La Federal Communications Commission (FCC) a déclaré avoir de « sérieux doutes » que SpaceX sera en mesure de fournir un service internet avec une latence inférieure à 100 millisecondes. Cette remise en question coïncide avec une vente aux enchères visant à distribuer 16 milliards de dollars de fonds fédéraux pour soutenir l’accès à internet en milieu rural. Si les informations de la FCC se confirment, SpaceX pourrait être désavantagée lors de cette vente aux enchères et surtout ne tiendrait pas sa promesse envers les futurs utilisateurs.
Dans un rapport sur la vente aux enchères de phase I pour le fonds d'opportunité numérique rurale (RDOF - rural digital opportunity fund), la FCC a admis que Starlink et d'autres fournisseurs LEO (low-Earth orbit, orbite terrestre basse) ont des avantages par rapport aux satellites géostationnaires qui fonctionnent à des altitudes beaucoup plus élevées. Cependant, la Commission est sceptique sur le fait que la latence puisse être déterminée uniquement par l'altitude orbitale, affirmant qu'elle peut également être affectée par des facteurs tels que « le traitement, l'acheminement et le transport du trafic vers sa destination » :
« Nous autoriserons cependant les candidats proposant d'utiliser un réseau à satellite à orbite terrestre basse à postuler pour offrir des services à faible latence basés sur les avantages intrinsèques des satellites à orbite terrestre basse qui peuvent fournir des services à latence plus faible que les satellites géostationnaires et à orbite terrestre moyenne. Les satellites en orbite terrestre basse ne sont pas soumis aux mêmes limitations de latence de propagation que les satellites en orbite supérieure. Nous ne connaissons toutefois aucun réseau en orbite terrestre basse capable de fournir aux consommateurs résidentiels un service à large bande susceptible de répondre aux exigences de latence aller-retour de 100 ms de la Commission. En l’absence d’un tel exemple de performance dans le monde réel, le personnel de la Commission n’a pas pu conclure pour l’instant qu’un demandeur dans cette catégorie est raisonnablement capable de répondre aux exigences de faible latence de la Commission. Nous doutons donc sérieusement que tout réseau en orbite terrestre basse sera en mesure de répondre aux exigences des candidatures pour les appels d'offres dans le niveau de faible latence.
« Les fournisseurs de services qui ont l'intention d'utiliser des satellites en orbite terrestre basse affirment que la latence de leur technologie est "dictée par les lois de la physique" en raison de l'altitude de l'orbite du satellite. Nous restons sceptiques quant au fait que l’altitude de l’orbite d’un satellite est le SEUL facteur déterminant de la capacité d’un demandeur de satellite à satisfaire aux exigences de performances de faible latence de la Commission. Comme l'ont expliqué les commentateurs, la latence subie par les clients d'une technologie spécifique n'est pas simplement une question de physique d'un lien dans la transmission. Le retard de propagation dans un réseau de satellites ne tient pas uniquement compte de la latence dans d'autres parties du réseau telles que le traitement, le routage et le transport du trafic vers sa destination ».
SpaceX a fait valoir que les doutes de la FCC ne sont pas fondés et que Starlink « franchira facilement le seuil de 100 millisecondes fixé par la Commission pour les services à faible latence, même en incluant son ‘temps de traitement’ dans les pires scénarios irréalistes ». En fait, avec des altitudes de 539 à 570 kilomètres (contre 3492 kilomètres pour les systèmes géostationnaires), SpaceX vise une latence inférieure à 20 millisecondes qui s’alignerait avec l’internet par câble. C’est d’ailleurs ce qu’a rappelé Elon Musk sur twitter.
Cela pourrait s'avérer, mais SpaceX est dans une situation délicate. La FCC a écrit qu'elle avait « de sérieux doutes que tout réseau en orbite terrestre basse serait en mesure de répondre aux exigences des candidatures abrégées pour les appels d'offres dans le niveau à faible latence ». En d'autres termes, SpaceX a peut-être raison sur ses allégations de latence, mais sans un réseau fonctionnel, il ne sera pas en mesure de le prouver à temps pour se qualifier pour le financement maximal.
Cela ne signifierait pas que SpaceX serait complètement écarté. Il peut toujours prétendre à un financement en dehors du niveau de faible latence, mais cela pourrait réduire les sommes qu'il serait éligible à recevoir.
SpaceX compte actuellement 480 satellites, mais aucun service grand public pour le moment, et il a exactement un mois pour soumettre une demande pour participer aux enchères. La société prévoit de déployer des services dans le nord des États-Unis et au Canada cette année, mais il serait probablement trop tard.
En mars, Elon Musk avait déjà fait valoir que Starlink proposerait une assez bonne expérience « car la latence sera très faible » avant d’ajouter : « Nous visons une latence inférieure à 20 millisecondes afin que chacun puisse jouer à un jeu vidéo fluide à un niveau compétitif, comme s’il s’agissait d’un seuil pour la latence ». D’après ce dernier, « la quantité de bande passante disponible sera suffisante pour permettre une utilisation typique d’internet, au moins dans les zones rurales », ce qui implique de pouvoir regarder des films en HD ou de jouer à des jeux vidéo dématérialisés probablement en HD aussi sans se soucier de la connexion.
Actuellement, plusieurs autres entreprises sont à différentes phases de planification et de lancement de leur constellation de satellites positionnés en basse altitude, notamment OneWeb, Telesat, Space Norway, Facebook et Amazon. Soulignant que « le monde semble avoir un appétit insatiable pour la bande passante » en ce moment, Elon Musk a précisé que sa société est prête à lancer les satellites d’autres entreprises technologiques dans l’espace même si ces dernières sont en concurrence avec Starlink.
Sources : Elon Musk, FCC
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Les entreprises de télécoms n’auraient-elles du souci à se faire, si SpaceX parvenait à concrétiser son projet Starlink ?