selon Reuters.
Libra a poussé quelques autres changements majeurs en avril dernier. L'Association Libra a déclaré, selon Reuters, qu'elle renforcerait la protection de la réserve de la Libra Coin en cas de « détresse extrême du marché ». La réserve contiendra des actifs liquides avec une échéance à court terme et un faible risque de crédit, ainsi qu'une réserve de capital, dont le niveau est indéterminé.
Un autre changement est que Libra prévoit de renforcer les garanties sur le blanchiment d'argent ou le financement du terrorisme. L'Association s'inscrira auprès du Financial Crimes Enforcement Network (FinCEN) du Trésor américain en tant qu'entreprise de services monétaires, une mesure qui s'accompagnera d'exigences accrues en matière de tenue de registres et de déclaration des annonces, a rapporté Reuters.
Source : Reuters
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Voir aussi :
Libra : Facebook révise ses plans pour lancer sa cryptomonnaie, malgré les critiques qui s'abattent sur la société depuis le lancement du projet
MasterCard a quitté Libra en raison de ses préoccupations concernant la conformité, la monétisation et l'ingérence de Facebook dans les transactions, déclare Ajay Banga, PDG de MasterCard
Le président de la Suisse : Libra de Facebook a échoué dans sa forme actuelle, parce que les banques centrales n'accepteront pas le panier de devises sur lequel la cryptomonnaie est censée être basée
Libra : la nouvelle crypto-monnaie de Facebook basée sur la blockchain avec son propre portefeuille numérique, un Bitcoin-killer ?
Projet de déclaration du G7 : Libra de Facebook ne doit pas commencer avant d'être correctement réglementée,
Le groupe craint que la monnaie ne compromette la vie privée des consommateurs
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Le , par Stan Adkens
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