
et alerte le parquet national financier sur des soupçons de favoritisme
Depuis ce mardi 2 juin, StopCovid est disponible en téléchargement sur Google Play et Apple Store. Samedi 6 juin, le secrétaire d'État au numérique Cédric O a annoncé sur RMC que l’application a « dépassé le cap du million d’utilisateurs ».
Si l’application a bel et bien été développée de manière bénévole au cours d’un projet piloté par l’INRIA, le studio de développement, Lunabee, a fait savoir à nos confrères chez l’Obs que ce travail sans rémunération n’était prévu que jusqu’au lancement de l’application, soit le 2 juin. Lunabee va donc continuer de travailler sur l'application, mais avec une maintenance payante. Entre aussi en jeu les prestations des entreprises comme Outscale (qui s'occupe de sécuriser les données) et Dassault Systèmes (qui s'occupe de l'hébergement) qui vont-elles aussi facturer leur prestation au gouvernement. La maintenance et l’hébergement de l’application coûteraient donc au gouvernement entre 200 000 et 300 000 euros par mois.
Un montant qui n’a pas tardé à faire réagir. Le chercheur indépendant Baptiste Robert suspecte une surfacturation visant à payer rétroactivement les entreprises impliquées bénévolement dans le développement de l'application : « la surfacturation est un moyen de payer les entreprises rétrospectivement, disons-le ! Le gouvernement doit faire preuve de plus de réalisme et de transparence. Cette application coûtera beaucoup d’argent pour une efficacité probablement nulle ».
ANTICOR a montré elle aussi son indignation. Le 10 juin, celle-ci a d’ailleurs annoncé avoir saisi le parquet national financier, qui s’occupe entre autres des atteintes aux finances publiques et à la probité. ANTICOR est une association fondée en juin 2002 par Éric Halphen et Séverine Tessier pour lutter contre la corruption et rétablir l’éthique en politique. Son ambition est de réhabiliter le rapport de confiance qui doit exister entre les citoyens et leurs représentants, politiques et administratifs. L’association regroupe des citoyens et des élus de toutes tendances politiques engagés pour faire respecter les exigences démocratiques non partisanes.
ANTICOR soupçonne des conflits d'intérêts et du favoritisme après la révélation du coût d'hébergement de l'application qui serait très supérieur aux pratiques du marché. L'association s'inquiète de possibles surfacturations et pointe aussi une atteinte aux règles de la commande publique, car StopCovid n'a pas donné lieu à un appel d'offres.
L’association anticorruption observe que la maintenance de l’application disponible gratuitement sur l’ensemble des téléphones portables iPhone et Android par le biais de plateformes de téléchargement l’App Store et Google Play est assurée par la filiale Outscale, une filiale de Dassault Systèmes. Pour Anticor, le choix de recourir à la société Outscale en tant qu’attributaire du marché de maintenance de l’application StopCovid n’a fait l’objet d’aucune procédure de passation de marché public, pourtant obligatoire pour un tel montant.
En effet, la passation d'un marché public est soumise à des règles de procédure et à des règles de publicité. D'une part, l'acheteur public doit se conformer à une procédure, déterminée en fonction de la valeur de l'achat et de son objet (travaux, fournitures, services). D'autre part, et pour garantir une concurrence satisfaisante, l'acheteur doit appliquer des règles de publicité qui varient, elles aussi, en fonction de l'acheteur (collectivité, État, etc.), de la valeur du marché et de l'objet de l'achat.
Le gouvernement est tenu de procéder à un appel d’offres à partir de 139 000 € hors taxes pour les marchés de fourniture et de services selon les règles de la commande publique, indique l’association, qui considère que le délit est constitué.
L’hébergement du serveur de l’application est pris en charge par Outscale, qui fait partie de l’équipe projet StopCovid. Selon une FAQ disponible sur le portail du ministère de l'Économie, des Finances, de l'Action et des Comptes publics, « c’est à ce jour, le seul prestataire d’hébergement qualifié SecNumCloud par l’ANSSI. Ils sont également hébergeur de données de santé sur leur périmètre ». Certains pourraient supposer que c’est ce qui explique pourquoi le gouvernement a directement opté pour Outscale, sans passer par l’appel d’offres qui aurait normalement dû être passé pour ce marché public.
En attendant que la lumière soit faite, le cabinet du secrétaire d'État au Numérique a assuré à RTL.fr que « le coût sera plus faible » que le montant évoqué par l’Obs et que « toute la transparence sera faite très rapidement ». « La majorité des dépenses porte sur la sécurisation de l'application et du serveur », précise encore le cabinet qui réfute l'hypothèse d'une surfacturation visant à dédommager les entreprises impliquées dans le projet de façon rétroactive, comme le suspectent certains observateurs.
Source : Anticor, StopCovid FAQ, Seuils de procédure et seuils de publicité, RTL
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